Chapitre 28: Les fleurs dans les vases volent

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Le lendemain, 07h05, chez Ange.


Un cataclysme a frappé la maison. Depuis hier matin, j'ai envie de vider les bouteilles pour noyer mon estomac dans un acide. Ce sera toujours moins pire que les crampes que je ressens au creux du ventre. Pitié, j'ai envie de mourir...


Cette maison va me rendre folle. Encore plus à cause de mon jardin. Je ne peux plus le voir, à quoi bon ? Il ne sert plus à rien. Rien ne sert de continuer. C'est trop dur. J'ai deux genoux à terre. Je ne pourrais pas connaître le printemps dans tous les cas...


Je sors dans la rue, le vent est puissant et soulève mes cheveux roux. Je m'en fiche. Le froid ne me fait plus rien. Parce que mon cœur est déjà consumé par les cristaux qui s'y sont logés. Je tombe à terre. Je vais me donner la mort. Comme ça, je le rejoindrais. Je le rejoindrais au Paradis des nuages et des champs de fleurs...


Un bout de verre dans la main, je tremble de toutes mes forces. Même me donner la mort, je n'y arrive pas. Est-ce la peur ? Ou l'espoir de le revoir un jour ? Non, je ne reverrais plus de coquelicots. Je le sais. Ce n'est plus la saison. Alors pourquoi je n'arrive pas à me planter dans le poignet ? Ce même poignet sur lequel je me parfume jour et nuit, juste pour lui ?


« -Ange. Cela ne te ressemble pas ma grande. Toi qui est si forte. Toi qui est si courageuse. Relève toi... »


Maintenant, j'entend des voix. Génial. J'ai tous les défauts du monde. Si la folie s'empare de moi, il est temps de m'en débarrasser. Je rapproche le verre de ma veine. J'en ai marre des fantômes...


« -Ange. Je t'interdis de faire ça. Pose ça par terre. Je suis là ! Relève toi ! »


Ce n'est pas Julien, je le sais. Donc non. Je n'ai pas à obéir ni à me plier aux règles de mon cœur. Plus cette fois. Donc, je reste agenouillée, dans un état pitoyable. Je veux le rejoindre au ciel, au milieu des feux d'artifices en bouquet...


«-Ange. Ecoute moi ! Ecoute moi mon enfant ! Tu ne dois pas céder, jamais ! Tu penses que Julien serait fière de ce que tu fais là, maintenant ? »


Les larmes perlent. Je finis par redresser les yeux. Un homme d'un certain âge se tient devant moi, tout proche. Il a un chapeau sur la tête et quelques valises auprès de lui. Son visage semble figé... En même temps, voir une jonquille aussi laide, je comprends, c'est effrayant...


« -C'est moi André. J'ai appris que tout le monde est mobilisé, que Julien était donc parti. Et j'ai reçu ta lettre aussi... J'accepte donc ton invitation, ça ne te dérange pas...


-André. Vous êtes une âme charitable. Mais pitié, je veux en finir avec cette douleur. J'ai mal...


-On va en parler dans la maison. Il fait froid. Tu vas attraper froid et être malade... »


Je n'ai plus de forces. Je me laisse faire. André me porte dans ses bras, comme si j'étais une enfant. Il me ramène à l'intérieur, sur le canapé. Le petit homme pose ses bagages et enlève enfin son chapeau.

Le jardin de mon coeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant