22. Encore ?!

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Chez Karl et Max, Miami, 14h31.


Le silence qui pèse dans la cuisine de mes parents me met tellement mal à l'aise que je n'arrive pas à avaler une seule bouchée de mes pâtes au fromage frais. J'ai énormément de choses à leur dire, à leur demander, mais aucun de mes mots ne veut sortir. Max demande le sel à son mari sans lui adresser la parole, ce dernier s'exécute dans le même mutisme.

— Vo... vous saviez pour ma mère ? finis-je par oser demander.

Karl lâche sa fourchette de surprise. Max quant à lui, s'arrête de mâcher sa portion de pâte au saumon. Il pose lentement son couvert sur le bord de son assiette, attrape sa serviette en tissu pour essuyer le coin de ses lèvres, puis se racle la gorge. Je ne comprends pas vraiment pourquoi mon cœur bat aussi vite, mais je l'ignore pour soutenir le regard de mon père blond.

— Ta mère était la sœur de mon meilleur-ami au lycée, commence Maximilien, ému.

Mon cœur s'arrête de battre, j'ai mal, j'ai si mal. J'ai détruit leurs vies. Sans le vouloir, mais mon arrivé les a quand même chamboulés.

— Un jour, j'ai invité Rick, mon meilleur-ami à la maison de mes parents. On était jeunes, on devait avoir tout juste 15 ans alors évidemment, c'est sa grande sœur qui l'a emmenée, étant donné que leurs parents travaillaient. Par politesse, j'ai invité Orphee à entrer boire un verre. Elle a accepté et a sympathisé avec Andrew pendant que Rick et moi discutions de trucs de gosse. Depuis ce jour-là, ils ne se sont plus jamais quittés. Quand il a fini le lycée, mon frère a pris un appartement dans la ville de sa fac, elle l'y a rejoint et s'est très vite installée avec lui. D'ailleurs, j'ai aussi squatté un petit moment leur chambre d'ami...

La voix de mon père se brise, il ne semble pas avoir envie de s'étaler sur ce passage. Son mari attrape ses épaules et les massent pendant que mon souffle n'a jamais été si brouillon. Je m'en veux tellement que je voudrais remonter le temps et rendre son amour de jeunesse à mon géniteur. Au moins, ils seraient heureux à trois et je n'aurais pas à vivre tout ça.

Une fois que son émotion est un peu redescendue, Max reprend :

— C'était l'amour fou, jamais l'un sans l'autre, jamais une dispute. C'était de l'amour pur et dur. Mais les Winston, la famille de ta mère, ne voyaient pas cette relation d'un très bon œil. Andrew leur prenait petit à petit leur fille. Un jour, alors qu'ils fêtaient Thanksgiving ensemble, ils ont posé un ultimatum à Orphee, soit elle revenait à la maison, soit elle pouvait leur dire adieu. Tu te doutes bien de sa réponse, glousse doucement mon ancien oncle.

Je parviens à sourire faiblement même si mon cœur, lui, ne parvient pas à se desserrer.

— Andrew a fini ses études et l'a immédiatement demandé en mariage. Je ne peux pas te donner de détail sur la cérémonie, le repas, ou encore la robe que ta mère portait, je n'étais pas invité.

Mes yeux s'écarquillent.

— Quoi ?! m'insurgé-je outrée.

Andrew et lui étaient très proches avant qu'il apprenne ce qu'il me faisait subir. Je ne comprends pas pourquoi mon géniteur ne l'a pas convié.

— J'ai fait mon coming-out en terminal. Mes parents m'ont foutu à la porte et j'ai dû vivre chez Andrew. Lui me comprenait, il s'en foutait pas mal. Mais mes parents ont dit que si j'étais présent, ils ne viendraient pas au mariage alors évidemment...

Fils de pute...

Mes poings se serrent naturellement. Karl semble peiné, je le comprends. À part avec Edna, ça n'a jamais dû être si compliqué d'être le gay de sa famille. Il est le chouchou, le petit dernier des Anderson, celui que l'on protège pour le simple fait qu'il respire.

L'avocat Du Diable II.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant