Chapitre 13

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« L'amitié se nourrit de communication », Michel de Montaigne

ELISABETH

Ces derniers jours, je suis très peu sorti de ma chambre dans les appartements de ma soeur et Antoine, me consacrant presque exclusivement au piano. J'avais besoin de retrouver cette sensation après y avoir joué intensément et cela m'a fait un bien fou de ne faire plus qu'un avec mon instrument. D'après ce que m'a dit Louise, cela fait même longtemps qu'elle ne m'avait pas entendu joué aussi bien et cela m'a touché au plus profond de moi, l'acharnement que je mets depuis tant d'année paie ses fruits et il n'y a pas meilleure récompense que de se faire féliciter par ses proches. Ça va mieux entre elle et moi, il faut dire que rester dans ma chambre m'a permis d'éviter Edouard et donc d'éviter toute autre dispute avec ma sœur et son époux. Cependant, je mentirais si je disais que je n'avais pas pensé à lui un seul instant car ce n'est pas vrai : j'ai pensé à lui beaucoup trop souvent. J'ai repensé sans cesse à notre rencontre hasardeuse au labyrinthe et je n'ai pu m'empêcher de me demander si ce qui s'était passé là-bas avait recommencé. Hier, quand il m'a appelé alors que j'étais avec ma sœur, j'ai préféré faire comme si je ne l'avais pas entendu ni même vu car je ne voulais pas risquer une discussion qui ne m'aurait pas plu avec Louise. Mais bon sang, que c'était dur de jouer à l'indifférence ! Quand j'ai entendu qu'il m'a appelé, j'ai eu envie de le saluer ne serait-ce qu'avec un geste de la main, mais j'ai préféré m'abstenir.

— Antoine, puis-je vous parler un instant ? lui demandé-je quand il entre dans la pièce principale.
— Bien sûr, me sourit-il.

Louise étant dans leur chambre pour se reposer, le moment est idéal pour lui parler.

— Jean-Baptiste et Sophie arrivent dans la soirée.

Il fronce les sourcils.

— Comment le savez-vous ? Louise ne m'en a pas parlé.
— C'est parce qu'elle pense qu'ils arrivent demain, comme c'était prévu, mais j'ai envoyé une missive à leur domestique pour lui demander de les faire venir aujourd'hui, afin de lui faire une surprise.
— Le Roi est au courant ?

Je hoche la tête.

— Oui, je l'en ai informé hier dans les salons.

Il acquiesce et me sourit.

— Vous êtes une bonne sœur, Elisabeth.
— Ça lui fera du bien et puis il me tarde de revoir mon neveu et ma nièce.

Je vois bien à son regard qu'il aurait voulu voir ses garçons, Sébastien et Thomas, mais malheureusement, leur gouvernante nous a informés qu'ils avaient pris froid, donc le repos est de rigueur, surtout à leur âge.
Je me lève ensuite.

— À présent, je vais aller marcher.

Il regarde par la fenêtre.

— Par ce temps ?
— Oh, je vais juste errer dans le château, lui dis-je, je pense aller faire un tour du côté de la Galerie des Glaces, elle est tellement belle.

Et ainsi j'espère bien croiser Edouard.

— Vous avez raison. Cela ne vous dérange pas d'y aller toute seule ? Je vous aurais bien accompagné, mais je préfère rester près de mon épouse.
— Bien sûr, c'est tout à fait normal.

D'autant plus que ça m'arrange, surtout si je suis amené à voir Edouard.

Son regard soudain voilé m'interpelle.

— Antoine, est-ce qu'il y a une chose que vous ne me dites pas sur l'état de Louise ? m'inquiété-je soudain.
— Non pourquoi ? répond-il sincèrement.
— Je ne sais pas, j'ai l'impression que vous êtes plus inquiet que ce que vous ne devriez.

Vices à Versailles - S'aimer est interdit tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant