Les loups ont des sentiments

Chapitre 23 : "Une nette tendance à mourir"

        Snape sentait quelque chose de chaud couler le long de son dos en même temps qu'une douleur lancinante le parcourait tout entier. Il ne pouvait s'empêcher de se cambrer sous la douleur, mais ces imbéciles ne lui arracheraient pas un cri, jamais. Il ne leur donnerait pas cette satisfaction pour si peu. 

       Cela faisait deux semaines que Snape était retenu captif par les anciens partisans du Lord noir. Sa fièvre avait disparu et il avait retrouvé un peu de sa résistance habituelle à de telles conditions de vie bien qu'il eût déjà perdu beaucoup de poids. Il réussissait à présent à dormir pendant quelques précieuses dizaines de minutes d'affilée malgré la vive lumière en permanence allumée dans sa cellule, presque chaque nuit, une ou deux fois dans la nuit, parfois même trois ; cela lui permettait rarement d'atteindre plus de trois ou quatre heures de sommeil au total, mais c'était déjà cela. 
       Les « bonnes nouvelles » s'arrêtaient là. Il n'était pas nourri plus d'une fois tous les deux jours, voire trois jours parfois, d'une simple assiette de quelques légumes froids et gorgés d'eau, et n'avait qu'un seul verre d'eau par jour, ou presque –il n'était pas rare que ses bourreaux omettent de le lui apporter. Mais cela n'était pas le pire. 

       Le pire était que Kyle et ses comparses avaient trouvé un nouveau jouet : un long fouet de cuir. Et Snape était en ce moment-même en train d'en subir les assauts. C'était Amalia, une femme aux traits et aux manières grossières, qui le maniait, et elle s'en délectait. A chaque claquement, ses yeux scintillaient de plaisir ; à chaque déchirure de la peau, à chaque nouvelle traînée de sang, elle jubilait. La seule chose qui manquait étaient les cris de douleur de sa victime : Snape semblait presque indifférent à la torture. Amalia savait bien qu'il souffrait, mais elle était agacée qu'il ne souffre pas plus. Elle ne laissait cependant pas cette petite contrariété lui gâcher son plaisir et fouettait joyeusement la peau blanche maintenant recouverte d'un rouge sombre. 

       Le dos de Snape était si déchiqueté par la lanière de cuir que sa peau avait presque disparu, zébrée de plaies qui n'avaient pas le temps de cicatriser entre chaque nouvelle séance de fouet.  Il ne pouvait plus s'adosser aux murs et le moindre mouvement lui faisait mal, mais il pouvait résister à pire que cela. Sa seule vague préoccupation quant à ses blessures, bien qu'il n'y croyait pas vraiment, était que s'il sortait un jour vivant d'ici, il aurait un corps si meurtri que même ses talents de potionniste et les meilleurs soins médicaux pourraient se révéler insuffisants à le rendre regardable ; même pour une aventure d'un soir, il se saurait terriblement embarrassé de devoir se déshabiller et révéler son dos. Ou pire, devoir révéler son bras, où était de nouveau gravée la marque des ténèbres, mais au couteau cette fois. S'il en ressortait vivant, il craignait devoir sans cesse cacher ses cicatrices sous des charmes de dissimulation, ce qui était toujours déstabilisant car il fallait y penser constamment (en tout cas à chaque fois qu'il exposerait ces zones aux yeux d'autres personnes).  

       Ses chevilles et poignets étaient en aussi mauvais état que son dos. Ses chaînes ne le quittaient jamais et, pour ajouter au mal qu'elles causaient déjà par leur simple poids, Snape était en plus actuellement, comme à chaque fois qu'on le fouettait, suspendu au milieu d'une pièce par les poignets, juste assez haut pour que ses pieds touchent le sol sans lui offrir un appui suffisant pour se poser dessus. Ainsi, presque tout son poids reposait sur ses poignets enserrés dans les fers. 
En-dessous de ces fers, sa peau était si irritée par le frottement dur du métal qu'elle se délitait, laissant sa chair à nu au contact de ses chaînes. Il ne se passait pas un instant sans que Snape n'en ressente la douleur. Il avait bien sûr connu pire et pouvait largement le supporter, mais la douleur est quelque chose de très fatiguant et il en avait assez de ne pas être libre de ses mouvements.