29. L'"Intention"

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Mais qu'est-ce qu'elle a foutu?! Qu'est-ce qu'elle a dit?! Qu'est-ce qu'elle a dans la tronche, bordel?! C'est elle qui va finir sur le grill!

« Je ne sais pas ce qui m'a pris de te demander ça, déclare-t-elle en secouant la tête d'incompréhension pour sa sottise.

— Ne me le demande pas à moi. » Il change de vitesse en montant sur la voie rapide avant de légitimer: « Je vois néanmoins une corrélation entre ta haine de Tyb et le ministre. Son emprise sur la Défense est telle qu'il a le pouvoir de permettre à des psychopathes d'en faire partie. En prenant le contrôle partiel et partial de l'armée sans faire partie de la hiérarchie, il fait de nous des mercenaires. Après ce que les miliciens ont fait dans ton pays, cela doit être une notion pénible.

— J'ai été marquée par les miliciens, murmure-t-elle en portant instinctivement la main au creux de son épaule. »

L'odeur de chair brûlée, voile planant sur le village, reste vivace à sa mémoire. Plus que le souvenir de la douleur elle-même, les réminiscences s'accompagnent toujours de cette puanteur asphyxiante.

« Je vois, opine-t-il sans émotion. Ce que je trouve plus étrange, c'est pourquoi pas directement Colman? Quitte à avoir une arme pointée, pourquoi pas sur la tête du problème? »

Un gouffre s'ouvre sous ses pieds. Le sang reflue de son visage. C'était tellement prévisible! Il est trop intelligent. Elle ne peut pas rivaliser. « Colman est intouchable, tente-t-elle de plaider.

— Non. » Il met d'interminables secondes avant d'admettre: « Mais j'admets que tu puisses le croire. »

L'air retrouve un chemin vers ses poumons. Elle n'en peut plus de ces ascenseurs émotionnels. Il faut vraiment qu'elle parle à l'autre chieur... Il doit la sortir de cette situation.

« Il est tard. Je t'accompagne à ta porte.

— J'allais dire que si tu n'étais pas un sociopathe, je te soupçonnerais d'avoir une idée derrière la tête, mais c'est d'autant plus suspect parce que tu en es un.

— J'essaie de racheter l'interruption de Tyb. C'était un imprévu fâcheux.

— Pour moi ou pour ton agenda? » Il sourit sans répondre et se gare adroitement. « Au moins, j'aurai bien mangé dans un joli cadre, relativise-t-elle lugubrement... À tes frais!

— Alors je n'aurai pas tout à fait failli à mon agenda. »

Il n'a pas besoin d'itérer ses recommandations de sécurité pour qu'elle attende qu'il vienne lui ouvrir en parfait garde du corps. Elle ne prend pas la main offerte cette fois. Il y a trop de risques qu'elle soit observée. Le poids menaçant d'Amalrik l'encombre.

Ils marchent en silence dans les rues désertes. Le couvre-feu est opérant depuis de longues heures. C'est étrangement reposant, une ville morte.

Leurs pas crissent sur la neige. Rien ne vient parasiter ce son chéri. Les murmures et cris de la ville sont absents. L'air froid bruisse et caresse le visage. Rasséréné. Le monde dort.

À part eux.

Aux côtés de Meyer, elle ne craint pas l'arrivée d'une patrouille. Même le régime ne peut rivaliser. Sous son aile, rien ne peut lui arriver qu'il n'ait décidé. Abelone en était persuadée avant qu'il lui en fasse la promesse. Elle le fut à l'instant où il s'est penché sur le capot de la vieille Honda pour lui offrir une bouffée de sa cigarette. Il est son seul danger. En sa présence, elle en oublierait tous les autres périls qui pèsent sur elle.

Et de ça, elle est reconnaissante.

Elle glisse le bras sous celui de l'homme et descend la main le long de l'avant-bras jusqu'à rejoindre celle plongée dans la poche du manteau. Leurs doigts s'entremêlent dans la chaleur de la laine et elle sourit, réjouie des pulsations accélérées de sa poitrine et de l'agitation de son ventre. Une sensation neuve et exaltante.

Black Bag [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant