Pensionnat Richmond, Nous Voilà ! 5/7

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Lunich eut un sursaut qui fit frémir ses imposantes bajoues

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Lunich eut un sursaut qui fit frémir ses imposantes bajoues. Il chercha frénétiquement sur les canapés, en quête du visage de cette Banha Hagelheim. Soudain, il vit une fille brune se lever. Elle était grande et svelte, des cheveux noués d'une longue tresse à rubans. Elle était bien trop jolie pour qu'il daigne l'admirer davantage. Avec embarras, Lunich retira son postérieur galbé du sofa, puis siégea aux côtés de sa nouvelle coéquipière. Il lui envoya un sourire qui se voulait amical. Or, celle-ci l'observa silencieusement de haut en bas. 

Lorsque l'appel fut clôturé, Wynstead releva la tête vers les groupes de deux qui s'étendaient face à lui, son poignet gauche s'agitant avec emphase.

— Parfait. C'est avec votre binôme que votre apprentissage commence, dès à présent. Ce binôme est un lien sacré entre vous et votre partenaire. Ensemble, vous allez devoir cohabiter, combattre et apprendre à vous entendre en toutes circonstances. C'est une des règles d'or chez les Défenseurs : honore ton partenaire et la justice n'en sera que plus triomphale. Car oui, la justice sera votre point de mire numéro un ; vous devrez toujours agir pour et envers elle. C'est la justice qui a fait que vous êtes ici, aujourd'hui. C'est grâce à elle que nous sommes tous ici ! Honorez la comme votre fidèle compagnon et veillez à ce qu'elle soit toujours respectée. Un tel parcours se fait grâce à la dévotion, au courage et au sens pur de l'abnégation. L'occasion unique dans une vie de faire ses preuves auprès des plus grands protecteurs de notre île. C'est grâce à la justice et ses rouages essentiels que le monde tourne rond. Vous êtes ces rouages, les enfants... Vous êtes la trente-cinquième brigade de formation. La prochaine génération désormais en marche.

Les apprentis se tenaient droits, à l'écoute de chaque mot puissant traversant les lèvres pincées du directeur Wynstead.

— Bien... Lorsque vous sortirez d'ici, vous irez voir Madame Dungarron, la gardienne. Elle vous guidera jusqu'à vos dortoirs. Avant de finir ce discours, je tiens à vous faire part des règles à respecter durant votre séjour au Pensionnat Richmond. Voici la règle numéro un ; les lits doivent être faits chaque matin. Règle numéro deux ; la discipline et l'obéissance sont légions, le couvre-feu de vingt et une heure doit impérativement être respecté. Passée cette heure, il est interdit de quitter sa chambre, sous peine de sanction sévère. Règle numéro trois ; le manque de respect entre élèves ou envers un professeur est formellement interdit. Aucune bagarre n'est tolérée à l'intérieur, ni à l'extérieur du pensionnat. Règle numéro quatre ; toujours être attentif lors des cours, vos enseignants ne sont pas là pour jouer aux perroquets, mais pour vous rendre meilleurs. Règle numéro cinq ; le port de l'uniforme emblématique du pensionnat est obligatoire en journée. Et enfin, règle numéro six...

Wynstead déposa ses gros yeux torves sur une Milléïs qui, à ce contact visuel, ravala durement sa salive. 

— Il est strictement interdit aux élèves d'aller dans les parties condamnées du pensionnat, telle que les tours supérieures, les donjons ou les quartiers des professeurs. Vous serez pénalisés pour chaque dépassement et un avertissement vous sera donné. Tout au long de votre apprentissage, vous serez notés sur vos compétences, vos connaissances, vos points faibles et votre comportement. Votre bulletin final sera déterminant pour nommer les binômes méritant d'obtenir leur diplôme, mais aussi celui qui aura la chance de représenter Lumènia durant le Championnat des Nations. Nous ne recrutons que l'excellence, sachez le. Ce n'est pas parce que vous êtes ici, actuellement, que vous allez repartir muni d'un insigne. Il faudra le mériter. Si vos fautes graves s'accumulent, vous risquez l'exclusion définitive du pensionnat avant même la fin de votre année. J'espère avoir été assez clair.

Le silence approbateur des enfants conforta Wynstead à étendre un rictus satisfait, le pied de sa canne cognant le sol.

— Maintenant, nous allons tous entreprendre le serment solennel des Défenseurs. Main sur le cœur, répétez après nous.

