Pétrifiée, Milléïs fixait le voleur, la gorge nouée. La ruelle semblait se refermer sur elle et RP, tandis que l'œil de l'homme était braqué sur eux. Discrètement, l'adolescente tâta sa ceinture de cuir pendante à ses hanches, espérant trouver quelque chose pour se défendre en cas d'attaque inattendue. Elle n'y dénicha qu'un vieux trousseau de clés qui tinta timidement sous ses doigts. Ses yeux inquiets s'égarèrent à droite, puis à gauche, fantasmant sur la perspective de voir un objet contendant non loin d'elle ; une barre de fer, un manche à balai, qu'importait ! Seulement quelque chose qui puisse faire mal.
Milléïs tenta vainement de le raisonner :
— Allons, soyez gentil et rendez ce sac. Vous risquez de graves problèmes avec la justice si vous ne changez pas d'avis.
— Oui, certes. Je suis un envoyé du MAJE, j'ai été créé par le gouvernement. Mon travail est de livrer ces lettres en toute sécurité. Je vous serai donc gré de bien vouloir obtempérer, et veuillez croire malgré tout, cher monsieur, en mon respect infini envers vous, dit RP, avec une politesse subjuguante.
La paupière droite du malotru fut troublée d'un spasme nerveux, tout comme sa lèvre supérieure. Tout un tas de micro-expressions sillonna son visage disgracieux, tandis que son cerveau un peu trop faible restait bloqué sur deux mots en particulier :
— Jus...tice... ? Gou... vernement... ? Mauvais... Mauvais... Mauvais...
Se tournant complètement en face du duo, l'homme à l'écharpe se voûta davantage dans une position animale. Il grogna et serra les dents, exposant leur éclat jaunâtre qui répugna Milléïs ; elle pouvait presque sentir son haleine fétide de son emplacement. Ses bras rejoints sur ses pectoraux métalliques, RP constata, un peu déçu :
— Oh, eh bien... Il n'a pas l'air d'accord avec nous.
Son pouls pulsant à vive allure, Milléïs fut accablée par l'aura de danger émanant de ce fou furieux. Il semblait prêt à lui sauter au cou. RP restait étonnamment calme, voire inconscient du déroulement incongru de ce sauvetage. Or, lorsque l'inconnu avança, son œil encore d'usage capta un mouvement furtif près de ses pieds.
Une petite souris passait son chemin au milieu de l'altercation.
Comme happé par un démon, le brigand ouvrit des yeux démesurés et recula en couinant. Dans l'affolement, il en lâcha la sacoche qui embrassa le sol. Le défiguré bondit de peur sur le couvercle de l'énorme benne à ordures, puis s'agrippa agilement sur le rebord d'une fenêtre, avant de se hisser au sommet d'un renfoncement creux surplombant la ruelle.
Stupéfaite, Milléïs le suivit en courant jusqu'à s'arrêter au pied du mur de briques. Quelle souplesse ! En exhalant un soupir, encore chamboulée, la blonde pivota vers la besace gisant au sol.
— Mais qui était ce malade mental ?
RP gloussa en observant le rongeur s'enfouir dans un trou.
— Je l'ignore, mais il n'a pas l'air d'apprécier ces petites choses.
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𝐌𝐈𝐋𝐋𝐄𝐈𝐒 𝐆𝐀𝐙𝐄𝐑𝐆𝐑𝐀𝐘, T1 : La Voie des Défenseurs
FantasyArchipel d'Enkkorag, 1877. Dans un monde où les engrenages côtoient les énergies solaires et les cités homériques, Milléïs évolue. Dès son plus jeune âge, elle nourrit une ambition : protéger les autres, servir la justice et lutter contre le mal. Dr...