chapitre vingt-six

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— MANCHESTER
1990

DES MOIS étaient passés depuis que l'article était apparu. Il avait disparu peu après.

  Agatha avait continué à réviser son concours. Elle le passait aujourd'hui. Dans son appartement, le stress était à son apogée. Kingsley était presque aussi stressé qu'elle. Il n'avait pas réussi à poser sa soirée à la brasserie pour pouvoir décompresser avec sa copine.

  — T'es prête ? T'as rien oublié ? demanda le métis pendant que sa petite-amie marchait vers la porte d'entrée, son sac à main sur l'épaule.

  — J'ai vérifié il y a trente secondes, ne recommence pas à me faire stresser.

  Elle ouvrit la porte avant de se tourner vers Kingsley.

  — Tu vas tout déchirer, j'en suis sûr. A cent pour cent.

  — J'espère.

  — Je serai garé sur le parking de l'université. Tu me verras en sortant.

  — T'es le meilleur.

  Elle se mit sur la pointe des pieds, l'embrassa, puis respira un bon coup.

  — Allez, dans cinq heures c'est fini, déclara-t-elle en regardant sa montre.

  — Tu feras parti des deux cents cinquante admis, Agatha.

  Son cœur battait tellement fort qu'elle pouvait l'entendre dans ses oreilles. Ses mains étaient moites. Si elle ratait, elle ne sait pas ce qu'elle ferait de son avenir. Toutes les cartes étaient entre ses mains et c'était à elle de jouer pour arriver à ses fins. Après avoir autant révisé, il fallait qu'elle finisse sur les listes d'admission.

  Son supporter numéro un ferma la porte derrière elle une fois qu'elle fut partie. Il croisait les doigts pour qu'elle réussisse.

...

  William feuilletait les papiers de la Navy, les yeux brillants. Il se retenait presque de verser des larmes dessus. Son dossier d'inscription était là, sous ses yeux, posé sur le bureau de sa chambre. Ses parents n'avaient aucune idée que ce dossier traînait sous leur toit. Seule Courtney et Lydia le savait. Et un ami à lui aussi.

  A l'insu de sa mère, il voyait toujours Agatha. Il allait la voir à la brasserie, agaçant régulièrement Kingsley. Mais Kingsley n'était qu'un petit détail aux yeux de William. Il aimait toujours la brune, et il ne ressentait rien pour Courtney. Leur fausse relation était toujours d'actualité, et ils faisaient souvent des apparitions publiques qui affolaient les paparazzis. « Le couple du mois : Courtney Moretti et William Hamilton », « Le duo inséparable », « Une histoire qui semble rouler entre les deux célébrités »... Et il y en avait tant d'autres. Les journalistes avaient de l'imagination quand il s'agissait de trouver des titres accrocheurs.

  Il s'arrêta sur le formulaire à remplir, stipulant que ses représentants légaux devaient être d'accord, s'il n'était pas encore majeur. Et il l'était. Il n'avait pas besoin de leurs signatures pour envoyer le dossier. Dans sa vie si désordonnée et négative, il y avait au moins une chose de positive : il était majeur. Ses représentants légaux devaient juste être d'accord, mais aucune preuve n'étaient demandées.

  Il se dirigea vers le téléphone, posé sur sa table de nuit, et composa le numéro d'Agatha.

  Après quelques sonneries, elle décrocha.

  — Agatha ?

  — Non, c'est Kingsley, répondit-il froidement.

  — Est-elle là ?

  — Si vous étiez plus renseigné à son sujet, vous sauriez qu'elle passe son concours d'entrée à l'université.

  Trop obnubilé par ses affaires, il avait oublié le concours d'Agatha. Quel mauvais ami faisait-il. Il se rassît sur sa chaise de bureau, il s'en voulait à lui-même de ne penser qu'à lui.

  — Pourquoi vous vouliez l'avoir au téléphone ?

  — Je rappellerai tout à l'heure.

  — C'est si secret ? Vous savez que dans tous les cas elle me le dira. Pas la peine de jouer au timide avec moi. Le fait que votre famille soit la seconde plus influente du Royaume-Uni ne m'impressionne pas.

  — Pourtant, cela devrait.

  Kingsley soupira derrière le combiné.

  — Vous avez déjà rencontré la reine d'Angleterre ? demanda soudainement le métis.

  — Deux fois, à vrai dire. Tout les journaux disent que je suis le frère caché du prince William à cause de notre ressemblance.

  — En plus, vous avez le même prénom. Bon, qu'est-ce que vous voulez dire à ma copine ? Je lui ferai passer le message.

  Voyant qu'il ne lâcherait pas le morceau, William dût se résigner à cracher le morceau.

  — Je vous le dit mais promettez-moi que vous ne direz rien à Agatha. J'aimerais lui dire par moi-même.

  — Je suis un gars bien, je ne lui dirai rien, répliqua Kingsley.

  « Gars bien » était un mot un peu exagéré d'après William étant donné qu'il sortait avec la fille dont il était amoureux. Mais il ne le connaissait pas assez pour en déduire ça.

  — J'ai reçu mes papiers de la Royal Navy.

  — Vous voulez intégrer la Royal Navy ? Pourquoi personne ne le sait ?

  Le blond sourît derrière le combiné. Savoir qu'Agatha n'avait rien dit à son copain lui réchauffait le cœur. Il pouvait lui faire confiance pour garder des secrets et ça, c'était la chose la plus réconfortante. Depuis petit, il n'avait jamais réussi à discerner les vrais amis des faux amis et peut-être que pour une fois, il avait trouvé une vraie amie.

  — C'est une longue histoire. Peut-être que je vous la raconterai un jour. Mais seulement si vous ne le racontez à personne après.

  — Je note ça dans un coin de ma tête, William. Vous avez intérêt à être un homme de parole.

  — Je vous promets que j'en suis un. Est-ce que vous pourriez dire à Agatha de me rappeler quand elle rentrera de son examen ?

  — Oui, je le ferai.

  — Merci, Kingsley. C'est sympa de votre part.

  Le métis sourit derrière son combiné. Cette conversation lui avait permis de moins détester William. Il représentait toujours une sorte de rival pour lui, certes, mais le supporter était davantage dans ses compétences.

Publié le 06/09/23

𝐀𝐆𝐀𝐓𝐇𝐀'𝐒 𝐋𝐎𝐕𝐄𝐒Où les histoires vivent. Découvrez maintenant