34. Mots sur maux

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Dagnir.



J'écoute vaguement Serindë qui argue avec concentration avec les rebels alors que je lutte pour rester éveillé.

Je me tords de douleur pour la énième fois, grimaçant lorsque je tente d'apaiser ma souffrance en plaquant ma main sur la plaie qui s'étend durement sur mon ventre.

J'ai affreusement chaud, et la tête endormie d'Aerin sur mon épaule qui me partage sa chaleur corporelle n'arrange pas les choses.

Je prends conscience que mon état se dégrade, et pourtant, je ne fais rien.

J'ai l'impression d'être spectateur de ma propre existence.

Je crois que je me laisse mourir.

La discussion s'enflamme et le ton s'élève, résonnant anormalement dans mes oreilles. Je me sens faiblir, et dans un gémissement de douleur, je relève mon haut noir pour apercevoir ma plaie.

Des centaines de marteaux imaginaires frappent ma boîte crânienne, m'envoyant par intermittence dans les bras de Morphée.

Des stries rouges s'étalent sur ma plaie qui s'est réouverte, et la vue du sang me provoque d'insupportables remontées acides.

Ma blessure s'infecte.

Putain.

Je n'ai pas le droit de mourir. Je ne peux pas.

Je ne peux pas parce que... je ne lui ai pas dit.

Ça me brûle, putain !

Et je ne sais pas si je parle de mon cœur ou de ma plaie.

Les tambourinements répétitifs de Lorshara contre les barreaux de sa cellule finissent par réveiller Ae qui finit par quitter mon étreinte puis se relever du mur contre lequel nous étions adossés.

Ses yeux verts trouvent les miens et ses traits se tordent d'inquiétude.

-Dagnir... Ta peau est si... pâle.

Je tente de la rassurer, en vain. Je ne parviens pas à articuler un seul mot.

Je me sens prisonnier de mon corps, souffrant et complétement déboussolé.

La rousse saisit mon t-shirt que j'ai relâché quelques instants plus tôt et j'ai tout juste assez de force pour saisir son poignet et l'empêcher d'avoir accès à ma blessure. L'intensité de mon regard lui fait détourner son attention de ma personne pour se concentrer sur son amie.

Serindë est mal en point. Les regrets et la fatigue se dessinent sous ses yeux et son nez fraichement réparé laisse des traces violettes et rouges virant au jaune qui s'étalent sur ses joues et sous ses yeux, faisant ressortir sa cicatrice sous l'œil gauche.

Je n'ai pas suivi la conversation, mais je sais que Serindë défend corps et âme son Royaume. Son autorité est tellement puissante que le rebel qui lui fait face baisse les yeux et décide de repousser la confrontation.

Les rebels ont signé la Charte, installant une paix éphémère entre nos deux peuples sous tensions. Toutefois, nos ennemis n'ont pas dit leurs derniers mots et souhaitent quelque chose en retour, ce que Serindë refuse de leur accorder.

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