Les loups ont des sentiments

PARTIE 2 : LES BONNES VIEILLES METHODES - Chapitre 18 : "Ça va, Servilus ?"

        Les deux professeurs avaient à présent quitté les quartiers animés de Londres et marchaient en discutant allègrement de tout et de rien, préférant prendre leur temps sous la chaleur qui régnait encore malgré la nuit tombée plutôt que de transplaner –ou dans leur cas, étant alcoolisés, d'utiliser un portoloin (car rappelons que le transplanage en état d'ébriété est fortement déconseillé)– pour rentrer directement au château. Ils arrivaient à présent au parc par lequel ils avaient pris l'habitude de passer car, n'étant pas censé être accessible de nuit et un peu mieux gardé que les autres parcs où parvenaient toujours à pénétrer quelques drogués et prostitués, il était toujours parfaitement désert. Mais cette fois, ça n'était pas le cas. 

       Snape et Lupin étaient en plein coeur du parc, leurs baguettes éclairant le chemin, quand Lupin s'arrêta soudainement de parler en tournant la tête vers les arbres. Mais c'était trop tard. Il n'avait pas fini son mouvement que des ombres qu'ils eurent à peine le temps d'apercevoir une demi-seconde apparurent tout autour d'eux pour disparaître aussitôt dans un épais brouillard qui les empêchait de voir leurs propres mains. Il y eut un cri et des bruits de lutte puis, à peine quelques secondes après que ce brouillard ne les ait enveloppés, ne laissant pas le temps aux professeurs de réagir, il se dissipa et Snape vit alors, au milieu de la brume restant, Lupin pris au piège par les ombres. Il croisa le regard de l'une d'entre elles mais, alors qu'il amorçait un mouvement pour venir au secours de Lupin, ils disparurent dans un « pop » sec. Snape avait vu dans l'esprit de la personne dont il avait croisé le regard où ils avaient transplané et, se concentrant sur cet endroit, disparut à son tour, ne prenant pas même le temps de paniquer. 

       L'ancien mangemort réapparut dans un bruissement doux sur un épais lit de feuilles mortes au milieu d'une forêt. Le coeur battant à tout rompre, il tourna sur lui-même pour tenter de voir par où étaient partis les ombres et Lupin, mais la forêt était trop sombre, il parvenait à peine à distinguer les troncs qui l'entouraient, et les seuls bruits qui lui parvenaient étaient trop lointains et confus pour l'aider en quoi que ce soit. Il se métamorphosa aussitôt en loup et un tout autre monde s'offrit alors à ses yeux Il entendait avec précision le moindre petit bruissement dont il identifiait aussitôt la nature : il entendait un hérisson fouiller dans des feuilles à quelques mètres de lui, un oiseau sur sa gauche prit son envol, les pas trottinants d'un gros blaireau résonnaient un peu plus loin... Il lui suffisait de humer l'air pour qu'un flot d'informations sur ce qui l'entourait lui parvienne : le blaireau était une femelle, cette forêt était principalement constituée de frênes et de chênes, une agréable odeur de champignon flottait dans l'air... Et il pouvait voir le hérisson, les talus, le tapis de feuilles, un petit groupement de champignons qui poussait au pied d'un arbre... 
       Il repoussa cette désagréable sensation d'inquiétude qui lui soulevait le coeur et faisait frissonner son cerveau et, se concentrant sur son but, il entendit presque aussitôt des bruits de pas précipités qui ne pouvaient être que ceux d'humains, en même temps que lui parvenait leur odeur de sueur, d'excitation et de peur. Il se précipita dans cette direction et n'eut que quelques mètres à faire pour les apercevoir traînant entre les arbres un Lupin bâillonné et ligoté qui se débattait comme il pouvait. Arrivé à quelques mètres d'eux, il reprit sa forme humaine pour les attaquer, sa baguette brandie, mais ils l'entendirent et se mirent à courir en lançant des sorts par-dessus leur épaule. 
Et soudainement, ils disparurent. 

       Snape s'arrêta, la respiration saccadée. Il tendait l'oreille mais pas un son ne lui parvenait, il n'entait même plus les hiboux hululer ; la forêt était parfaitement silencieuse. Il reprit sa forme de loup mais là non plus, il ne percevait rien. Décidant qu'il valait mieux être prêt à attaquer, il se fit de nouveau humain et courut dans la direction qu'il avait suivie en coursant le groupe de ravisseurs.