Wynstead lia ses mots à ses gestes, de concert avec les quatre enseignants derrière lui, puis récita, d'un ton patriotique :

Par pluie, mon courage n'aura pas de prix. Par vent, je protégerai les innocents. Par tempête, j'arrêterai les troubles-fêtes. Par chaleur, je triompherai avec ferveur. Par neige, je rendrai justice aux nations verte, bleue, grise et beige. Par tous les torrents, je le jure solennellement. Par le sacre divin des Gouverneurs, j'honorerai mon rôle de Défenseur. À vous, les enfants.

Gauchement, les apprentis chantonnèrent le couplet. Mais cela ressemblait plus à une cacophonie hésitante plutôt qu'à un vrai serment. Légèrement crispé, Wynstead hocha la tête :

— Ça viendra... Ce n'est que la première fois, après tout. Tâchez de l'apprendre par cœur, à l'avenir. Bien, nous vous libérons de notre emprise. Vous pouvez passer le reste de la journée à visiter le pensionnat, afin de vous imprégner de sa grandeur. Cela vous donnera l'occasion de faire plus ample connaissance avec votre nouveau partenaire. N'oubliez pas d'aller voir Madame Dungarron, elle vous fera visiter l'étage. Bonne journée à vous.

Wynstead prit congé, suivi des quatre enseignants. Maintenant que la pression était retombée, les pensionnaires pouvaient souffler. Quelques rires nerveux s'échappèrent brièvement lorsque les adultes eurent quitté la salle commune. Milléïs s'affaissa presque sur Draval tant son cœur battait fort. Quelle réunion stressante !

— Hey, vous deux !

Lunich se pressa jusqu'à eux, faisant sourire Draval qui l'accosta :

— Oh, Lunich, tu n'es pas avec ta nouvelle partenaire ?

— Eh bien... Non. Je n'ai toujours pas eu le courage d'aller lui parler, rougit le concerné en tordant les bords de son pull à grosses mailles. Regardez-la, elle a l'air tellement... inaccessible.

En effet, Banha Hagelheim avait tout l'air d'être une adolescente froide et impénétrable comme une montagne gelée. Elle restait seule, assise sur l'accoudoir d'un des divans. Ses yeux graves et cernés fixaient les autres qui bavassaient tranquillement. Milléïs pouffa alors :

— Ça ne veut pas dire qu'elle est méchante. Tu devrais aller lui parler.

— Je ne sais pas trop... marmonna Lunich.

— Tu vas bien être obligé, vous allez travailler ensemble, désormais. Allez, courage ! le poussa Draval, sûr de son coup.

Lunich hésita un instant, puis dans un élan de bravoure, s'écria :

— Oui, tu... Tu as raison ! J'y vais !

L'adolescent crapahuta comme une volaille en direction de la jeune fille. Milléïs et Draval le couvaient des yeux, impatients de voir le résultat. Lorsqu'il arriva jusqu'à elle, Lunich bredouilla ses premières phrases, avant de formuler quelque chose d'enfin audible :

— J'espère qu'on va bien s'entendre, furent les seuls mots compréhensibles qu'il lâcha.

Le mutisme de Banha ne rassura pas le jeune garçon ; encore moins son immense regard de braise. Soudain, elle se dressa et l'attrapa brusquement par le col de son pull, le faisant sursauter de surprise.

— Écoute-moi bien, grosse limace... J'aurais voulu être avec n'importe qui sauf avec toi, tu m'entends ? Je ne suis pas du genre à me faire retarder par un boudiné de ton acabit. Je veux devenir Défenseure coûte que coûte, alors tu as plutôt intérêt à te bouger si tu ne veux pas que je martèle ta graisse avec mes poings ! Compris ?

Lunich begaya une réponse vague, frémissant comme une feuille. Banha le repoussa brutalement, puis rejoignit l'essaim vers la sortie. Il replaça son col roulé, son faciès gonflé de gêne et d'indignation. Tout rouge, le garçon pivota vers Milléïs et Draval qui l'attendaient toujours, la bouche et les yeux grands ouverts. Une grimace déformant son visage, Draval glissa finalement à l'oreille de sa comparse :

— La prochaine fois, abstenons-nous de donner des conseils pour approcher les filles. Nous sommes de piètres entremetteurs...

𝐌𝐈𝐋𝐋𝐄𝐈𝐒 𝐆𝐀𝐙𝐄𝐑𝐆𝐑𝐀𝐘, T1 : La Voie des DéfenseursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant