16. Le grand bain.

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Propriété des Anderson, Miami,  12h47.


Je peine à reprendre ma respiration, penchée au-dessus des toilettes, j'ai enfin arrêté de vomir. Ces images, ce que j'ai vu, leurs comportements, Charlie, démunie, seule. Je n'ai pas les mots. Je n'ose même pas imaginer ce qu'elle a dû ressentir, je suis incapable de me mettre à sa place.

Pourtant, moi aussi, un jour, j'ai été sous un homme sans pouvoir lui demander d'arrêter, sans pouvoir me débattre. Mais c'est différent, au fond, j'en avais envie, simplement pas comme ça. Alors qu'elle... Je secoue la tête pour ne plus y penser. Si je continue, je vais vomir une fois de plus.

J'essuie les larmes qui ont enfin arrêté de couler le long de mes joues, me redresse et tire la chasse d'eau avant d'en fermer le couvercle. Je me tourne vers le lavabo pour me rincer la bouche et me laver les mains. Un réflexe étrange me fait esquiver mon propre reflet.

Je crois qu'au fond, j'ai peur de voir ses traits familiers. Les traits de ma sœur, sur mon visage. Je ne veux pas lui ressembler.

Jamais.

Je préfère être un monstre plutôt qu'être... ça. Cette chose cruelle et dépourvue de matière grise. Ce bout de plastique sur patte.

J'attrape le meuble sur lequel repose l'évier et le serre pour contenir mes pleurs. Mon estomac est encore sans dessus dessous. J'en ai même perdu l'appétit. Je ne suis même pas sûre d'avoir le courage de retourner à table après ça. Pourtant il le faut. Personne ne doit savoir avant que j'en parle aux Yard.

Je vais aider Adan a détruire Miller. Jusqu'à maintenant, je n'étais pas très impliquée dans le procès. De toute façon, je suis coupable, c'est peine perdue, je vais retourner en prison. Mais maintenant, c'est différent. Je ne le laisserai pas s'en sortir comme ça.

Ni lui, ni elle.

Je ne sais pas où elle est, mais j'espère pour elle qu'Adan l'a bien cachée, parce que si je la trouve... Je ne lui laisserai même pas le temps d'énoncer ses excuses, elle ne le mérite pas. Tout ce qu'elle mérite, c'est de la souffrance.

Beaucoup, de souffrance. Et la mort serait une trop belle sentence pour elle. Je ne la tuerai pas. Je la détruirai, à petit feu. Comme elle l'a fait avec Charlie, avec moi. Voilà ce que je vais faire. Me venger. Nous venger. Enfin.

Les faibles coups qui retentissent derrière la porte me tirent hors de mes pensées. Je me racle la gorge et replace mes cheveux, avant de défroisser mes vêtements en les frottant vivement.

— Madame Anderson ? Tout va bien ? m'interpelle poliment Abigaël, la gouvernante. 

— Je... Oui oui. J'arrive dans une minute !

— Tata Amina m'a chargé de vous demander si vous aviez besoin de son aide.

Je ne sais pas ce qu'elle s'imagine, mais ça me fait doucement rire. C'est vrai qu'une jeune fille, fraîchement en couple, qui s'éclipse aussi longtemps aux toilettes, juste avant un repas, ça porte à confusion. Elle sait que je ne peux pas être enceinte. Merde... Peut-être que c'est elle qui a besoin d'aide, voir Edouard avec Svetlana doit lui retourner l'estomac et moi... Je l'abandonne.

Je vérifie rapidement que les contours de ma bouche sont dépourvus de vomi et je m'empresse de sortir. L'employé émet un petit cri de surprise devant notre face à face. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle soit aussi près de la porte. J'attrape sa taille pour la serrer contre moi quand je la percute, afin de l'empêcher de tomber à la renverse.

Elle écarquille les yeux, puis se reprend très vite. Abigaël se redresse, avant de s'écarter et de s'excuser. Enfin, elle m'invite à la suivre dans la salle à manger. Je m'excuse également, puis exécute en silence. Personne ne semble surpris de me voir revenir. Mes parents, Karl et Max se lèvent inquiets. Merde.

L'avocat Du Diable II.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant