La fleur du mal

Chapitre 3

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Je quitte mon travail, j'ai des courbatures dans tous mes membres. Je ne savais pas que c'était aussi physique comme travail. Je rejoins l'arrêt de bus.
Le bus ne semble pas vouloir faire son apparition, il a du retard, je m'impatiente.
J'entends un bruit vrombissant, une moto s'arrête à ma hauteur. Il ne réagit pas, puis il me montre avec sa main l'arrière de sa moto et tapote. Je suis choquée par le toupet de ce motard. Je détourne le regard et fixe la route. Il enlève le masque, c'est Exton le copain de Chad.

— Tu montes ou je me casse!
— Quoi? Pardon?
— Elle est sourde en plus d'être nonne.

Je suis envahie par la colère, je me redresse et m'approche de ce rebelle à peine majeur.

— Seigneur! Tes parents ne t'ont jamais appris la politesse?
— « Seigneur ».
Il m'imite.

Ma colère redouble, je le regarde avec mépris.

— Oui, tu sais le dieu qui peut te réduire en poussière.

Il éclate de rire, je le regarde avec curiosité.

— Allez poupée, Chad va m'en vouloir si je te laisse ici.
— C'est Bella! Et non, je ne monterai pas avec un phénomène pareil.
— Bella?
Il éclate de rire.

— Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle?
— Melle croit aux loups et aux vampires.
— Ahah très drôle. Ça vient du mot hébreu Elicheva qui signifie dieu est promesse.
— Un prénom aussi chiant que la personne.
— Oh quel toupet! Je n'en reviens pas.
Il éclate de rire.

Il descend de la moto, se poste devant moi, il est grand. J'ai l'air d'un petit poucet à ses côtés.
Il me saisit et me tire vers sa moto. Je suis en état de choc, aucun homme ne m'avait touché jusqu'à présent.

— Tu t'assois ou je vais le faire à ta place.
— Ne pose plus tes mains sur moi. Oh seigneur! Je ne pourrais pas déroger au confessionnal.
Il éclate de rire.

Il s'installe sur la moto. Je monte à contre-cœur. Je récite une prière pour sauver ce pêcheur et ses descendants du malin. La moto part en trombe, j'ai juste le temps de m'accrocher à lui. Il fixe mes mains et sourit. Une dizaine de minutes plus tard, on stationne devant chez moi. Je descends à la hâte, pour les voisins ne me voient pas. Je serai le sujet des ragots ce dimanche après la messe. Je tourne pour rejoindre la porte d'entrée.

— Un merci, c'est pour les chiens?
— Oui, oui, désolé, merci Exton.

Sa moto démarre en trombe, je rejoins à la hâte ma maison. Chad est installé devant la télé, il joue aux jeux vidéo. Il m'interpelle avant d'atteindre l'escalier.

— Exton t'a déposé?
— Oui, le bus était en retard, il s'est gentiment proposé de m'accompagner.
— Ne t'approche pas de lui!

Sa voix est différente, presque alarmante.

— Bien. Ce n'est pas mon genre de fréquentation.

Je monte à l'étage me doucher et me mettre à l'aise. Je repense à mes mains autour de sa taille, je n'avais jamais été aussi proche d'un garçon. Le rouge me monte aux joues. J'essaye d'occulter cette image de nous deux serrées, séparé par de simples vêtements.

Des semaines se sont écoulées, je n'ai pas recroisé Exton, Chad semble s'être calmé. Les choses reprennent leur cours, j'intègre l'université dans un mois et demi. J'ai pu mettre de l'argent de côtés, mais je devrais trouver un travail étudiant. Je serais dans la même faculté que Chad, on a pu l'intégrer grâce à l'assurance-vie de mon père.

Je suis au café en train de servir des clients quand la porte s'ouvre sur ce Exton. Mon coeur rate un battement, il est métamorphosé, il a coupé ses cheveux, ses yeux bleus sont magnifiques. Il est habillé d'un jean bleu marine et d'un t-shirt blanc, bien loin du noir. Il pose ses yeux sur moi, me reluque et rejoint sa table pour s'asseoir. Je prends sa commande, il est seul.

— Tu veux boire quelque chose?
— Toujours aussi coincée la nonne.
— Bella! Qu'est-ce que ça peut te faire?

Il affiche un sourire arrogant en me reluquant.

— Sous ton chemisier blanc, il doit y avoir de quoi faire!
— Seigneur! Un pervers!
Il éclate de rire.

Je me presse de prendre sa commande et m'éloigne le plus de loin. Seule son apparence a changé, il est toujours aussi rongé par le diable. Je trifouille mon médaillon de la Sainte-Vierge et me ressaisis,  déterminée à l'ignorer à vie. Je demande à mon collègue de le servir, je veux garder mes distances. Le service se termine, je rejoins l'arrêt de bus. La moto de Exton s'arrête à ma hauteur. Cette fois-ci, il ne retire pas le casque.

— On y va Bella hébraïque.
— Je vois que ton petit cerveau a retenu une information.
— Bientôt, c'est autre chose que je risque de retenir.
— Seigneur! Tu es rongé jusqu'à l'os par le malin!
— « Seigneur !»
Il m'imite.

— Tu grimpes?
— Sans façon, le bus ne va pas tarder.
— Bien.

Il s'en va à toute vitesse.