10. Papillon

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Serindë.






9. 10. 11. 12. 13.

Treize heures se sont écoulées depuis ma fuite. J'ai mangé douze groseilles. J'ai pris une pause de onze minutes. J'ai compté dix cicatrices sur mon index. Ça fait neuf fois que l'envie de me mettre dans une colère monstre me transperce l'esprit.

Reste calme. Efface tes sentiments.

Les rebelles sont sans aucun doute à ma poursuite. Maintenir ma garde est ma seule priorité.

Les chemins granuleux, propres aux forêts, commencent à disparaître pour laisser place à de petits sentiers. Je me rapproche d'un Royaume.

Tenebris et Virtuoso sont bien trop loin. Ce sont les seuls Royaumes que je puisse fréquenter sans risquer l'arrestation.

Eöl et ses habitants sont bien trop bons pour me dénoncer. Ils ne m'ont jamais persécutée.

Maria reste le Royaume le plus proche. Mais il est le plus dangereux.

Je prends le risque que Dagnir me tue ou m'exile dans les grandes limbes.

Après tout, j'ai brisé la Charte tant affectionnée. Est-ce que je le mérite ? Probablement. Je le veux ? Certainement pas.

Je ne regrette rien.

Je me penche, efface pour la énième fois mes traces de pas dans la neige et je relève mes cheveux noirs en une queue de cheval pour qu'ils cessent de me gêner.

Le vent frais qui souffle emmêle mes cheveux récemment attachés.

S'enfuir est un problème. Se cacher en est un autre.

Bien que le ciel noir ne soit pas éclairé par la Lune ce soir-ci, je peux parfaitement distinguer Maria ainsi que le palais de Dagnir. Son Royaume est si authentique et particulier. La contrée baigne dans l'eau, il est rare de voir une parcelle de Maria complètement sèche.

J'adorais me réfugier ici, étant enfant, lorsque Yelro Valren, le père de Dagnir, était encore en vie.

Il doit rester deux kilomètres avant que je n'arrive à destination.

Presque une heure passe et demi, et je me retrouve confrontée à un obstacle de taille. Entrer dans le Royaume sans me faire repérer.

Je saisis ma lame, sachant pertinemment qu'en cas d'attaque, elle ne me servira à rien. Je regrette de ne pas avoir mon épée sur moi.

Aller à Maria sans protections relève d'une mission suicide.

Personne ne le fera à ma place, c'est à moi de le faire, protégée ou non.

La frustration et la peur me rongent l'estomac.

Un pas après l'autre, je pénètre lentement et silencieusement le Royaume. Pas un garde ne me repère ou ne m'arrête. J'en viens à deviner que ma visite nocturne était attendue. Tout comme le fait que je n'étais pas équipée outre mon petit couteau.

Mes pas me mènent au grand palais, si distinctif des villas autour.

Je ne frappe pas à la porte et entre directement.

Quel manque de politesse ! m'aurait dit Isil.

Elle est si élégante, si polie, toujours bien apprêtée.

Ce palais semble dénué de vie. Chaque lumière est éteinte et le silence règne.

Sans attendre, je grimpe les marches de l'escalier en colimaçon constitué de marbre gris qui longe le mur. Les murs de couleur bleu pâle me donnent envie de repeindre les miens de la même couleur.

Eyelash BeatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant