L'avocat Du Diable II.

12. Come back home.

Chez Karl&Max, Miami, 23h01.

Adan.

L'avocat que je suis, vient de gagner une argumentation contre madame Alaë Yard. Bordel ce que ça sonne bien. Je ne voulais pas retourner à l'hôpital, alors nous voilà, devant la porte de chez ses parents, sur le point d'y passer la nuit. Évidemment, je ne me suis pas invité chez eux, au beau milieu de la nuit, en forçant leur fille à me laisser partager son lit.

Non, j'ai eu Karl au téléphone ce matin, pour les remercier du tatouage qu'ils lui ont offert, Alaë leur a simplement envoyé un message. Je sais pourquoi elle les évite en ce moment, mais je trouve ça très méchant et même impoli. Ses pères aimeraient la voir, en chair et en os, afin d'avoir une discussion avec elle.

Elle n'est pas du même avis, pour elle, tout va bien. C'est d'ailleurs parce que « tout va bien » que tout à l'heure, quand j'ai abordé LE sujet sensible, ses larmes perlaient au coin de ses yeux noisettes. Je me suis arrêté, je n'avais aucune envie de la voir pleurer. D'après l'application que j'ai téléchargé pour connaître à peu près ses cycles menstruels, ses hormones commencent à travailler, d'où son émotivité.

Je ne suis pas un malade qui veut absolument savoir quand est-ce que sa copine est indisposée, afin d'éviter tout contact avec elle pendant cette période. Non je l'ai téléchargé pour être sûr d'avoir toujours des protections ainsi que « le kit de survie des règles » rempli, à la Yones, au cas où elle n'en n'aurait pas prévu ou qu'elle en serait à court. 

J'ai cliqué sur le premier lien que j'ai trouvé en cherchant sur internet :

De quoi ma copine a besoin pendant ses règles ?

Je suis tombé sur le blog d'une influenceuse qui donnait son ressenti, je l'ai plus ou moins modifié pour l'adapter à ma femme. Entre autre, j'ai remplacé le chocolat noir par du blanc. Les snacks salés par des sucrés. J'ai même prévu d'acheter ce que la fille appelait : des « culottes de règle » au cas où elle tâcherait toutes les siennes. Autrement dit, prendre les culottes les plus moches que l'ont trouve, pour qu'elle les utilise juste pendant cette période. J'ai aussi ajouté une bouillotte en forme d'avocat à mon panier, pour qu'elle soit assortie à ses chaussons.

En clair, je suis devenu un vrai canard avec ma petite-amie. Et putain ça me plaît. Si je me foutais de la gueule des gars de ma promo, quand il refusait une soirée étudiante pour rester avec leurs copines, je regrette. Parce qu'aujourd'hui, je ferai pareil.

Alaë me pousse pour pouvoir déverrouiller la porte de ses parents, silencieuse. Elle n'a pas envie d'être ici, d'avoir cette discussion, de devoir les affronter. Elle est fatiguée et légèrement à fleur de peau. Mais ce n'est pas comme si nous avions réellement le choix. Nous avons quitté l'hôpital sans remplir la fiche de sortie, alors ma chambre a été donnée à un autre patient et nos affaires déposés au service des objets trouvés.

La Yones, pour un handicapé comme moi, c'est impossible, c'est bourré de marches et d'escaliers. Il est hors de question que je dorme chez son troisième père, il est tout de même mon employeur. Même si je suis son futur beau-fils, je tiens à garder un lien strictement professionnel avec lui. Et surtout parce que je ne veux pas lui être redevable.

Je me vois très mal retourner chez mon père, après avoir disparu pendant près d'un mois, sans donner de nouvelles ou même en prendre. Il comprendra. De toute façon, depuis le décès de Marielle, il ne me regarde même plus. Je crois que je la lui rappelle trop. Charles, c'est différent, il ne lui ressemble pas vraiment, mais moi, je suis son portrait craché. Son fils aîné, sa plus grande fierté, sa copie conforme. Si tu savais papa, tu me haïrais... Autant que je me hais. Mais l'amour m'a rendu fou et je ne m'excuserai pas d'aimer.