chapitre six

765 34 1
                                    

— MANCHESTER
1990

SUR SON chemin vers la brasserie, Agatha croisa Courtney. Elle marchait seule dans les rues bondées de Manchester. Elle semblait pressée.

  Agatha se demandait si lui sourire serait une action pertinente. Peut-être que ça ferait d'elle une personne hypocrite. Ce n'était pas le but.

  Finalement, la bijoutière tourna dans une rue, jugeant qu'elle n'était pas prête à croiser Courtney. Elle n'avait jamais emprunté ce chemin. C'était sûrement un signe du destin qui lui montrait qu'il fallait qu'elle change de chemin pour aller à la brasserie.

  Elle marcha dans la rue étroite, zigzaguant entre les poubelles. Au moins, elle savait qu'elle ne reprendrait plus ce chemin. L'odeur des déchets étaient nauséabonde et ce n'était pas le top avant de commencer le travail.

A vrai dire, il commençait à faire presque nuit, et la rue n'était pas beaucoup éclairée. Elle accéléra le pas. Elle avait regardé un film d'horreur avec Clark la veille et elle regrettait déjà. Elle avait peur de croiser un loup-garou.

Elle quitta enfin la rue avec soulagement. Finalement, elle aurait dû croiser Courtney, elle aurait eu moins de mal à retrouver son chemin.

Elle jeta un regard en direction de sa montre. Elle avait une minute de retard. Elle se sentait déjà très mal. Une minute de retard pouvait tout changer, d'après son chef.

Elle poussa la porte de la brasserie. Kingsley l'attendait au tournant.

— Que nous vaut se retard ? demanda-t-il à peine qu'elle eut posé ses pieds dans le bâtiment.

— Occupe-toi de tes salades, répondit-elle avec un sourire narquois.

  — Qu'est-ce que tu caches sous ce sourire ?

  Elle joua avec ses sourcils en sa direction avant de poser sa veste sur le porte-manteau.

  — Tu te souviens du riche et de sa copine ?

  — Bien-sûr. Agatha la cousine française.

  Elle hocha la tête en pouffant de rire.

  — C'est fou en y repensant.

  — Je ne te le fais pas dire, rétorqua-t-il. Et donc ?

  — J'ai vu sa copine arriver au loin alors j'ai pris un autre chemin. C'est pour ça.

  — Je sais pas dans quoi tu t'es engagée mais...

— T'as trop de stéréotypes sur les riches, Kings'. Tu devrais essayer de les connaître.

— Pas intéressé.

...

William s'assît sur le grand canapé de la maison de ses parents, où il habitait aussi. Courtney le rejoignit, emmitouflée dans un poncho noire.

  — Faut que je te dises un truc, commença-t-il.

  Il s'était rendu à l'évidence. Agatha avait raison, il ne pouvait pas passer sa vie à mentir à sa copine.

  — Luisa n'est pas ma cousine française.

  Courtney le regardait d'un œil attentif. Les oreilles grandes ouvertes, elle encaissait la vérité. La véritable identité de la jeune femme. Et les mensonges du garçon à qui elle faisait le plus confiance.

— Elle n'est même pas française, continua-t-il.

La blonde le regardait, un noeud dans l'estomac et une boule dans la gorge. Elle ne se sentait pas à la hauteur. Elle avait l'impression qu'on lui avait planté un couteau dans le dos. Elle avait l'impression de sortir avec un inconnu.

— Comment tu l'as rencontré ? demanda finalement Courtney, d'une voix faible.

— C'est la bijoutière qui m'a aidé à trouver un bijou pour ma mère. Mais y'a rien entre nous, promis. Je ne vois que toi.

Elle ne répondit pas. Elle ne savait pas s'il était sincère ou pas. Elle n'arrivait plus à lui faire confiance. Elle avait tant était déçue par les garçons dans le passé, et William était l'exception qui confirmait la règle. Elle avait cru voir en lui quelqu'un de sincère. Elle pensait même qu'ils termineraient leurs vies tous les deux, qu'ils se lançaient dans quelque chose de durable.

— Courtney, crois-moi.

— Non, reprit-elle. Qu'est-ce qui a changé quand je suis partie en Irlande ? Pourquoi trois semaines ont changé notre relation à ce point ?

Il haussa les épaules.

— Certaines questions n'ont pas de réponses.

Elle laissa une larme couler.

— Je te faisais confiance, et t'as préféré aller voir d'autres filles. C'est ton choix. Mais ce n'est pas la vie dont j'ai envie.

Elle essuya quelques larmes d'un revers de main.

— Elle s'appelle comment ? demanda la blonde.

— Agatha.

  Elle hocha la tête avant de se lever.

  — Je pense que c'est mieux qu'on arrête là. Je préfère prendre mes distances.

  — Je comprends, ne t'inquiète pas.

  — Je n'étais pas inquiète.

  Elle marcha d'un pas rapide vers la porte d'entrée avant de l'ouvrir.

Publié le 27/06/23

𝐀𝐆𝐀𝐓𝐇𝐀'𝐒 𝐋𝐎𝐕𝐄𝐒Où les histoires vivent. Découvrez maintenant