Eyelash Beat

3. Rentre à la maison

Serindë.

Je la déteste. Je la déteste. Je la déteste. Je la déteste. Elle a fait le choix que je n'aurais jamais pu faire de mon plein gré.

À défaut de me relever fièrement et de sourire avec indifférence comme j'en ai l'habitude, c'est complètement avachie sur mon trône que je m'apitoie sur la situation.

-Fait chier, je jure.

Les oreilles bouchées par mes doigts comme si je ne suis encore qu'une enfant, je ne cesse d'ignorer les riverains de Tenebris qui frappent à ma porte.

Épuisée, je me lève mollement et ouvre brutalement les portes de mon palais. Les cris cessent. La foule qui s'étend derrière la porte est infinie, je n'en vois pas la fin.

-En tant que représentante de la foule ici présente, JE DEMANDE UNE AUDIENCE ! hurle une riveraine tout en incitant les habitants à crier avec elle.

Ils n'en font rien, bien trop craintifs de la Reine.

Craintif de ma personne.

La honte.

-Qu'il en soit ainsi, je soupire en tirant brutalement la jeune femme par le bras et en claquant la porte aux nez de mes sujets.

Si accorder une simple audience à une jeune fille va inciter les habitants à rentrer chez eux, je peux même lui en accorder des milliers.

La jeune femme rousse rejette ses cheveux derrière ses épaules et s'adresse finalement à moi. Sa voix est méprisante. Il n'y a aucun doute sur le fait qu'elle me haït.

-Reine Serindë, je réclame que Tenebris se mobilise pour assassiner le groupe royal.

Assassiner ? On me voit comme une meurtrière tellement sans-cœur qu'elle est capable de tuer ses amis..?

-JE fais partie du groupe royal aussi, je maugrée, une expression neutre collée au visage.

Cette fille. Cette fille peut aller loin. Il lui suffit simplement de mon accord pour que Sinia ne soit plus que des cendres. Elle me fait penser à Isil.

-Je sais.

Je hausse un sourcil.

-Donc tu veux attenter à ma vie ?

-Quoi ? Non ! s'exclame la jeune rousse, un tantinet paniquée. Je ne veux pas attenter à votre vie ! Si, un petit peu, en fait.

-Quelle audace, je râle, à la fois hilare et désespérée.

Sérieux, est-ce que j'ai raté à ce point leur éducation ?

Si cette fille a l'occasion de tous nous tuer, elle le fera. Je dois absolument garder un œil sur elle.

La main tremblante de la jeune rousse saisit une fine lame qu'elle sortit des poches du manteau bleu nuit qui repose sur ses épaules. En soupirant, elle laisse tomber maladroitement l'arme au sol.

Curieuse de savoir ce qui amène la jeune femme dans mon palais, je prends une grande inspiration.

-Qu'est-ce qui t'amènes ?

-Je vous l'ai déjà dit.

La jeune rousse ne saisit sans doute pas ce que j'avance. Elle est sur le point de me questionner, mais à peine a-elle ouvert la bouche que je lui coupe la parole.

Quel plaisir de voir ses traits déformés par l'agacement.

-Qu'est-ce qui t'amènes réellement ?