Colonel

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(_15H)

Cette avancée interminable trouva enfin une arrivée sur un endroit drôlement animé pour une forêt "sans habitation pour l'homme". Quelques constructions en béton, de grandes tentes avec des labos improvisés dessous, des arbres coupés à ras pour faire de la place, de gros engins semblables à des 4x4 mais en plus grands et visiblement plus performants d'après Félix. Il y avait même des airs de tirs, de combats ou d'entraînements. On se croirait presque à l'armée ou dans un film d'action.

Il y avait pas mal de monde... trop de monde pour un endroit reculé dans l'une des forêts les plus inaccessibles de la planète. Des personnes armées, des gardes à chaque tente, des personnes baraquées et prêtes à tuer. Les jeunes adultes eurent du mal à saisir cette vision, surtout avec la même question qui taraudait leurs esprits : que font ces gens ici ?

Quelques hommes du groupe armé conduirent la troupe sous l'une des tentes fermées. Ils n'étaient pas attachés, mais devaient garder les mains derrière la tête et les genoux au sol, rien de bien compliqué si l'on veut éviter de se faire descendre.

- Nous les avons trouvé à 15km d'ici, côté sud, commence l'une des voix loin d'être sympathique.

Suite à ces informations, une personne cachée dans l'ombre se leva et fit le tour du bureau pour se rapprocher de la troupe agenouillée.

- Sont-ils avec elle ? demande une voix tout à fait féminine mais ferme.

- Oui. Ils étaient forcément au même endroit.

- Parfait.

Mathéo n'avait pas besoin d'un dessin, ces personnes étaient liées à la disparition de Siona. Il leva les yeux vers la nouvelle arrivante, une femme froide plongeant entre la quarantaine et la cinquantaine, grande, musclée, de courts cheveux grisés, une posture raide et robuste comme un soldat. On pouvait clairement comprendre qu'elle n'était pas ravie de voir le groupe, surtout avec cet air d'assassin dans le regard.

- Que faites-vous dans ces bois ? demande-t-elle fermement.

Mathéo déglutit, ce n'était pas le moment de paniquer, il devait garder son calme.

- On cherche notre amie, elle n'était pas dans sa tente ce matin, réussit-il à articuler.

- Vous n'avez rien à faire ici, allez-vous-en.

- On ne partira pas sans elle. Que lui avez-vous fait ? s'impatiente Taisuke l'air grave.

- Je ne vois pas de quoi vous parler jeunes gens.

- Ne jouez pas à ça avec nous, où est Siona !? s'énerve-t-il.

Le jeune homme s'était remis debout sans même s'en rendre compte. L'un des gardes armé l'attrapa par les cheveux et asséna un coup monstrueux dans ses côtes. Il serra les dents avant de sentir un goût métallique au fond de sa gorge, merveilleux.

- Taisuke ! s'affole son frère en venant le maintenir.

Le coup était conséquent, c'est à peine s'il pouvait se redresser, même s'il y parvient malgré tout.

- On ne cherche pas d'ennuis, on veut juste retrouver notre amie ! interrompt Mathéo tourné vers la vieille femme.

- J'aurais aimé que ce soit vrai.

Le roux se figea, qu'est-ce que ça voulait dire ?

- Il se trouve que votre "amie" a essayé de voler un échantillon de nos laboratoires la nuit dernière. Nous n'avons fait que la suivre jusqu'à votre camp et la récupérer pour la faire taire.

"la faire taire", cette simple phrase suffit à plonger le groupe dans l'angoisse.

- Non il doit y avoir une erreur ! Elle- elle ne ferait pas ça, c'est absurde. On ne sait même pas qui vous êtes ! s'impatiente le roux incapable de comprendre l'acte qu'aurait pu faire son amie.

- Colonnel Amara FLEMMINGS et commandante de l'escadron 12 de l'armée.

- [ Ouais bon, elle est balèze quoi. ] comprend Zyra suspicieuse.

- Et je dois présumer que vous êtes en "vacances" ? fit la commandante.

- Nous sommes ici avec l'autorisation de notre université, c'est un travail de groupe qui vise à explorer un nouvel écosystème au sein de cette forêt, déclare Félix.

- Au milieu d'une forêt qui n'est pas recommandée à la population ? Quelle sorte de professeur enverrait ses élèves se faire tuer par des animaux sauvages ? souligne la vieille femme.

Mathéo eut un temps de pause après les paroles du colonel. Elle avait raison, pourquoi les professeurs leur aurait donné l'autorisation d'aller dans une forêt très peu visitée, avec des animaux sauvages au mètre carré. Ça n'avait pas de sens. Siona aurait menti ?

Bon, pas étonnant vu ce qu'elle a raconté sur sa venue, mais dans ce cas, ça voudrait dire qu'ils n'auront aucun moyen de se justifier s'ils sortent d'ici vivant. Mathéo savait comment était Siona, si elle ne voulait pas mettre ses camarades en danger elle serait venue toute seule dans cette forêt. En d'autres termes, ça veut dire qu'elle n'avait pas prévu de rencontrer cet endroit très peu attractif.

- [ Soit Siona a menti, soit c'est cette vieille peau qui ment. ] constate Mathéo après réflexion.

- À votre place, je partirai d'ici sans plus tarder, fit la vieille femme.

Vu son sourire narquois le groupe eut du mal à la croire. S'ils partent ils vont se faire descendre, à coup sûr, pas besoin d'être un génie pour le comprendre.

- Et si on faisait un marché ? fit Zyra en se levant doucement.

- Je ne crois pas que vous soyez en mesure de négocier très chère, ricane doucement la commandante.

- Et si je vous prouvais le contraire ?

De sa pochette, elle sortit son téléphone. La commande resta sans voix face à la petite femme. Qu'essayait-elle de faire ? Ce n'est qu'en voyant le petit néon rouge sur le haut de l'appareil qu'elle comprit.

- Vous devriez éviter de nous blesser vous savez, avertit Zyra d'un petit sourire. J'ai enregistré notre conversation, y compris le manque de tact envers mon camarade au sol, commandante.

Les traits de la vieille femme s'étirèrent sous sa colère sourde.

- Moi je vous conseillerai de nous relâcher et de nous rendre notre amie. On partira et on oubliera tout ça, propose-t-elle.

- Et tu penses réellement m'avoir avec ça ? ricane faussement la commandante.

- À vous de voir. Relâchez nous et on n'en parle plus... ouuu vous essayez de nous faire taire et je n'ai qu'à appuyé sur un petit bouton pour envoyer cette conversation passionnante aux autorités.

- Aux dernières nouvelles, aucun réseau ne traverse cette forêt, donc aucune communication ne peut être faite, sourit fièrement la vieille dame.

Zyra lâcha un petit rire. Décidément, il fallait sortir le grand jeu.

- Pour des gens de l'armée vous êtes bien mal renseignée, Colonel, commence-t-elle joueuse. Vous ne me reconnaissez pas je présume ? Laissez moi vous rafraîchir la mémoire, "Zanashi_error", ça vous dit quelque chose ?

La commandante contracta sa mâchoire, elle la reconnaissait.

- Eh oui, le système piraté de l'année dernière a dû vous coûter pas mal je me trompe ? Ne sous-estimez pas ma capacité à établir un canal de communication, menace-t-elle.

EnotiaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant