39. Soit, je serai le vilain.

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Au même moment.

Chad.

Le biper n'arrête pas de sonner. J'ai beau indiquer que je suis occupé, il continue de vibrer autour de mon cou.

— Je vais bien docteur, s'essouffle ma patiente, à peine remise de son accident de la route en voyant la lumière rouge s'agiter sur mon buste. Si vous avez une urgence plus importante à gérer, ne vous gênez pas.

Mes yeux jonglent entre le bouton écarlate pendu à ma nuque, et les yeux exténués de la vieillarde. Je souffle, vaincu. Je n'ai pas vraiment d'autre choix.

— Je vais dire à une infirmière de vous apporter un verre d'eau, lui dis-je doucement. Je reviens aussi vite que possible, d'accord ?

Elle effleure mes phalanges avec si peu de force que c'est à peine si je ressens son contact. Je n'ai pas le temps de lui rendre un geste amical, elle a déjà le nez rivé vers la fenêtre pour tenter de trouver le sommeil.

Je me relève silencieusement du bord de son lit afin de me faufiler jusqu'au couloir. Une fois sorti de la chambre, je cherche immédiatement un soignant, ou n'importe qui d'autre du regard. Lorsque je tourne le menton sur ma gauche, un grand gaillard en blouse blanche me fait face, une gelé à la fraise en main.

— Excusez-moi ? l'interpellé-je poliment.

Il se stoppe net, puis me fait face, un sourire sympathique aux lèvres.

— Vous voulez bien apporter un verre d'eau à cette dame ?

— Tout de suite !

Je le remercie rapidement, avant de trottiner jusqu'à la salle de réunion des médecins.

Sur le chemin, je dois esquiver quelques chariots de plateaux repas, des proches inquiets et même envoyer bouler une infirmière, inquiète pour l'un de ses patients, dans une aile qui n'est pas la mienne. Je m'en veux d'être si pressé, mais je connais les règles; on harcèle les médecins de garde au biper, seulement en cas d'extrême urgence.

Dans mon élan, j'enfonce presque la porte d'entrée. Je me ralentis en voyant le directeur de l'hôpital, furieux et l'un de mes camarades de fac, assis en pleur sur une chaise à l'opposé de son tyran.

Je suis étonné de voir autant de beau monde à une heure si tardive. En temps normal, le directeur a fini depuis belle lurette, les cadres aussi et je ne comprends vraiment pas pourquoi ils sont tous encore là. Surtout que c'était une soirée calme, avant qu'on ne m'oblige à venir à cette réunion improvisée.

— Il y a un problème ?

— Ah Chad ! s'exclame le chef de service.

Il me fait signe d'entrer, alors je referme derrière moi. Les seuls bruits dans la pièce sont les sanglots du pleurnichard à ma droite. Ils se tiennent tous face à lui, à l'autre bout de l'immense table en bois ovale, prêts à lui passer un savon. Si ce n'est pas déjà fait.

Entre eux, il y a un plateau avec une carafe d'eau fraîche et des verres. Sans le moindre scrupule, je serre un rafraîchissement à mon collègue. De toute façon, qui osera me dire quoi que ce soit ? Ma famille finance cet endroit à 80%, ils n'aiment pas me contrarier, par peur que l'on leur coupe les vivres.

Ses yeux embués et remplis de détresse trouvent les miens, rassurants je l'espère.

— Installez-vous docteur Anderson, ordonne le plus haut gradé en désignant un siège vide près de lui du revers de la main.

J'opte pour celui plus proche de mon ami. Je n'aime pas ces gens, il est hors de question que je me mélange à eux.

— Est-ce qu'on peut m'expliquer ce qui se passe ici ?

L'avocat Du Diable II.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant