Chapitre 5 : "Voudrais-tu aller prendre un café ?"

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        Snape raconta alors à Harry ce qu'il s'était passé après que lui et ses deux amis soient partis avec ses souvenirs, le laissant pour mort (avec raison). Il lui raconta le sérum contre le venin de Nagini qu'il avait en permanence sur lui et qu'il avait enchanté pour s'activer si il détectait que son coeur ne battait plus car il était impératif que Snape s'assure de la mort de Voldemort, comment il avait assisté à la mort de Harry mais avait senti qu'il ne l'était pas et comment il avait aidé dans la bataille –sans préciser qu'il était alors sous la forme d'un loup gris. Au fur et à mesure de son explication, Harry redescendit en pression et finit par cesser de l'ignorer. Mais il était toujours énervé contre lui. 
—  Et pourquoi est-ce que je ne suis mis au courant que maintenant ? 
—  J'avais besoin de repos avant toute chose. 
—  Et moi ? J'avais pas besoin de repos moi peut-être ? J'ai passé des jours à chercher votre corps, à traquer les mangemorts, à m'énerver contre eux pour qu'ils me disent où vous étiez. 
—  Je suis désolé, Potter, dit simplement Snape, surpris d'apprendre que Harry avait tant tenu à retrouver son corps. 
—  Oui, eh bien ça ne suffit pas. Et comment je vais annoncer ça aux autres ? 
—  J'aimerais autant que vous ne le fassiez pas. 
—  Pardon ? Ah parce que en plus vous voulez que je mente pour vous ? Oh mais oui, bien sûr professeur, je vais les regarder organiser des obsèques pour vous alors que je vous sais tranquillement installé chez Remus ! Je suis désolé, monsieur, mais moi, contrairement à vous, je ne sais pas faire ça, je ne sais pas mentir. 
—  Harry ! l'appela Hermione d'un ton de reproche. 
—  Quoi ? 
Hermione ne répondit rien. Elle, Ron et Lupin le regardaient sans prononcer un mot, impressionnés par le ton qu'il osait employer face à Snape, le seul qui semblait y être indifférent. 
—  Je comprends que vous soyez en colère, Potter, je m'y attendais, mais je vous demande de ne pas révéler aux autres que je suis vivant. 
—  Et je refuse. 
—  Mais, Harry, tu ne peux pas le forcer... 
—  JE REFUSE DE MENTIR ! hurla Harry en coupant Hermione. 
—  Harry... retenta Hermione. 
Mais cette fois ce fut Snape qui la coupa. 
—  Laissez Granger. Après tout, c'est peut-être plus simple comme ça. 


       Un long silence suivit et Lupin finit par relancer la conversation en demandant à Ron des nouvelles de sa famille, qui n'était bien sûr pas au mieux. L'atmosphère se détendit tout de même mais Snape ne parla pas beaucoup, et Harry encore moins. 
Lupin finit par leur annoncer qu'il était temps de partir quand il vit Snape se passer une main sur le front en grimaçant ; il avait mal à la tête et besoin de repos. 
—  Au revoir, Remus ! dit Ron avec un signe de la main. 
—  Merci pour le thé ! ajouta Hermione avec un grand sourire. 
—  Prenez soin de vous, les enfants ! Harry, se tourna-t-il vers lui en posant une main sur son épaule malgré l'air toujours fermé de Harry, je suis content de t'avoir revu. 
Harry baissa les yeux et finit par dire : 
—  Moi aussi Remus. 
Lupin lui fit un grand sourire, ravi de l'entendre dire ça, et Harry ne put faire autrement que de le lui renvoyer, malgré tout toujours un peu grognon. 


        Dès le lendemain matin, la Gazette du sorcier titrait : « SNAPE N'EST PAS MORT ». Le concerné n'eut pas le courage de lire l'article. Il avait espéré que Potter tiendrait sa langue après toutes les explications, mais le survivant avait apparemment très mal pris la cachoterie. De nombreux hiboux étaient arrivés, dont une beuglante particulièrement douloureuse de Minerva McGonagall, outrée qu'aucun de ses deux collègues ne lui ait dit la vérité. Lupin fut d'ailleurs appelé à Poudlard en début d'après-midi par celle-ci, mais cette fois en tant que directrice, pour faire un point sur les cours qui allaient reprendre trois jours plus tard, sans professeur de défense contre les forces du mal. 
Lupin revint sur le sujet le lendemain dans la matinée. 
—  Remus, tu as vu ce que ça a provoqué, réagit Snape. La Gazette a encore titré sur moi ce matin. Et puis tous ces hiboux... Je pense que je vais m'éloigner du monde magique, trouver un travail ailleurs. 
—  Tu es sérieux ? 


