Allumette

Chapitre 25

Le cœur de Delph s'accélère. Que faire ? Où aller ? À qui demander de l'aide ? Son dernier espoir s'est envolé et elle se sent maintenant perdue. Pourquoi Arthur l'abandonne-t-il maintenant, après avoir tant insisté pour l'aider ? Se pourrait-il qu'il ait appris pour... Pour son passé ? Et qu'il ait alors pris peur, comme tant d'autres et qui l'ai donc abandonnée lui aussi ? Cela ne serait pas la première fois pour Delph, mais cette fois-ci cela tombe à un terrible moment. Elle avait besoin d'aide mais on la lâche dans le vide.

Delph ne répond même pas au message d'Arthur, elle pourrait demander pourquoi il refuse de l'aider mais elle n'a pas envie d'entendre encore une fois les mêmes excuses qui sonnent faux, qui ne sont que là pour cacher la vérité.

— Ça va bébé ? Ne t'inquiète pas, on va la retrouver.

Delph ne parvient qu'à hocher la tête pour indiquer à Léandre qu'elle l'a bien entendu, mais ne parvient plus à parler. Elle doit en effet mettre toutes ses forces pour s'empêcher de pleurer, elle ne doit pas craquer maintenant, ce n'est pas le moment.

— On pourrait aller dans son association, tu en penses quoi ? Lou a plein d'amis là-bas, peut-être qu'ils ont des informations que l'on ignore.

Pourquoi n'y a-t-elle pas pensé plus tôt ? Delph s'en veut d'avoir un esprit si confus et qui l'empêche de penser de façon efficace. Heureusement qu'elle a Léandre avec elle, il ne l'abandonnera jamais, lui, et elle le sait. C'est une telle chance d'avoir une personne en qui on peut avoir confiance et sur qui on peut toujours compter. Peu importent les circonstances, peu importe votre passé, peu importe qui vous êtes, vous savez qu'il vous aimera plus que tout et sera avec vous.

Pas grave si Arthur se dégonfle, tant qu'elle aura Léandre à ses côtés, Delph sait qu'elle pourra y arriver et qu'ils retrouveront Lou. Elle n'aurait pas dû se concentrer sur Arthur, elle n'a pas besoin de lui au final car elle a déjà un compagnon qui est bien supérieur à ce policier qui manque de courage.

— Oui tu as raison, allons-y. Et merci.

— Pour quoi ? C'est normal que je cherche Lou, tu n'as pas à me remercier.

Léandre accompagne ses paroles d'un doux sourire réconfortant qui calme alors les larmes qui menaçaient Delph il y a à peine quelques secondes encore. Cela lui permet donc de se calmer et de réfléchir sereinement.

Delph essaye de se souvenir de tout ce que lui a dit Lou sur ses amis de l'association pour les droits des personnes transgenres. Elle se souvient surtout d'Hermine, la présidente. Elles se sont déjà rencontrées et Delph a le souvenir d'une femme douce, intelligente et gentille, il est donc évident qu'elle fera tout pour les aider. De plus, elle connaît tous les membres de l'association, elle pourra donc les guider vers les personnes qui seraient susceptibles d'avoir des informations sur Lou.

Lorsque Léandre et Delph arrivent à l'association, les locaux semblent vides. Cela est assez curieux car d'habitude ce lieu est animé et toujours joyeux. Ce calme est glaçant et angoissant, mais Delph garde son sang-froid et se dirige avec Léandre vers la petite porte portant l'inscription « Hermine Agni-Trix : présidente » en priant intérieurement pour qu'elle soit présente.

La porte est entre-ouverte et c'est avec soulagement que Delph voit la petite femme derrière son immense bureau qui passe la main dans ses longs cheveux gris, soucieuse. Léandre toque doucement contre la porte et le visage d'Hermine s'illumine alors petit à petit.

— Oh Delph, cela fait longtemps. Entrez, entrez donc avec votre ami.

Le sourire d'Hermine est faible mais elle s'efforce de le rendre présent tout de même pour se montrer chaleureuse envers ses visiteurs impromptus. Elle semble avoir, elle aussi, des problèmes, Delph est donc désolée à l'avance de venir en rajouter à ses peines. Mais elle sait que s'entretenir avec Hermine sera utile, elle ne peut donc pas passer à côté de sa précieuse aide. Lou passe avant tout.

— Bonsoir Hermine, je suis désolée de vous déranger.

— Oh mais ne pensez pas cela, vous ne me dérangerez jamais. Vous êtes ici chez vous, venez dès que vous en ressentirez le besoin.

C'est pour cela que Lou aime tant venir ici, enfin un endroit où l'on se sent à sa place peu importe qui nous sommes. Delph se sent donc plus à l'aise pour lui demander des renseignements.

— Nous sommes venus vous voir car nous n'avons plus de nouvelles de Lou depuis cet après-midi et...

— Oh non, pas encore.

Hermine vient poser son visage dans ses mains et souffle tout son désespoir. Comment ça « encore ». Cela n'a rien pour rassurer Léandre et Delph, est-ce que cela signifie que d'autres personnes sont dans le même cas que Lou ?

— Pourquoi dites-vous ça Hermine ?

— Car nous sommes sans nouvelles de deux de nos bénévoles également, Mélissa et Déborah.

À l'évocation de leur prénom, Delph se souvient d'elles. Elles sont inséparables, comme deux cygnes. Elles sont pleines d'énergie et ensemble elles pourraient révolutionner le monde. Delph connaît la réponse mais elle doit tout de même demander à Hermine, pour être sûre.

— Ne pensez-vous pas qu'elles aient pu partir volontairement ?

— Impossible. Elles avaient organisé et programmé un événement avec les jeunes du quartier.

Il devait avoir lieu hier mais personne n'est venu, cela ne leur ressemble pas.

— Et depuis quand ont-elles disparu ?

— Depuis dix jours. Je peux être précises car chaque jour qui passe sans elles est une angoisse en plus. Et depuis quand n'avez-vous plus de nouvelles de Lou ? Nous la voyions moins que Mélissa et Déborah il est donc plus difficile pour moi de vous donner une date. Mais elle était toujours présente quand nous avons appris la disparition de nos deux amies.

Delph tente d'assimiler cette information mais son cerveau est trop confus. Cela fait beaucoup de mauvaises nouvelles en une simple journée. Toutes ces disparitions ne peuvent pas être une coïncidence, elle en est persuadée.

— Delph ?

Léandre donne alors un léger coup de coude à Delph pour la sortir de ses pensées. Elle essayait tellement de se concentrer sur les dates, qu'elle en a oublié de répondre à la question d'Hermine. Elle secoue alors la tête et revient dans le monde présent.

— Elle n'a plus donné de nouvelles depuis 5 jours, soit le vingt-trois octobre.

Et à peine a-t-elle prononcé ces mots que l'esprit de Delph s'illumine. Cela pourrait-il être encore une coïncidence ?

— Pardon Hermine, vous avez dit qu'elles ont disparu depuis quand ?