CHAPITRE 20 : La célérité de Gripoil

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Je  venais de refaire ma tresse dans ma chambre quand Gimli entra, sans  frapper, pour m'annoncer que le Roi était levé et que Gandalf  s'apprêtait à aller le voir. Je le suivis et nous arrivâmes à temps dans  la salle du trône pour entendre Gandalf.

-  Il n'y avait pas de mensonges dans les yeux de Pippin. C'est un  crétin...mais un crétin honnête au moins. Il n'a rien dit à Sauron sur  Frodon et l'Anneau. Et nous avons été étonnement chanceux. Ce que Pippin  a vu dans le Palantir n'est qu'un aperçu du plan de notre ennemi.  Sauron s'apprête à attaquer la Cité de Minas Tirith. Sa défaite au  Gouffre de Helm lui a montré une chose : l'héritier d'Elendil approche.  Les Hommes ne sont pas aussi faibles qu'il ne le supposait, ils ont  encore de la bravoure et de la force pour le défier. Sauron craint cela.  Il ne prendra pas le risque de voir les peuples de la Terre du Milieu  s'unir sous une même bannière. Il rasera Minas Tirith jusqu'à la  dernière pierre plutôt que de voir le retour d'un roi sur le trône. Si  les feux d'alarme du Gondor sont allumés, le Rohan doit se tenir prêt à  entrer en guerre.

Je  profitais de la diatribe du magicien pour aller m'installer à la table  couverte de nourriture et prit une pomme dans un panier, ébouriffant au  passage les cheveux de Pippin.

- Dites-moi, pourquoi devrions-nous courir au secours de ceux qui ne sont pas venus au nôtre ? Que devons-nous au Gondor ? Demanda Théoden.

- Je vais y aller, prévint Aragorn.

Je déglutis péniblement, et laissais ma pomme sur le côté, à peine entamée. Je croisais le regard de Gandalf.

- Non ! Criais-je au rôdeur.

- Ils doivent être prévenus !

-   Ils le seront. Vous vous rendrez à Minas Tirith par une autre route.  Une route sur laquelle l'ennemi ne vous attendra pas. Comprenez ceci :  les choses qui sont en mouvement ne peuvent être arrêtées. Je vais aller  à Minas Tirith...et je ne vais pas y aller seul.

L'istari  avait chuchoté à l'oreille d'Aragorn avant de rehausser le ton et de  fixer Pippin, lui indiquant qu'il irait avec lui au Gondor. Je me levais  alors.

- Je vous accompagne.

Un  poing s'abattit sur la table, mais je ne levais pas les yeux, une odeur  de sous-bois m'ayant chatouillé les narines. Legolas poussa un cri  rageur et sortit. Je soupirais et retournais avec Pippin dans les  chambres afin de nous préparer des bagages légers. Je pris le sac du  Hobbit et le mien et partis à l'écurie les attacher solidement sur Elfwinë.  Je serrais les dents pendant que je harnachais mon cheval, mes gestes  étaient brusques, empreints de colère envers Legolas. Une main se posa  sur mon épaule et me força à me retourner.

Je me blottis dans ses bras, enfonçant mon visage dans son pourpoint.

- Je dois le faire, meleth nîn...

-  Je le sais. J'oublie parfois que tu es telle une brise, qui s'en va où  elle le souhaite... J'ai peur pour toi, car Minas Tirith est proche du  Mordor et tu seras donc la cible des armées de Sauron là-bas.

- Legolas...

- Litya, Gerich veleth nîn...

- Melon le, Legolas.

Je  l'embrassais une dernière fois, consciente que je n'étais pas certaine  que nous nous reverrions un jour. Et je sortis avec Elfwinë, attendant  que Gandalf descende du château avec Pippin.

- De tous les hobbits curieux, Pérégrin Touque, vous êtes le pire ! Allez, hâtez-vous !

- Où allons-nous ? demanda le Hobbit.

Ils  s'engouffrèrent dans l'écurie et je n'entendis plus leurs paroles. Je  me concentrais sur les yeux emplis de douleur de Legolas.

- Va... Ne reste pas là, il est inutile de prolonger encore les adieux ! Lui criai-je.

Son  visage se ferma et il me tourna le dos, courant vers le château. Je le  suivais du regard, consciente de la raideur dans ses épaules, mais je  savais que Gimli serait là pour l'épauler. Je tournais la tête vers  Gandalf qui sortait, assis sur Gripoil, Pippin devant lui.

- Merry, criait-il.

- Cours, Gripoil. Montres-nous ce que célérité veut dire, fit Gandalf.

- Merry ! répéta le semi-homme.

Je  lançais l'étalon au galop derrière son semblable. Il nous faudrait deux  jours complets sans pause pour arriver jusqu'au Gondor, trois si nous  nous arrêtions pour dormir la nuit.

Gripoil avançait grand train, mais Elfwinë  n'était pas en reste, il suivait vaillamment son camarade, ne le  laissant pas prendre de distance. Gandalf nous accorda deux pauses au  cours de la première journée de chevauchée, afin que Pippin se  dégourdisse les jambes. Je m'étais isolée d'eux, n'ayant pas envie de  parler. Mon cœur était à vif encore. Je retenais mes larmes de m'être  séparée de Legolas, même si c'était pour protéger le Hobbit.

La  nuit tomba sur notre chevauchée, mais il n'était pas question de faire  une pause. Nous avions simplement ralenti le rythme de nos chevaux, les  mettant au trot afin qu'ils se reposent. Pippin s'était endormi, retenu  par les bras de Gandalf. Nous chuchotions dans le noir, afin de ne pas  attirer le Mal sur nous et de ne pas réveiller le dormeur.

- Y aura-t-il une fin à tout ceci ?

- Bien sûr... Qu'elle soit heureuse ou malheureuse, la fin approche. Il ne tient qu'à nous d'en déterminer la direction.

- Je suis lasse de subir les assauts du Mordor, Gandalf... J'aspire à la paix, à retrouver les forêts. A être heureuse.

- Il vous manque n'est-ce pas ?

Je ne dis rien, laissant le silence parler pour moi. Les larmes coulèrent sur mes joues. Âme-sœur...

- Vous dites ?

-  il est mon âme-sœur... Je l'ai su lorsque nous avons... Bref... Mon cœur est  déchiré entre mon devoir et mes aspirations personnelles. Je comprends  mieux Aragorn, déchiré depuis déjà des décennies.

Les rôdeurs (TERMINÉE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant