Lost In The Fire - Pt.1

56.

[HERO]

Aucun amour ne peut être parfait, ou même sain. Parce que nous sommes humains et que nous ne sommes ni parfaits ni à cent pour cent stables dans nos têtes. Quand on aime inconditionnellement une personne, cela part toujours dans les extrêmes, en bien comme en mal, que ce soit à travers des gestes, des mots ou des actions. Il ne peut y avoir de modération en amour... à moins de se contenter d'une relation tiédasse, sans excitation, juste basique. Je ne suis pas de ces personnes qui se complaisent dans un quotidien fade, sans saveur. Je suis plutôt du genre à exprimer ce que je ressens de manière franche et, parfois grandiloquente. Je ne fais jamais rien à moitié et tomber amoureux en fait partie, à mon plus grand désespoir...

Qui a dit qu'être amoureux était la meilleur des sensations ? La personne qui a osé proclamé cette connerie haut et fort devrait se faire couper la langue ! Y'a rien de pire que de confier son cœur à quelqu'un pour qu'il en prenne soin et, qu'au final, il se retrouve en plus piteux état qu'il ne l'a jamais été. Où sont les putains de bons côtés à aimer quelqu'un ? Hein ? Parce que, de par ma modeste expérience dans le domaine, je n'en ai trouvé aucun ! Toutes ces merdes de papillons dans le ventre, de frissons, de cœur qui bat très vite... franchement, c'est de la grosse niaiserie qu'on nous vend à travers des histoires à l'eau de rose qui puent la guimauve. La réalité est bien moins glamour que la fiction. Chaque histoire ne se finit pas en happy end avec une musique pop acidulée pour accompagner la scène. June et moi n'avons eu qu'un clap de fin brutal avec un générique noir, comme la couleur de notre avenir ensemble...

*

Au bout de quarante-cinq minutes d'interview, nous avons fini de couvrir les bases de ma vie avec Andrew. Je suis toujours aussi inquiet au sujet de June. Après les révélations que le journaliste m'a faites par rapport à la nuit tumultueuse qu'elle a passé à cause de moi, j'appréhende l'état dans lequel je vais la retrouver, tout autant que sa réaction quand elle me verra.

Sera-t-elle soulagée ? Toujours en colère ? Triste ?

Malgré tout, une partie de moi est soulagée d'entendre ça. June s'est inquiétée pour moi. Ça veut dire que je compte pour elle, non ? Bon, peut-être pas autant qu'elle compte à mes yeux, mais un peu quand même.

J'ai également la haine, et pas contre Andrew, comme on pourrait le croire. Non. J'ai surtout la haine contre moi-même. Si je n'avais pas fait le con hier soir, c'est avec moi que June aurait passé le reste de sa soirée — et sa nuit — et non avec lui. J'ai l'impression qu'elle s'éloigne de moi et, au lieu de remédier à ce problème, je la repousse. Tout ça parce que je suis une putain de poule mouillée qui a la trouille de déclarer son amour à la femme qu'il aime !

Ouais, beaucoup d'émotions contradictoires...

Je sens que je ne vais pas pouvoir continuer à garder ça pour moi très longtemps. La situation est en train de m'échapper et, en essayant de la rattraper comme je peux, je ne fais qu'empirer les choses. Mais, malheureusement, aujourd'hui, je dois laisser ce sujet de côté pour me concentrer sur ce qui est en jeu : mon avenir professionnel. Tout ce que je souhaite, c'est fournir une prestation à la hauteur du travail de toutes les personnes impliquées dans ce défilé.

Je quitte la table où nous nous sommes installés pour aller prendre un café. En m'éloignant, j'aperçois, du coin de l'oeil, Andrew en train de visser ses écouteurs, branchés sur son dictaphone et de réécouter la session que nous venons d'enregistrer pour garder les éléments importants pour son futur article. Collaborer avec lui est moins pénible que ce à quoi je m'attendais. Bon, ça ne fait même pas une heure qu'on se supporte, mais la journée risque d'être moins difficile que prévue.