31. Ultime étape.

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Dade Court, 10h13.

Le procès a tellement avancé ces dernières semaines que je n'arrive pas à croire que nous sommes à la dernière séance. J'ai failli m'endormir sur mon fauteuil à cause de la lenteur de l'avocat ennemi. Je ne sais pas ce que Tisi a, c'est comme s'il s'avouait déjà vaincu. Il ne met aucune volonté dans son argumentation finale. Après tout, ça nous arrange Adan et moi, grâce à lui, on peut se concentrer sur nos autres problèmes.

— Regarde, m'interpelle discrètement mon avocat, l'écran de son téléphone tourné vers mon nez.

Je donne un bref coup d'oeil vers Hurphy pour m'assurer qu'elle est occupée ailleurs, puis je plisse les yeux devant l'élégant costume blanc et hors de prix affiché.

— C'est plutôt le style de Brady, tu trouves pas ?

Il tourne son smartphone vers sa poitrine, l'air perplexe et un poil déçu.

— Quoi, ce n'est pas assez sophistiqué pour le mariage ?

Mon souffle se coupe, mes lèvres se retroussent légèrement.

— Si, bien-sûr que si, ma... mais je croyais que tu cherchais simplement un nouveau costume pour la vie de tous les jours.

— Qu'est-ce que tu en penses ? Tu aimes ?

Son enthousiasme fait papillonner chaque recoin de mon estomac.

— J'aime beaucoup. Tu seras très élégant, Dan.

Il apporte ses lèvres aux miennes. Je ferme les paupières pour le laisser faire, mais derrière nous, Maximilien se racle la gorge. J'esquisse un vif mouvement de recul, soudain consciente qu'entre ses murs, lui et moi ne sommes rien d'autre qu'un avocat et sa cliente.

— Tu me fais perdre la tête, Alaë, murmure-t-il, complètement déconcerté.

Je peine à reprendre ma respiration. Mes pupilles bougent dans tous les sens, à la recherche du moindre témoin de notre étreinte. Je ne vois rien d'autre que des gens complètement perdus par les propos insensés de maître Tisi.

— Maître Yard, s'exclame Hurphy, c'est à votre tour.

Il bombe le torse et se lève fièrement sur ses longues jambes. Avant qu'il ne s'écarte, je chuchote :

— Bonne chance, Dan.

Il me répond par un clin d'œil furtif, puis il se penche au-dessus de l'épaule de mes parents pour leur intimer quelques mots. Dès qu'il a le dos tourné, Max et Karl s'empressent de me rejoindre et de m'entourer. Une chaleur réconfortante dénoue ma gorge.

Enfin, Adan salue toute l'assemblée, en commençant par les membres du jury. Mon pouls bat à toute vitesse. Max caresse mon dos, tandis que Karl m'attire vers lui pour me proposer de poser ma tête sur son bras. J'exécute docilement, les yeux rivés sur mon avocat. Le regard désolé qu'il me lance me fige sur place.

— Mesdames et messieurs les jurés, votre honneur, si je suis là devant vous, c'est pour vous prouver que si Madame Alaë Keaton est assise au banc des accusés, c'est avant tout parce qu'elle est une victime, commence mon avocat, les bras écartés.

Je déglutis difficilement, tandis qu'il me zieute brièvement, je lui fais signe de poursuivre, alors il reprend :

— Comme l'a rappelé si souvent maître Tisi durant ce procès, ma cliente a longtemps été livrée à elle-même. D'abord pendant son enfance, délaissé par son père violent et maltraitant, puis par les professeurs et toutes les équipes pédagogiques qui l'entouraient à l'école. En effet, pendant toutes ses années, personne ne s'est jamais rendu compte des souffrances que subissait Alaë. Mettez-vous à sa place quelques instants, que ressentiriez-vous si tous les adultes de votre entourage n'étaient que des chevaux munis d'oeillères, incapable de voir au-delà des apparences ?

L'avocat Du Diable II.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant