Nous arrivons devant la maison. Visiblement, il ne semble y avoir personne. Au moins, nous aurons un abri pour cette nuit. J'ouvre la porte et laisse rentrer tout le monde. Julien est le dernier à rentrer et s'assure que la porte soit bien fermée derrière lui, il va falloir qu'on soit encore plus vigilants que d'habitude.
« -Merci de nous accueillir en tout cas... déclare James.
-De rien Messieurs, c'est bien normal. Vous nous avez grandement aidé et sauvé. Mais pardonnez la maigreur de ce foyer... dis-je, confuse.
-Cela nous convient parfaitement, ne vous en faites pas... »
C'est vrai que déjà à deux, nous avons dû mal à vivre dans cette petite demeure. Alors avec trois hommes en plus. Mais, tant pis, nous ferons avec. Nous ne sommes plus à ça près. La chaleur humaine et la solidarité prennent le dessus et c'est tout à fait normal. Après tout, c'est un peu comme si je connaissais ces trois aviateurs depuis des années...
« -Faites comme chez vous. Malheureusement, je n'ai pas d'autres chambres ou de matelas. Je ne peux vous offrir que quelques couvertures et le canapé.
-Ce sera largement suffisant Ange... »
James ose me sourire un peu tandis qu'il va s'installer avec ces hommes au salon, dans le canapé. Je reprends mes habitudes et pars en cuisine, il faut que je prépare un repas pour nous réchauffer. Julien pose sa main sur son épaule.
« -Ange. Vous êtes épuisée. Laissez-moi faire...
-Dois-je vous rappeler que c'est vous qui avait pris une balle ? Pas moi. Je vais très bien.
-Dans ce cas, couvrez-vous au moins. Vous allez mourir de froid. Je m'occupe de ces Messieurs... »
Je finis par me raisonner, il n'a pas tort, puis m'afficher à moitié nue, ce n'est pas ce que je souhaite. Enfin, je ne faisais même plus attention dans cette aventure folle. Je me monte à l'étage et fouille dans mon armoire afin de trouver une tenue décente, capable aussi de me tenir bien chaud. J'aurais bien pris une bonne douche. Mais laisser ces hommes en bas qui nous ont tant épaulés, ce serait fort déconvenue.
Mon regard se porte sur le jardin. Recouvert de neige à présent. On ne voit plus rien. Mes fleurs et mes légumes se retrouvent ensevelis sous cette épaisse couche blanche. Quel malheur. On veut aussi tuer mon jardin. Misère...
J'enfile rapidement une robe et m'attarde à brosser mes cheveux, tout abimés par la neige et le grand froid. Je me couvre les épaules d'un chandail avant de redescendre. Pour autant, je ne me sens pas mieux. Parce que nous avons encore une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes. Je retrouve Julien, dans la cuisine, en train de surveiller la soupe au feu.
« -Maintenant, vous vous mettez à la cuisine ?
-Ne commencez pas les reproches Ange. Nous n'avons pas besoin de nous disputer au vue des conditions délicates.
-Je sais bien. Je ne disais pas ça pour vous provoquer. Juste pour vous dire que je prends le relais. Allez-vous reposer... »
Je lui prends la cuiller des mains et le force presque à aller s'asseoir, chose qu'il finit par faire, enfin, juste avant, il prend l'initiative de mettre une cheminée. Histoire de bien réchauffer la maison qui semble tétanisée par ce froid soudain.
« -Le dîner sera prêt dans quelques minutes Messieurs...
-Merci Ange. Au fait, vous avez une cabine téléphonique ici ? Je suppose que vous n'avez pas de téléphone...
-Dans mes souvenirs, il y en a une à la mairie du village si je ne me trompe pas. »
En parlant de la mairie, qu'en est-il du sort d'Antoine ? Est-ce que... ? Non, je ne peux imaginer cette possibilité. Même si elle reste plausible. Julien se sert un verre de whisky et en propose aux aviateurs qui refusent tous.
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Le jardin de mon coeur
Narrativa Storica"Je m'appelle Ange. En 1944, mon jardin était tout pour moi. Jeune femme de la campagne, je n'avais conscience ni du danger ni du coup de foudre. Qu'est ce qui est le pire dans cette histoire ?" Mais bon, ce ne sont que des bouquets de fleurs, non? ...