44. Isabel ou ce qu'on n'attendait pas

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Fait assez rare pour être souligné, Isabel était épuisée. Assise sur le perron de sa maison, elle caressait distraitement la tête de son Diricawl en se disant que la vie était vraiment une chienne. Mae, Alban, Grace, et maintenant l'abuela. Isabel ne l'aimait pas, elle la détestait même assez cordialement. Mais merde, c'était tout de même sa grand-mère. La mère de sa mère.

Un bruit de pas sur le sentier la tira de ses pensées, mais elle ne releva pas la tête et continua de caresser son Diricawl. Elle savait qui c'était.

« Hey, fit Alban en se laissant tomber à côté d'elle.

-Hey.

-Comment ça va ?

-J'suis vivante.

-C'est une chance qui n'est pas donnée à tout le monde.

-C'est pour ça que je dis ça. »

Angat poussa un petit cri, réclamant plus de caresses. Isabel se plia à ses volontés et lança à son voisin :

« On s'engueule pas ?

-Faut croire que non.

-Pétard, on devient chiants. »

Ils sourirent de concert, ce qui était actuellement la chose la plus proche d'un franc éclat de rire qu'ils étaient capables de produire.

« Grace ? » demanda Isabel au bout d'un moment.

Alban eut une drôle de grimace.

« Elle est bizarre. Mon père a demandé un rendez-vous avec son psy, il lui explique qu'elle se cherche énormément, qu'elle a perdu tous ses repères et n'a plus confiance en elle. Elle parle pas beaucoup, elle dit des trucs qui ont l'air d'avoir du sens pour elle mais pas pour nous ... bref, elle déraille. Mais gentiment, elle fera de mal à personne. »

Isabel grimaça.

« Ton père a pu lui parler ?

-Elle lui a envoyé une lettre dès le premier jour, elle lui demandait pardon. Mon père lui a répondu qu'elle était entièrement pardonnée, qu'il avait confiance en elle et qu'elle était déjà bien assez punie.

-Il le pense vraiment, ou c'est juste pour la rassurer ?

-Non, il le pense vraiment. Il trouve que notre famille a assez souffert comme ça, qu'il faut rester unis. Et il a pas tort », rajouta Alban après quelques secondes.

Isabel opina du chef.

« Je vais lui parler de mes notes, fit Alban en réponse à la question informulée de la jeune fille. C'est fini les cachotteries. Je vais pas recommencer une douzième fois, je vais me trouver un boulot et on va plus en parler. Papa comprendra. »

Isabel eut un faible sourire. Il avançait, Alban la tête de mule, il avançait.

« Et chez toi ? reprit la tête de mule.

-Oh ... bah comme d'hab. Ma mère mène tout le monde à la baguette, et ça a intérêt à filer droit.

-Comment elle va ? »

Isabel chercha ses mots. Il était difficile de décrire l'état d'Eugenia, actuellement.

« Vu de l'extérieur, elle a juste l'air stressée et exténuée, comme quand elle a beaucoup de boulot. Et de fait, elle a beaucoup de boulot en ce moment, à cause du procès Lestrange – punaise, j'arrive toujours pas à me remettre du fait que c'est la famille de Lloyd ...

-C'est sa famille, c'est pas lui », l'interrompit Alban.

Isabel hocha la tête et reprit :

« Mais quand on regarde de plus près, c'est plus que ça. En fait, je pense qu'elle est bien plus proche de sa mère que ce qu'elle voulait bien montrer, et que ça lui met un sacré coup au moral, cette affaire. Pas tellement que l'Abuela soit malade, mais plutôt qu'elle lui ait caché tout ça. En fait, je pense qu'elle culpabilise.

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