37. Last but not least.

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Sur la route, 19h38.

Alaë.

— Alaë, on a dû soudoyer le principal pour que tu puisses faire ce putain de concert, alors je te jure que si tu ne te pointes pas, simplement parce qu'Adan s'est barré, je t'enfonce mon micro dans la gorge ! s'égosille Charles à travers le haut-parleur de mon téléphone.

Je tourne dans une énième rue, presque arrivée à destination.

— Il me reste exactement... 22 minutes pour arriver, je serai là !

C'est tout bonnement impossible, je suis à l'autre bout de la ville. Mais un mensonge de plus ou un de moins...

— Y'a plutôt intérêt ! Ce concert c'est la chance de notre vie ! Y'a du beau monde ce soir, Alaë !

— Je sais, Charles...

— Charles ? s'élève la voix de Nolan, dans son dos.

Le batteur prend une grande inspiration pour ne rien laisser paraître de sa colère à son petit-ami, puis il dit :

— Je dois te laisser. Ramène-toi vite.

— Oui oui ! Oh la la, ce que tu peux être stressan...

— TU PRENDS UN...

Je ne lui laisse pas le temps de me passer un savon et je lui raccroche au nez sans le moindre scrupule.

Une fois sur le parking, je me gare à côté de la voiture bleu électrique du gardien.

Dehors, les branches craquent sous les bourrasques de vent de la soirée, tandis que les feuilles virevoltent sur mon passage. J'approche de l'énorme portail vieilli et rouillé qui me domine et je jette un œil dans la cabine de l'agent de sécurité.

Tout à coup, le faisceau d'une lampe de poche se plante dans ma rétine. Je tourne la tête et ferme les paupières pour laisser le temps à mon corps de se remettre de cette agression visuelle.

— Qui va là ? s'écrit l'employé.

— Bonsoir, je suis déjà venue hier...

Pour ne pas dire toute la semaine.

Il baisse sa lumière sur mon torse et daigne enfin m'accorder plus de bonnes manières.

— Ah oui. Vous êtes la dame qui cherche son mari. Madame Anderson, c'est ça ?

— Fiancé, le corrigé-je. C'est ça.

D'un coup de menton, il m'invite à le suivre à l'intérieur de sa cabane de fortune. J'exécute d'un pas décidé. Mes cuissardes glissent le long de mes jambes au rythme de mes pas. L'air de la nuit fait frémir mon épiderme, mais je m'engage tout de même dans le cimetière où repose Charlie.

— J'ai pris votre numéro de téléphone et je vous ai dit que je vous appellerai si je le voyais, m'indique-t-il, d'un ton rassurant, même si je peux sentir une pointe d'agacement dans sa voix.

Sa cabine est vraiment étroite. On tient à peine à deux, et tout seul, c'est à peine s'il peut se retourner. De la paperasse tâchée par des auréoles de café traîne un peu partout sur le secrétaire, l'unique meuble de la pièce, avec cette chaise vieillotte et peu solide.

— Oui mais je me suis dis que vous auriez peut-être oublié, vous avez d'autre choses auxquelles penser.

Il hoche désespérément la tête de haut en bas, simplement pour me faire plaisir et pour que je lui foute la paix une bonne fois pour toute.

— Un café ? propose-t-il en désignant une affreuse machine à filtre de la pointe de son nez.

Charles va me tuer si je ne suis pas à l'heure. L'horloge au mur indique 19h43.

L'avocat Du Diable II.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant