Chapitre 30

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Pendant toute la journée, Théodora et Oda ont parlé de son histoire et de sa vie. Elle lui a raconté leurs vies à la rue, comment les filles ont tenu durant cette période difficile et aussi ce qu'elle a subi à la Black Rose Laundry. Oda ne l'a pas une seule fois interrompu et l'a écouté attentivement. Elles ont mangés ensemble et même Danielle les a rejoint pour l'écouter et a même manifesté son désir de les rencontrer, ce que Théodora a accepté tout de suite. Cela leur ferait plaisir d'avoir une amie.

Mais quand elle est rentrée chez elle, la jeune mère est à la fois prise entre le soulagement de ne pas avoir été virée et l'angoisse du fait qu'elle ai rien dit. C'est étrange le fait qu'elle lui fait parler d'elle toute la journée mais elle décide de ne pas s'attarder dessus. Le risque d'un licenciement n'est toujours pas écarté et quand elle se couche près de ses filles le soir, elle se promet de tout lui dire. Demain matin sans faute. Une fois que ses paupières se ferment, et pour la énième fois, le visage triste et charmant de Théodore vient s'imposer à ses rêves.

Le lendemain matin, Théodora presse le pas pour atteindre Bluewaffle House. Elle ne prends même pas le temps pour admirer les lanternes au pieds des saules pleureurs en train de s'éteindre alors que l'aube se lève. Elle ne peut plus attendre, elle compte tout dire à Oda dès qu'elle la verra. Elle n'aura pas l'esprit tranquille tant qu'elle ne lui aura pas parlé.

Pourtant, alors qu'elle arrive devant la porte et frappe avec l'heurtoir, personne ne vient lui ouvrir. Ni Oda, ni même Danielle.

« C'est étrange, je suis pourtant sûre d'être à l'heure. Je vais recommencer pour voir. »

Elle s'avance d'avantage vers la porte lorsqu'elle sent quelque chose à la fois mou avec des objets durs, s'écraser sous son pied. Elle baisse la tête pour voir que l'objet est de couleur marron.

« Qu'est-ce que c'est ? »

Elle se penche pour ramasser ce qu'elle a écrasée et failli avoir un arrêt cardiaque. Il s'agit d'une bourse en cuir, remplie visiblement d'énormément de pièces.

« Qu'est-ce que cet argent fait là ? Ce n'est quand même pas pour moi, non ? »

Théodora regarde par terre pour voir si elle aurait manqué autre chose et en effet, une feuille se trouve à ses pieds. Elle l'a prends et ne tarde pas à savoir que c'est de la part d'Oda.

Chère Théodora,

Ne vous inquiétez pas si l'on ne vous ouvre pas

nous sommes partis tôt ce matin

et nous souhaiterions que vous nous rejoignez

Vous verrez sous vos pas

de quoi assouvir votre faim

dans le restaurant où vous mangerez

Retournez la lettre pour y voir la carte

où vous pourrez suivre le chemin

Dans le lieu où vous nous retrouverez

Alors partez de ce pas

Oda et Danielle Doridge

« Quel étrange poème, c'est sûrement une idée d'Oda. », pense-t-elle en souriant.

Comme c'est indiqué, elle retourne la feuille et en effet, une partie de la capitale anglaise y est représenté avec une trace encrée fait à la plume. Mais, quelque chose attire son intention et la rends encore plus perplexe.

« Certaines rues dans lesquelles je dois passer me sont totalement inconnues. Bon, il est vrai que je ne connais pas toutes les rues de Londres, non plus. »

Tout d'un coup, un son familier arrive à ses oreilles. C'est l'horloge à double cadran, en forme de hibou. Il doit être huit heures et quart, elle doit partir sur le champs.

« Bon après tout, on verra bien. »

Mais soudain alors qu'elle passe le portail, un nouveau son lui parvient. Familier également. Des notes tapotés, chacune différente mais l'ensemble est sans pareil, si léger. C'est comme si la musique valse dans ces oreilles, sans violence, sans bruit, sans obstacle pour arrêter la présentation.

Théodora remonte sa tête vers la fenêtre qui donne sur le grenier et voit ce qu'elle voulait voir.

« Théodore. »

Il est bien là, assis devant son piano qu'elle sait pourtant brisé, jouant pourtant frénétiquement sur un clavier imaginaire dont la mélodie est la résultat de plusieurs années de maîtrise et de passion. La jeune femme ne peut s'empêcher de le regarder, son visage chagriné et pourtant si concentré ne cesse de la captiver.

« Continuez à jouer, je vous prie. C'est si beau. »

Malheureusement, la musique s'arrête peu de temps après sa pensée. Pourtant, il ne bouge pas de sa place, il se content de retirer les mains du clavier pour se les joindre et baisser la tête. Sa peine semble sans limite. Théodora sent on cœur se fendre. Elle ne peut en voir plus. Elle cache sa bourse dans les plis de sa robe et s'apprête à regagner James V Avenue quand elle sent un regard sur elle. Mais elle ne le craint pas, bien au contraire.

Elle se retourne pour voir la silhouette grise de ce si charmant gentleman et même si elle est trop éloignée pour voir son visage, elle sent qu'il peut la voir.

« Merci pour cette belle musique. »

Alors Théodora lui sourit de loin, espérant qu'elle ait raison et s'engouffre dans le brouillard pour regagner les rues bourgeoises de Londres.

Et elle avait raison. Théodora ne vit pas que celui-ci touché par cette simple marque de tendresse, lui a offert en retour un autre sourire plein de reconnaissance.


La Veuve et le Pianiste Tome 1, Bluewaffle HouseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant