Nous contre le monde T1. Enchanteria

15. Quatre cadeaux et un désaccord

21 décembre 2076

Ophelia était rentrée chez elle la veille au soir après avoir passé trois heures dans l'Enchanteria Airlines accompagnée de ses amis. Aujourd'hui, son père l'emmenait déjeuner dans un nouveau restaurant qui avait ouvert à côté de son atelier quelques semaines auparavant.

— Je suis sûr que cette cuisine va te plaire. Tu sais, ta mère aimait beaucoup la nourriture japonaise.

— Oh... J'espère que ça me plaira alors.

La jeune brune sourit et entra dans l'établissement où une femme d'un âge mûr vint à leur rencontre. Ses cheveux étaient relevés en un chignon parfait où l'on pouvait distinguer un papillon en or qui rappelait les motifs de sa tenue traditionnelle.

— Bonjour, tu dois être Ophelia, la fille de Kal. Il m'a beaucoup parlé de toi, tu sais, déclara-t-elle avec un grand sourire.

— Enchanté madame, répondit la jeune O'Donnell intimidée par l'allure de cette femme.

Elle les conduisit vers une table au fond du restaurant et les laissa prendre connaissance des menus avant de revenir quelques minutes plus tard. Ophelia allait rarement au restaurant. Chez les fées, ils étaient rares et les seuls endroits que l'on pouvait réellement qualifier de tels étaient souvent très chers et très prisés par les autres familles d'Ailes-D'or.

Cela peinait la jeune fille de le dire, mais elle faisait partie d'une classe sociale supérieure et même si son père devait travailler pour rendre service à la communauté féérique – c'est ainsi que la présidente des fées avait résumé le travail de Kal O'Donnell lorsqu'elle lui avait remis sa médaille de "contribution au bon déroulement de la vie féérique". Il n'y a encore pas si longtemps, l'Etat donnait une petite somme aux familles d'Ailes-D'or pour leur maintien d'un sang "propre" dans la communauté. Ophelia l'avait appris dans son livre d'histoire et cela l'avait répugné sur le moment.

— Tu as choisi ce que tu voulais prendre ?

— Je ne connais pas vraiment ce type de plats. Que prenait maman lorsqu'elle venait dans un restaurant comme celui-là ? demanda Ophelia avec un sourire.

— Ta mère aimait beaucoup les ramens. Ce sont des soupes de nouilles avec de la viande ou du poisson.

— Je vais prendre ça alors, sourit-elle.

Son père lui rendit son sourire. La jeune fille se souvenait des histoires qu'il lui racontait lorsqu'elle était petite et qu'elle peinait à s'endormir après avoir fait un cauchemar. Ses parents avaient beaucoup voyagé avant que son père ne reprenne la boutique familiale. Le voyage qui les avait le plus marqué était celui au Japon où ils avaient découvert une culture totalement différente de celle qu'ils pouvaient trouver au Canada ou en Europe.

— Si tu pouvais refaire un voyage que tu avais fait avec maman, ça serait lequel ?

— Tu veux dire avec toi ?

— Oui, enfin pas forcément.

Kal réfléchit quelques instants avant de répondre.

— Si je devais repartir en voyage, je pense que je t'emmènerai d'abord voir le Canada des hommes.

Ophelia hocha la tête tout en se demandant comment était ce monde. Était-il aussi beau que son père le disait ou aussi dangereux que le sous-entendais Setebos ?

— Il est vraiment si différent du nôtre ?

— Il n'a rien à voir avec celui des fées, mais cette différence le rend magnifique. Chaque jour te permet de découvrir une nouvelle chose que tu n'aurais pas imaginée, déclara-t-il en rêvant, les yeux perdus dans le vide.