11. Confronter un cœur à un autre

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Serindë.



Je crois qu'on pouvait dire que Yelro Dagnir était un saint.

Avant lui, je n'avais jamais vu une personne aussi gentille, Eöl mis à part.

Yelro était la figure paternelle dont je n'ai jamais bénéficié. Lorsque j'échappais à mes entraînements étouffants pour me réfugier à Maria, Yelro était là, un conte à la main qu'il avait lui-même écrit.

Un conte dans lequel la princesse ne choisissait jamais le prince. Un conte dans lequel elle lui brisait le cœur.

Il n'était jamais comme les autres.

Sa sympathie immédiate avait premièrement attiré ma méfiance.

Puis ma confiance.

Son décès ne me surprend pas. Quand j'avais douze ans, il y a treize ans, l'ancien roi était déjà âgé.

Je ne suis jamais retournée à Maria depuis l'hiver de mes dix-huit ans. Mon père et ma mère avaient abdiqué uniquement pour seller l'horrible couronne de rubis qui ceint, quand je me décide à assumer mes fonctions de souveraine, ma tête.

Celle-ci est actuellement dans mes mains. Mes doigts caressent lentement les rubis qui ornent cette couronne.

Sans y être invitée, je me lève du lit de la mezzanine pour me diriger vers la salle de bain, juste en face.

Cela fait des semaines que je n'ai pas pris une vraie douche.

Je prends tout mon temps et utilise toute sorte de shampoings et de gels douche. Si bien que je prends quelques minutes pour que la mousse dans mes cheveux disparaisse entièrement.

J'enfile des vêtements propres qui diffèrent de ma tenue de combat dont je me débarrasse. Je prends sous le bras mon pantalon large décoré de multiples holsters et de mon fourreau dans laquelle se cache habituellement mon épée et mon haut qui est très près du corps pour qu'il ne limite pas mes mouvements.

Je coiffe rapidement mes longs cheveux noirs de mes doigts et je remarque ainsi que je n'ai plus le capuchon qui assure ma discrétion.

-Je récupérerai ma dignité perdue, je murmure quand l'image des rebels me maltraitant m'apparait.

Je ne me sens plus à l'aise. Mon esprit, bien trop préoccupé par les évènements présents, n'a ni remarqué ma peau découverte, ni le froid mordant qui me fait tousser et éternuer toutes un peu trop fréquemment pour que ça ne m'agace pas.

Je veux juste rentrer chez moi.

Mes doigts tâtonnent mon arcade et j'en viens, en un soupir surpris, à haïr la cicatrice qui s'y est formée.

-Quand est-ce que tu cesseras de me suivre partout où je vais ? je demande quand j'aperçois la présence de Dagnir.

-Le jour où tu cesseras de n'en faire qu'à ta tête.

-Ce sera le jour où tu seras mort.

Il ne répond rien, mais marmonne à quel point je ne suis qu'une imbécile immature.

-Dégage, soufflai-je au moment où il s'engouffre dans la mezzanine sur mes talons.

Quel culot de le virer alors qu'il est dans son propre Royaume.

-Je t'en prie, continue de me donner des ordres. Tu ne veux pas que je t'appelle Ma Reine tant que t'y est ? crache-t-il, se moquant ouvertement des habitants de Tenebris qui s'entêtaient à m'appeler comme tel.

-C'est plaisant de te voir reconnaitre à quel point je te suis supérieure.

Il soupire.

-Arrête de te comporter comme une enfant, Caizana.

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