       Juste à cet instant, un nouveau hibou déboula par la cheminée et déposa une lettre sur la table du salon. Celle-ci se déplia toute seule et commença à énoncer d'une voix grave de femme : 
« Bonjour Monsieur Snape, je m'appelle Vera Clarington, je travaille à la Gazette du sorcier et j'aimerais vous poser quelques questions. » 
Mais Snape, las, ne la laissa pas continuer. Il pointa sa baguette sur la lettre qui s'embrasa dans un cri. 
—  Excuse-moi Remus, tu n'auras plus à subir ça longtemps. Je vais chercher dès aujourd'hui un endroit pour loger. 
—  Déjà ? Tu peux rester, tu sais. Tu n'es pas encore totalement remis, ça serait peut-être mieux. 
—  Non, ne t'inquiète pas, je vais très bien, je n'ai plus besoin de rester. 
—  Ça ne me dérange pas. 
—  Pourquoi es-tu si insistant ? Tu as amplement payé ta dette, tu n'as pas besoin d'en faire plus pour moi. 
Lupin s'assombrit soudain et dit d'une voix grave que Snape ne lui connaissait pas : 
—  Tu crois vraiment que c'est pour ça que je te propose de rester ? Tu crois que je reste avec toi pour... payer ma dette envers toi, que je ne fais ça que pour te remercier de m'avoir sauvé la vie ? 
Snape le regardait sans répondre. 
—  Vois-tu, Severus, je passe outre tout ce que tu peux avoir dit ou dis encore parfois parce que je sais que tu ne le penses pas réellement, je te laisse être sarcastique, piquant, ça ne me dérange pas. Quand on s'y fait, c'est même plutôt amusant. Mais là, que tu penses ça, ça me blesse profondément. Si tu ne vois rien d'autre que cette... dette, alors oui, tu ferais peut-être mieux de partir. 
—  Remus, je... 
—  Qu'est-ce que tu attends ? De toute façon c'est ce que tu veux, non ? Tu n'attends que ça, de partir, d'être enfin loin de moi, alors va t'en. 
—  Mais... Les Gryffondors sont définitivement... 
—  Oui je sais ! Les Gryffondors sont tous des sous-merdes débiles à côté des merveilleux Serpentards ! Mais si on est si insupportables que ça, qu'est-ce que tu fous encore là ? Hein ?! se mit à crier Lupin. 
—  Baisse d'un ton, s'il te plaît. 
—  Sinon quoi ? Je suis chez moi, je te parle sur le ton qui me plaît, et si ça ne te convient pas, tu sais où est la porte ! 
—  Oui en effet, je crois qu'il vaut mieux que je parte tout de suite, répliqua Snape d'un ton glacial en se levant. Je n'apprécie pas tellement que l'on m'agresse sans aucune raison. 
Il tourna les talons et quelques minutes plus tard, il transplana depuis le pas de la porte de Lupin après lui avoir adressé un froid « Au revoir, Lupin. » 


        Lupin se laissa tomber dans un fauteuil en soupirant. Qu'est-ce qu'il lui avait pris de s'énerver de la sorte ? Il se rapprochait enfin de Snape, qui ne se montrait plus hostile envers lui, et tout ce qu'il trouvait à faire était de le mettre à la porte. 
Il fallait dire que ces quelques jours avec Snape avaient été plutôt agréable et Lupin avait été ravi d'enfin se rapprocher de ce personnage qui l'intriguait tant, alors l'entendre dire que le seul lien entre eux était cette dette de vie l'avait terriblement blessé. 
Mais franchement, à quoi s'attendait-il ? C'était évident que Snape allait finir par partir. Si Lupin s'était très vite fait à la présence de ce dernier dans son canapé, et n'aurait pas été contre un séjour prolongé de l'ex-mangemort chez lui, il était idiot d'avoir pensé que Snape voudrait rester. Comment avait-il pu être assez stupide pour croire que Severus Snape pourrait jamais le considérer comme un ami ? 


        De son côté, le Serpentard était un peu perdu. Il n'avait absolument pas compris la réaction si soudaine de Lupin. Il prit une chambre d'hôtel en centre-ville puis s'installa avec un livre dans un café un peu plus loin. Mais il avait du mal à se concentrer sur sa lecture et ne cessait de repenser à ce qu'il s'était passé avec Lupin. « Tu crois que je reste avec toi pour payer ma dette envers toi ? Si tu ne vois rien d'autre que cette... dette, alors oui, tu ferais peut-être mieux de partir. » 
Snape ne cessait de se passer et repasser ces phrases dans sa tête. « Si tu ne vois rien d'autre que cette dette »... 
Mais, au fait, pourquoi accordait-il tant d'importance à tout cela ? Qu'est-ce que ça pouvait lui faire de ne plus voir Lupin ? 
Eh bien justement, ça l'embêtait de l'admettre, mais il était un peu déçu, il s'en rendit compte le soir, seul dans sa chambre, de ne plus avoir le loup-garou pour lui tenir compagnie. En fait, maintenant qu'il y repensait, il avait réellement apprécié les moments passés avec Lupin. Etait-ce de ça que parlait Lupin ? Cet « autre » chose que la dette. Était-ce de... l'amitié ? Beurk, non ! Snape ne mangeait pas de ce pain là. 
       Mais il dut se rendre à l'évidence le lendemain matin quand, après une nuit agitée, il se retrouva à sonner à la porte de du loup-garou : il s'était attaché à lui. 
« Qu'est-ce que tu fais là ? 
Snape demanda d'un ton aussi ferme qu'il le put mais dans lequel on percevait tout de même un petit manque d'assurance : 
—  Je... Voudrais-tu aller prendre un café ? » 

Les loups ont des sentimentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant