Alban marchait dans la forêt, activité somme toute assez banale vu l'endroit où il habitait, lorsqu'il entendit des bruits de feuilles écrasées et d'engrenage qui grinçait. Il releva aussitôt la tête, aux aguets, espérant que ce ne fût pas un Moldu qui s'aventurait dans ce trou paumé. Non, se ravisa-t-il, c'était peu probable. Theophilius et surtout Eugenia Emerson avaient lancé tant de sortilèges Repousse-Moldu que l'endroit était limite devenu incartable.
Il s'approcha de la source du bruit à pas de loups et se cacha derrière un tronc pour observer. Sans grande surprise, il reconnut Isabel, sa voisine, qui pédalait comme une folle entre les arbres. En revanche, lorsqu'elle sauta à terre et envoya son vélo valser quelques mètres plus loin, il fronça les sourcils. Il se passait quelque chose.
Isabel était visiblement dans une rage folle. Non contente d'avoir lancé son vélo contre un arbre, elle donnait à présent de violents coups de pied dans le sol en hurlant comme une possédée. Alban resta longtemps caché derrière son arbre à observer sa voisine, fasciné, mais lorsqu'il la vit trébucher contre une racine, s'étaler par terre et se rouler en boule, sa conscience le titilla.
« Chère voisine », déclara-t-il en s'approchant, pas trop près tout de même.
Isabel ne bougea même pas.
« Cher voisin, répondit-elle toutefois d'une voix étouffée. J'étais en train de méditer sur le sens de la vie et la finitude l'homme. Que me vaut ta visite ?
-Je venais méditer avec toi », répondit Alban.
Isabel releva la tête et se tourna vers le jeune homme. Ses courts cheveux bruns étaient tout emmêlés et des feuilles et des brindilles s'étaient coincées dans ses mèches. Elle observa Alban sans rien dire, sans même ciller. La situation devenait gênante, elle toujours allongée sur le sol, lui debout à quelques pas d'elle, et Alban finit par craquer.
« Quoi ? s'exclama-t-il, sur la défensive.
-Je médite, répliqua-t-elle d'un ton moqueur. Non, en vrai, tu trames un truc et j'essaye de deviner ce que c'est en te fixant intensément jusqu'à ce que tu me révèles tout. »
Tant de franchise laissa Alban muet. Isabel éclata de rire et tourna la tête.
« Tu trames aussi quelque chose », répondit finalement le jeune homme avec un rictus.
Il disait surtout cela pour clouer le bec à son agaçante voisine. De toute façon, une telle affirmation ne l'engageait pas à grand-chose : Isabel était toujours en train de tramer quelque chose.
« Il est vrai », répondit pourtant la jeune fille d'un ton léger, comme si cela n'avait pas d'importance.
Alban abandonna la partie. Il était fatigué, il avait passé la nuit sur son manuel de botanique et s'entraînait sans relâche depuis ce matin à faire tourner cette foutue assiette dans les airs. Au moins, il maîtrisait parfaitement le Reparo, à présent, songea-t-il en se laissant tomber au sol.
Isabel se retourna sur le ventre, appuya son visage sur ses mains et se remit à détailler Alban sans aucune gêne. Le jeune homme hésita entre l'étrangler et partir en courant.
« Je pourrais faire pareil pour t'obliger à me dire ce que toi, tu as fait, lança-t-il plutôt.
-Tu n'oserais pas », répondit Isabel du tac au tac.
Son ton n'était même pas plein de défi, simplement amusé, mais cela mit Alban sur les nerfs. Il se redressa et lâcha d'un ton coupant :
« Et si je te jetais un sort ? »
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Les Porte-à-faux
Fiksi PenggemarLa lettre qu'ouvrit Henry Eldridge par un innocent matin de juillet semblable à mille autres, ne le prévenait décidément pas de ce qui allait suivre. Le vieux sorcier de cinquante-cinq ans, éleveur de chevaux magiques, rencontre Isabel, dix-sept ans...