8. Ink.Ed

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Ink.Ed shop, Miami,13h35.


Edwin (se prononce Edwine), le tatoueur, prépare calmement son matériel pendant que je remplis une feuille sur mes potentielles allergies et tout ce qui va avec. J'envoie un message à mes parents, que j'accompagne d'une photo du formulaire, pour les remercier. Ils ont un rendez-vous important et n'ont pas pu m'accompagner. De toute façon, je n'avais pas vraiment envie qu'ils soient là, surtout si c'est pour me faire des reproches et critiquer ma décision.

Je vérifie l'exactitude de mes informations et bute sur mon nom de famille. À contre cœur, j'écris « Keaton » parce que c'est le nom qui est noté sur ma carte d'identité et que la procédure veut que j'utilise celui-ci. Je ne sais pas pourquoi je ne l'ai jamais faite changer. En étant une Anderson, ça serait un jeu d'enfant, mais ça ne m'est jamais venu à l'esprit.

Dean prend un coup de fil devant la vitrine de l'enseigne. Le shop a été privatisé rien que pour nous, pendant 2 après-midis complètes. Demain, à la même heure, Ed et Victor passeront sur cette même table pour marquer leur peau de la devise de notre famille ainsi que de son symbole. Cette idée me comble de joie puis mon estomac se tord en pensant à Matthew que j'ai mis à l'écart. Je ne sais plus si je peux avoir confiance, ni si je peux compter sur lui ou encore s'il est toujours mon frère.

S'il est toujours un Anderson.

L'artiste, aux cheveux blonds platine surplombés d'un bonnet en laine gris et à la peau recouverte de tatouage, s'approche de moi en replaçant son gant sur ses mains habiles. Je lui souris poliment tandis qu'il prend ma fiche et la vérifie un instant.

— Ça m'a l'air good ! s'exclame-t-il en la rangeant sur une pile d'autres formulaires du même genre.

Je hoche la tête de haut en bas et jette un regard inquiet vers mon oncle qui n'en finit pas avec son appel. Mes mains deviennent moites, je ne veux pas être seule, c'est une étape trop importante de ma vie pour que je ne la partage pas avec lui. Le tatoueur semble se rendre compte de ma gêne puisqu'il envoie :

— T'inquiètes ! Il a l'temps, on doit encore voir pour la taille du stencil et l'positionnement. De toute façon, j'commencerai pas si t'es pas prête, me rassure-t-il.

Sa voix bienveillante me détend et j'ose un sourire plus franc, qu'il me rend. Il affiche le dessin qu'il est sur le point de me tatouer sur son écran d'ordinateur avant de le tourner vers moi.

— On reste sur un ancrage simple, sans couleur ? vérifie-t-il en modifiant l'éclairage de l'appareil pour que je vois mieux. J'accepte d'un mouvement de tête alors il valide la donnée dans son logiciel. Pour la taille, j'vais avoir besoin de mesurer la distance entre tes omoplates et l'bas de ton dos, histoire que j'puisse retoucher la largeur.

— Heu ouais... je... je vais m'allonger ? demandé-je peu sereinement.

Il contourne son comptoir pour se placer dans un interstice où deux miroirs de pieds se font face.

— Non, j'ai besoin qu'tu valides la longueur et pour ça, il faut qu'tu puisses voir où est-ce que j'arrête les mesures.

Son ton amical et sans prise de tête me rassure tellement que je me place devant les reflets sans appréhender sa réaction à la vue de mon dos. Et j'ai bien fait, il reste concentré sur son boulot sans prendre la peine de relever ma cicatrice, ni même qu'une lueur de peur ou de dégoût ne traverse ses yeux. Après tout, il a sûrement vu pire. Il se fout de ce sur quoi il va tatouer, il reste professionnel et ça me met à l'aise.

Edwin tire un petit ruban qui lui fait office de mètre et le place le long de ma colonne vertébrale. Sur une table basse, un peu plus loin, se trouve un pot de feutre. Il en tire un et le décapuchonne entre ses dents. Je le laisse faire et regarde ses mouvements experts sans qu'aucune angoisse ne s'empare de moi.

L'avocat Du Diable II.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant