Chapitre 34

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Je suis bien trop tracassée pour réussir à fermer l'œil. Je regarde ma montre ; 2h47. Sachant déjà que ma nuit ne commencerait pas de suite, je décide de me lever pour rejoindre la cuisine.

Évidemment. Bien sûr, qu'il y serait aussi. C'est toujours comme ça que ça se passe, dans les films, pas vrai? La demoiselle ne veut absolument pas croiser le connard qu'elle déteste, mais elle tombe sur lui au milieu de la nuit. Super...

Hors de question de me détourner. Je suis chez moi, c'est lui l'invité. Je me force à ne pas loucher sur son torse merveilleusement nu, et qui est d'ailleurs nouvellement tatoué lui aussi, et ouvre le frigo pour y prendre du lait.

Je porte le verre que je viens de remplir à mes lèvres, essayant de restreindre le malaise que je ressens. Il est là, à deux pas de moi, sirotant un chocolat chaud — d'après l'odeur que sa tasse dégage, en tout cas — une main dans une poche de son jogging, et ses yeux cernés de fatigue. Il me fixe, sans pour autant entamer une conversation, et heureusement, parce que je ne veux absolument pas parler avec lui. Pour autant, la situation n'en est pas moins embarrassante.

Bon sang, qu'il est dur de ne pas baisser le regard et analyser ses tatouages, je peux vaguement voir qu'il en a sur chaque bras, dans le cou et sur la poitrine, mais je suis incapable de distinguer leur forme sans les regarder directement. Hors de question qu'il me surprenne à m'intéresser à l'encre qui lui recouvre la peau!

Il souffle, avant de commencer :

— Écoute, J...

— La ferme, dis-je sèchement. Je n'arrête pas de te dire que je ne veux pas t'entendre. Tu as été un fantôme pendant deux ans, contente-toi de le rester. J'espère que tu as commencé tes recherches pour un appart, parce qu'il est hors de question que tu restes ici plus de quelques jours.

Je suis fière d'avoir réussi à lui déballer tout ça sans même bégayer ou réfléchir, et il va, je l'espère, en être vachement choqué parce que ça ne me ressemble pas.

Eh bien, non.

Il... sourit? Totalement! Ce crétin sourit en coin! Il pose sa tasse calmement et commence à s'approcher de moi. Je recule, jusqu'à ce que mon dos se colle au plan de travail.

— Simon, l'avertis-je.

A quoi il joue, putain ?

Il s'arrête à une distance raisonnable:

— Dis-moi de partir, Joy. Dis-le-moi, et je serai parti demain, je resterai un fantôme pour le reste de nos vies.

C'est l'occasion rêvée. Il décide finalement de lui-même de partir, en quelques sortes, parce qu'il sait que je vais lui demander de le faire, évidemment que je vais le faire.

Alors pourquoi aucun mot ne réussit à franchir mes lèvres ?

Mon cerveau tourne à mille à l'heure, je veux lui dire de se tirer, de ne plus jamais venir me voir, je le veux tellement! Mais putain, je n'arrive pas à ouvrir la bouche.

— Alors? Reprend-il, s'approchant cette fois-ci si près de moi que je sens son souffle chocolaté caresser le bout de mon nez.

Des frissons me parcourent l'échine, et j'avale ma salive difficilement. Les réactions que continue d'avoir mon corps me rendent malade, je déteste ça.

— Ne t'approche pas plus ou je hurle.

Ma propre voix me lâche, je ne parais pas crédible pour un sous.

Il semble d'ailleurs d'accord avec ma conscience, puisqu'il se remet à sourire de cette façon malicieuse qui me donne envie de le gifler ou (et ?) de l'embrasser.

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