[Le coup de vent.]
Le lendemain, je me lève aux aurores.
Je laisse Renaud dormir sur le canapé, pour me préparer chez moi. Il y a des jours qu'on préférait ne pas vivre, qu'on voudrait oublier avant l'heure, mais qu'on sait pertinemment qu'ils resteront gravés en nous. Une heure plus tard, José et Renaud m'accompagnent à l'hôpital. Et j'avais raison, c'était long et désagréable. Malgré tout, j'ai l'amère sensation que ça aurait dû être pire que ça. J'ai eu le sentiment de vivre ma journée comme un spectateur, si bien que je ne sais pas ce que je ressens.
Le soir, en rentrant dans mon appartement, je ne suis plus que l'ombre de moi-même et cette impression de déjà-vu me donne le vertige. Encore sous les effets des drogues, je m'endors sur le fauteuil, totalement étourdie. Je me réveille avec la sensation de tomber dans le vide, en plein milieu de la nuit. Je suis perdue. Non, complètement paumée !
Je ne reconnais pas tout de suite où je suis. Alors que mes yeux cherchent un repère, ils se posent sur le carton sur lequel j'ai griffonné le prénom d'Alex. Je prends brutalement conscience que j'ai rompu avec lui hier, que j'ai avorté aujourd'hui et je panique. Renaud qui veille toujours sur moi, qui dormait, semble-t-il, tout contre moi, se réveille en sursaut. Je marmonne quelques mots, mon téléphone se retrouve dans le creux de ma main et je compose à l'instinct un numéro.
— Loïs, ma belle...
— Em...
Impossible de continuer.
— J'arrive, ma belle. Ne raccroche pas.
J'entends Emma parler à Ben, mais je ne comprends pas, c'est trop lointain. Est-ce que je dors encore ?
— On arrive, rendors-toi, ma...
Je me retourne et je m'assoupis aussitôt comme si entendre sa voix m'avait suffi.
La seconde fois, je me réveille avec la sensation d'avoir enfin dormi un peu. Je sais qu'il est tard, car la lumière baigne mon appartement. Mais ce n'est pas ça qui a eu raison de mon sommeil, non, ce sont les voix qui s'élèvent de mon salon. Je rêve où Emma est en train de se chamailler avec Renaud à propos de chocolat chaud ? Sans doute. Merde, c'est bien le rire de Ben ?
— Renaud ! m'exclamé-je en atterrissant sur mes pieds.
— Hum ?
— Comment as-tu fait ?
— Elle déraille, marmonne Ben.
Ils sont bel et bien là, Emma et Ben, devant moi. J'avance vers eux, je plante mon index dans le torse de Ben. Il grimace. Je tire la langue à Emma. Elle m'offre un beau sourire.
— Tu es le meilleur, mec.
Je tends la main vers lui et il me claque la paume, affichant un air guilleret que je ne vois plus assez souvent.
— Tu te fous de nous ! s'exclame Ben. Il n'a rien fait, c'est moi qui ai conduit toute la nuit.
Emma éclate de rire et m'enveloppe dans ses bras menus, mais réconfortants.
*
Ces retrouvailles sont inestimables.
Renaud m'apprend que je les ai réellement appelés. Et mes amis m'expliquent qu'ils sont partis immédiatement. Ils ont emprunté la voiture d'un collègue et ont roulé toute la nuit. Ben et Emma sont arrivés il y a moins d'une heure. Avant que je n'aie le temps de râler, Emma me précise qu'elle ne voulait pas me réveiller. Je l'écoute me dire que j'ai besoin de repos en répétant presque mot pour mot ceux de l'infirmière. Je pourrais fusiller Renaud du regard, car c'est forcément lui qui a radoté ces consignes, mais je préfère lui sourire.
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Folie toujours
Romance"Si tu tombes, je tombe." Alex la trouve belle et sauvage, ses seins sont même sublimes. Loïs le découvre beau et mystérieux, aux mains assurément magiques. Leur vie s'entrelace depuis longtemps, pourtant c'est un jour de septembre, dans la chambre...