Chapitre 37 : "Le jaune ne me va pas"

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        Lupin se réveilla les yeux gonflés par les pleurs. Il se précipita sous la douche, ou plutôt s'y traîna en prenant soin de ne croiser aucun de ses deux colocataires et se laissa lentement réveiller sous l'eau chaude qui coulait sur son visage. Son esprit émergeant petit à petit, il décida qu'il était idiot d'avoir pleuré ainsi la veille pour des sentiments qu'il avait plus ou moins ignoré avoir jusque là et qu'il devrait davantage se sentir reconnaissant d'avoir retrouvé Snape. Aussi n'adopterait-il pas une attitude ennuyeuse et triste mais il serait aussi jovial qu'il pouvait l'être et profiterait du temps de vacances qu'il lui restait avec Snape, en ami, comme ils l'étaient depuis la fin de la guerre. 


—  Bonjour ! salua-t-il joyeusement Snape lorsque celui-ci se laissa lourdement tomber sur une chaise, en caleçon et t-shirt des Doors (Lupin se demandait toujours d'où il sortait ces t-shirts si loin de son style). 
Pour toute réponse, Snape soupira longuement. 
—  Café ? 
—  Mm-hmm, acquiesça Snape. 
Lupin posa une tasse fumante d'un café bien noir devant Snape qui attrapa un paquet de céréales pour en verser une portion démesurée dans un bol d'un bleu foncé. 


       Après quelques minutes de silence, Snape sembla enfin capable de parler et dit sans relever la tête : 
—  Je crois que j'ai fait une connerie. 
—  Ah oui ? demanda Lupin qui s'était plongé dans le journal en voyant que son colocataire n'était visiblement pas prêt à parler. 
—  J'ai recouché avec Louis, dit Snape d'une voix blanche. Il dort toujours. 
       Lupin resta un instant silencieux puis se décida finalement à rire. 
—  C'est une connerie d'avoir fait ça ? demanda-t-il innocemment. 
—  Oh Remus, ne sois pas idiot ! Bien sûr que c'est une connerie, lâcha Snape exaspéré. Pour une raison qui m'échappe totalement, je semble incapable de l'envoyer balader et je vais être obligé de me le coltiner jusqu'à-ce qu'il me trouve assez insupportable pour partir. 
—  Tu n'es pas croyable, Severus. 
—  Quoi ? marmonna Snape, le visage dans les mains. Tu ne pensais pas la terreur des cachots si faible ? 
—  Non, ce n'est pas ça, Sev', je ne suis juste pas très sûr de tes méthodes. Et ne t'es-tu jamais demandé pourquoi tu n'arrivais pas à le quitter ? 
—  Que veux-tu dire ? demanda Snape en relevant la tête, suspicieux. 
—  Eh bien, je ne sais pas, peut-être que tu ne le quittes pas parce que tu ressens quelques chose pour lui. 
Snape le regarda comme s'il venait de dire la plus énorme des absurdités puis sembla y réfléchir une demi-seconde avant de répondre d'un air dédaigneux. 
—  Non, ce n'est définitivement pas cela. Je crois que c'est plutôt pour des raisons... pratiques. 
—  Quand tu es avec lui, tu n'as plus à aller draguer pour coucher, c'est ça ? 
—  ... Voilà. 
—  Oh, Severus, vraiment... 
       Lupin leva les yeux au ciel devant un tel manque de romantisme de la part du Serpentard. Et s'il n'avait pas été dans cette disposition particulière due à la compréhension récente de certains sentiments, il aurait été désolé pour Louis que Snape l'utilise ainsi —même s'il était en cet instant plutôt soulagé. Il jeta d'ailleurs un coup d'oeil vers la porte de Snape que l'on apercevait dans le couloir en espérant y voir un Louis défait qui aurait surpris la conversation, mais il n'y avait personne. 


***


        Louis était tout bonnement insupportable. Il était en train de gâcher les vacances de Lupin et de Snape, mais ce dernier ne semblait pas prêt à faire quoi que ce soit pour y remédier. Et tout ça pour pouvoir coucher quand il voulait. 
       Louis tentait de faire des efforts comme il l'avait fait jusqu'à mi-août, mais il avait énormément de mal à réprimer sa jalousie, qui s'était empirée lorsqu'il avait appris que Lupin n'était plus avec Tonks, le voyant comme un rival d'autant plus sérieux. Heureusement, il avait tout de même fait la tête pendant presque trois jours, laissant à Lupin tout le loisir d'être avec Snape, qui en semblait lui aussi ravi, mais il restait bien trop présent au goût des deux collègues. 
       Seulement, cette fois-ci, Lupin n'avait pas la même patience. Depuis qu'il avait formulé dans sa pensée cette attirance pour Snape, il ne pouvait plus l'enfouir comme avant et lui aussi sentait poindre une certaine jalousie qui le crispait de plus en plus rapidement en présence de ce Louis collant, possessif et aux pieds de Snape comme un vulgaire toutou alors qu'il ne savait rien de lui : il ne savait pas ce qu'il venait de traverser, il ne savait pas ce qu'avait été sa vie, il ne savait pas qu'il prenait souvent la forme d'un grand loup gris, il ne savait même pas qu'il se réveillait la nuit, en proie à des cauchemars dont il ne parlait jamais, et qui le mettaient dans de tels états qu'il en vomissait parfois le peu de nourriture qu'il avait fait l'effort d'ingérer au dîner.  Et la présence de cet abruti empêchait Lupin d'être là pour le Serpentard lors de ces nuits difficiles. 
Le fait que lui-même n'ait plus personne pour s'occuper puisque Tonks l'avait quitté n'arrangeait rien. 

Les loups ont des sentimentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant