A la surprise d'Alban ce fut elle qui revint vers lui.
Cinq jours s'étaient écoulés depuis sa discussion avec la vieille Isabel, et il s'attendait à devoir aller la supplier pour qu'elle acceptât de venir avec lui au centre Leonard More. Il lui avait laissé du temps, connaissant son caractère acariâtre.
Et puis un jour, la sonnette de la maison des Ingham retentit. Theophilius étant parti à l'hôpital voir Mae, Alban se trouvait seul chez lui, il jouait du piano. Il se dirigea à reculons vers la porte et tomba nez à nez, pour son plus grand étonnement, avec la grand-mère de ses voisins.
« Tu vas m'inviter à entrer, ou tu as l'intention de me laisser moisir sur le perron ? » rouspéta-t-elle.
Alban la fit pénétrer à l'intérieur et lui servit une tasse de thé dans le salon. Il n'ouvrit pas la bouche et attendait que ce fût elle qui se dévoila la première. En fait, il ne lui faisait pas vraiment confiance, et se méfiait de ce qu'elle pouvait avoir en tête.
Assise sur le canapé, Isabel faisait rouler sa tasse de thé entre ses mains, les lèvres pincées. Bon, elle n'avait pas l'air disposée à parler. Mais au concours de volonté, Alban l'emportait largement. Finalement, ce fut elle qui craqua.
« Cet endroit dont tu m'as parlé, commença-t-elle précautionneusement, tu le sors d'où ?
-J'ai fait mes recherches, puis j'y suis allé. Un médecin là-bas m'a renseigné.
-Un médecin ? C'est un hôpital ? Je ne suis pas malade ! »
Alban s'abstint de tout commentaire et se contenta de répondre :
« Ce n'est pas exactement un hôpital. C'est, disons, un centre de soins, réservé aux dr ... personnes qui utilisent du Souvenin. »
Il n'était peut-être pas très stratégique de traiter une personne que l'on voulait amadouer de droguée.
« Et qu'est-ce qu'ils font, là-bas ? continua Isabel en prenant une gorgée de thé. Ton thé est infame, Alban. Qu'est-ce que tu mets dedans ? Vous les Anglais, le thé c'est votre fierté, mais ça n'a aucun goût, si ce n'est celui d'une potion mal bouillie. »
Pourquoi Alban voulait-il aider cette vieille pie, déjà ?
« Ils aident les gens à sortir de leur addiction au Souvenin. Ils utilisent des potions curatives, il y a un suivi psychologique ... C'est tout ce que je sais.
-Mmmh », fit seulement Isabel.
Elle jeta un dernier regard dégoûté à sa tasse et en vida le contenu dans le pot de fleurs qui se trouvait derrière elle. La mâchoire d'Alban se décrocha.
« Quoi ? cracha-t-elle.
-Vous n'avez tellement aucune manière que ça en devient artistique, rétorqua le garçon.
-Ah non, ne commence pas ! le menaça-t-elle en agitant le doigt sous son nez. Tu me rappelles ma petite-fille, qui est vraiment une mal éduquée !
-Je prends ça comme un compliment, parce qu'Isabel est unique en son genre, ironisa Alban.
-Unique, peut-être, mais son genre n'est pas le bon ! C'est une mauvaise herbe au milieu du pré, comme toi si tu n'y prends pas garde !
-C'est bon, j'ai saisi l'idée, la coupa Alban qui commençait vraiment à être énervée. Je suis une mauvaise herbe, un avorton, un raté ...
-Mais tout à fait. Ça arrive parfois, qu'une bonne branche donne des fruits pourris. C'est le cas de ma petite-fille, elle vient d'une famille de sorciers parfaitement pure, et elle s'est débrouillée pour être une Cracmol ...
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Les Porte-à-faux
FanficLa lettre qu'ouvrit Henry Eldridge par un innocent matin de juillet semblable à mille autres, ne le prévenait décidément pas de ce qui allait suivre. Le vieux sorcier de cinquante-cinq ans, éleveur de chevaux magiques, rencontre Isabel, dix-sept ans...