La fleur du mal

Chapitre 48

— Je le sais Chad, mais j'avais besoin de vivre les choses pour les comprendre.
— Un soir, après avoir fumé et bu plus que de raison, Ex s'est mis à se confier à moi.
— D'accord.
— Il m'a révélé avoir été fou amoureux d'une fille.

Mon cœur tambourine dans la poitrine. Il a à peine commencé et je suis détruite.

— Il a perdu cet amour de jeunesse, il ne m'a pas dit comment, mais ça l'a détruit.
— D'accord, mais où est le rapport avec moi?
— Tu es son sosie craché.
— Quoi ? C'est une blague.

Je le vois pianoter sur son téléphone, il me montre une photo et tout bascule dans l'horreur. Elle est ma copie conforme. On pourrait passer pour des sœurs, je tombe de haut.

— Oh seigneur, c'est plus glauque que je le pensais.
— Je suis désolé Bella, mais tu ne récolteras rien de bon de cette relation.

Je monte me coucher, chamboulée, anéantie, désarçonnée. Je ne trouve pas le mot exact à mon désarroi. Il m'a approché simplement parce que je ressemblais à un amour perdu. Je me sens si stupide, si naïve d'avoir  cru à un amour réciproque. Il n'a été question que d'un fantasme unilatéral.
J'ai envie de tout casser, comme mon cœur l'est à cet instant. Toutes ces années d'incertitudes sont réduites au silence par une ressemblance.
J'éclate en sanglots, je me saisis de mon téléphone, je compose son numéro. Je sais qu'il ne faut pas réagir à chaud, je devrais prier et apaiser ma colère. Mais je n'en peux plus, Bella est enragée contre ce Exton.

— Bella!
— Tu n'es qu'un enfoiré. Comment as-tu pu me faire ça?
— Mon ange ?
— Ne m'appelle plus comme ça. Tu as bien joué avec moi!
— Je ne comprends pas Bella.
— Elle était comme moi? Croyait en ton amour? T'as embrassé comme je l'ai fait? Elle t'a donné ce qu'elle avait de plus précieux? Réponds-moi!
— Je suis désolé Bella.

Il raccroche. Il n'est même pas capable de s'expliquer, un lâche, il fuit la réalité, je le déteste. J'ai perdu tant d'années. Tout le monde a essayé de m'avertir et pourtant j'ai persisté. Car Bella croyait en Exton. Quel gâchis! Je me sens si sotte. Ce soir-là, je n'ai pas fermé l'œil de la nuit, j'ai ressassé notre histoire qui n'est qu'une vulgaire copie de son passé. Combien de Bella a-t-il détruit?

Le matin, je prends le petit déjeuner dans mes pensées, je ne peux pas profiter de ce moment avec mon frère. Un seul nom résonne dans ma tête. Chad me pose à l'aéroport, cette fois-ci, j'appréhende le retour. J'ai peur de ce que je ferai quand il croisera ma route. Je ne veux plus lui accorder de crédit. Il a simplement raccroché, comme si ces années de destruction pouvaient s'éteindre en une action.
J'arrive à la maison, ma colère ne redescend pas, je me saisis de la bible, et je lis jusqu'à m'endormir.
Au réveil, je me sens mieux, la prière a eu un effet sur cette douleur lancinante qui ne me quitte plus depuis des années.

Je me prépare, je dois sortir avec Bryan, j'espère passer une bonne soirée, après ce que je viens d'apprendre c'est difficile. Je n'arrive même pas à me maquiller, mes mains tremblent de colère.
Je le rejoins dans un café de Manhattan, il n'est pas arrivé. Je suis dans mes pensées, je ne sais plus si c'était une bonne idée de me confronter aux autres. Je me sens stupide. Bryan arrive, il s'assoit souriant, j'essaye de faire bonne figure, mais je n'y arrive pas.

— Qu'est-ce que tu as Bella?
— Rien. Un peu fatiguée.
— C'est à cause de ce Exton?

Je relève les yeux vers lui. Tout le monde est au courant. Je suis gênée, ce n'est pas la personne la plus appropriée pour discuter d'un ex qui vous a brisé le cœur dans une relation basée sur le paraître.

— Allez Bella, je peux être cet ami-là.
— Je ne veux pas te blesser.
— Ça ne risque plus.
— C'est à cause d'Exton.
— Raconte-moi.
— J'ai appris certaines choses qui remettent en doute toute notre histoire.
— Tu sais ce que je pense? Que tu es une fille géniale, j'aurais aimé être celui qui te met dans cet état, mais pour les bonnes raisons. Avance et vois ce que tu peux en tirer. 
— Il n'y a rien à en tirer.
— Alors regarde droit devant toi.

Ça m'a fait un bien fou, de pouvoir en parler à voix haute, d' exprimer librement ces sentiments qui me faisaient honte. Je ne suis pas unique. Je suis comme tout le monde, j'avance avec mon lot d'épreuves. Je rentre chez moi, avec le sentiment d'avoir tout donné et de ne rien avoir reçu en retour.
Je ressens de la jalousie envers cette fille, à qu'il a donné son cœur et avec qu'il se retrouve emprisonné. Je ne suis pas elle, non je suis Bella, libérée d'Exton. Quand lui se retrouve encore enchaînée.

Le matin, je me lève, je suis déterminée à être tout sauf cette fille-là. On ne partage qu'une enveloppe charnelle. Je suis Bella, la seule, l'unique, sans Ex ni Ton.

Je passe devant la devanture, j'ouvre la porte, une femme s'avance vers moi.

— Je peux vous aider?
— Oh oui, vous pouvez.
Je souris.