Chapitre 7 - Louve

1.9K 118 4
                                    

Punaise, mais qu'est-ce qu'il est lourd !

Je prends de grandes inspirations afin de ne pas m'épuiser avant d'avoir traîné les cinq corps en dehors de la belle maison qu'a acheté mon père, mais je n'ai pas l'habitude de jouer les brancardiers de morts et ça me porte préjudice.

J'ai bien prévenu cet idiot de chien sur le fait que je n'étais pas en capacité de nettoyer tout ça, mais cet égoïste a préféré en rire plutôt que m'aider. Il m'a exaspéré à un point, celui-là.

N'empêche, ça me fait quand même bien rire. Comment cet ahuri peut vouloir passer tout le reste de sa vie avec moi alors que nous ne sommes même pas parvenus à nous entendre pendant moins de cinq minutes ?

Quoiqu'il en soit, la question n'est pas vraiment urgente dans la mesure où je compte m'enfuir dès ce soir. Je crois d'ailleurs que je n'ai jamais fait autant de choses en trente minutes de toute ma vie.

Dès lors que le fou-furieux a pris congé, j'ai couru jusqu'à ma chambre et me suis changée. C'est donc après avoir enfilé des vêtements de sport que j'ai préparé un sac-à-dos de survie – j'y ai glissé une énorme veste, mon portable et celui d'Ervin, mon couteau suisse, une lampe torche, deux pommes et une bouteille d'eau. J'ai hésité avant d'y mettre mon doudou serpent – parce que son existence est l'un de mes plus grands secrets – mais j'ai décidé de l'emmener car j'ai le pressentiment que je vais en avoir besoin cette nuit.

Heureusement, je ne devrais pas rester dehors si longtemps que ça. Entre le cinglé qui ne voudra plus jamais me lâcher et mon père qui est toujours présent quand il est question de ma sécurité, je sais très bien que quelqu'un me retrouvera et n'ai donc pas besoin de prévoir de rester très longtemps toute seule.

En revanche, j'espère que mon père saura quoi faire pour retrouver ma trace. Je n'ai vraiment, vraiment pas envie de me retrouver dans une meute et de devoir tout à coup jouer la figure maternelle d'un tas de canidés. Très peu pour moi.

Essoufflée à force de tirer Ervin par les épaules, je m'arrête un instant et m'assieds en tailleur afin de réfléchir calmement à la situation.

Le pire dans tout ça, c'est que Rebel Trucmuche ne m'a pas fait si mauvaise impression que ça. En fait, il m'a plutôt plu – ce qui est assez étonnant au vu de son comportement à mon égard.

La première image que j'ai eue de lui, c'est un fou-furieux en train d'égorger sauvagement mon garde du corps. Il était nu comme un ver, plein de sang parce qu'il a été blessé à l'épaule et j'ai eu toutes les raisons de le trouver repoussant.

Alors pourquoi j'ai failli m'agenouiller à côté de lui pour soigner sa blessure ?

Bien sûr, j'ai vite décidé que lui venir en aide était la dernière chose à faire et j'ai plutôt fait ce que je sais faire de mieux – l'intimider au maximum. Bon, j'avoue que ça n'a pas trop fonctionné avec lui.

Mais pendant deux ou trois secondes, c'est comme si j'avais inconsciemment perdu le contrôle – un peu comme si mon inconscient s'était manifesté et que ma raison s'était volatilisée. Ça m'a sacrément fait flipper, sur le coup. Heureusement que ça n'a pas duré longtemps.

Et si ces histoires d'âmes-sœurs étaient réelles ?

Je lâche un soupir, me frotte doucement le front avec la paume de ma main.

Ce dénommé Rebel est un peu dérangeant, je dois l'avouer - il a quand même égorgé les cinq soldats sensés me protéger en moins d'un quart d'heure. Donc encore une fois, je devrais être effrayée - terrorisée même.

Mais ce n'est pas le cas, pas vraiment.

Je crois que je m'attendais tellement à pire que je relativise, en fait. J'ai quand même pris le risque de lui coller une baffe, et il n'a rien trouvé de mieux à faire que de me passer un savon. Il n'a, en plus de ça, mis aucune de ses menaces à exécution et s'est contenté de mal me parler.

La louve et le rebelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant