Entourée par ses conseillers, la reine Eira était assise sur son trône d'argent, au bout d'une longue table de bois verni. Un immense lustre de cristal rayonnait au plafond, illuminant la pièce. Une bannière violette avec un Lupin noir au centre figurait dans son dos.
La jeune femme se tourna vers Ezer, son haut conseiller. L'homme, qui aurait pu avoir la quarantaine s'il était humain, portait un manteau vert sapin et une chemise à jabot. Il arborait un air hautain sur le visage.
‒ Alors, Lord Ezer, quelles sont les nouvelles inquiétantes qui ont mené à cette réunion ?
‒ Eh bien, Votre Majesté, commença le conseiller, vous n'êtes pas sans savoir que la Moisson s'est déroulée la semaine dernière.
‒ En effet.
‒ Hier, dans la soirée, reprit l'homme, nous avons reçu un courrier nous informant que l'unité de Messire Ubel a été décimée par un groupe de brigands mené par un certain Aspen. Les quelques survivants qui ont réussi à en réchapper sont déjà en route vers le Palais.
Un mouvement se fit dans la grande salle et les hauts dignitaires se mirent à chuchoter.
‒ Silence ! s'exclama la reine, reportant l'attention du conseil sur elle. Comment est-ce possible qu'une troupe d'élite comme celle de Messire Ubel ait pu être massacrée ainsi ?
‒ Nous n'en savons pas plus pour l'instant, déclara le haut conseiller. Mais une chose est sûre, il nous faut agir. Sinon, la population de Bylur risque de refuser de payer les impôts, ou pire, de se rebeller contre notre peuple.
‒ Ne pouvons-nous pas négocier avec eux ? Exiger un compromis ? proposa Eira en jetant un regard sur l'assemblée.
‒ Voyons Votre Majesté, vous n'y pensez pas ! s'écria Lord Lekan, le ministre des finances. Cela serait une preuve de notre faiblesse. Non, ce que nous devons faire, c'est une démonstration de force.
Eira se retint de soupirer et se redressa dans son siège. Le dossier, bien que recouvert de velours, lui paraissait aussi dur qu'un mur de pierre.
Elle trouvait que ce conseil partait dans la mauvaise direction. Elle aurait aimé baisser drastiquement les redevances que leur devaient les bylariens et supprimer cette sentence de mort qui pesait sur leurs têtes. Mais elle deviendrait alors une reine impopulaire auprès des Fey. Elle était déjà sous-estimée par ses conseillers et ministres à cause de son jeune âge et peu apprécié par la cour de par sa personnalité réservée, alors il n'était pas temps de passer des réformes de ce genre.
‒ Est-ce que cet Aspen a de la famille ? s'enquit-elle. Nous pourrions emprisonner ses parents pour qu'il cesse ses affronts.
‒ Je crois bien que ce jeune homme est sorti de nulle part, nous n'avons trouvé aucune trace de lui dans les registres, lui répondit Ezer. Par contre, nous avons découvert que ses hommes viennent d'un petit village portuaire nommé Moonport.
‒ Bien.
Eira se leva.
‒ Je vais ordonner aux gardes qu'ils arrêtent les auteurs de cette révolte.
Son haut conseiller la retint. La jeune femme se raidit. Elle n'aimait pas être touchée.
‒ Non, Votre Majesté. Avec tout le respect que je vous dois, nous devons être plus fermes. Ce n'est que le début de votre règne, il est temps d'asseoir votre pouvoir comme votre regrettée mère l'a fait avant vous.
La reine fronça les sourcils. Qui présidait ce conseil ? Elle-même ou Lord Ezer ? Ce dernier la défia du regard.
‒ Faites comme bon vous semble, conclut-elle. La réunion est ajournée.
Elle sortit de la salle sans se retourner et courut s'enfermer dans ses appartements, les larmes aux yeux. Elle se jeta sur son lit, froissant les draps.
Lady Dolion, sa dame de compagnie, s'approcha doucement d'elle.
‒ Comment s'est passé le conseil ? lui demanda-t-elle.
‒ Mal. Très mal.
Eira se redressa et rencontra le regard de sa suivante. Dolion avait de longs cheveux bruns et un visage ovale comme le sien. En effet, ses soubrettes étaient spécialement choisies par la Matriarche parmi les courtisanes pour leur ressemblance avec la reine. Ainsi, elles pouvaient leur servir de doublure ou de leurre en cas d'attaque. C'était un très grand honneur pour ces femmes que d'être désignées dame de compagnie.
‒ A cause de moi, tout un village va probablement être décimé, expliqua la reine. Et le pire, c'est que je ne peux rien faire. Je suis coincée. Si je m'oppose à ça, mes conseillers feront probablement un coup d'état et me jetteront en prison pour trahison.
VOUS LISEZ
Frozen Tears
FantasyLaissez-vous emporter par une réécriture de la reine des neiges dans la cour des Fey ! Dans le royaume gelé de Bylur, où la magie est interdite, les Fey règnent en maître. Froids et cruels, ils constituent la haute classe et dominent les humains. E...