Chapitre 35

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« Quand on s'est mépris, il faut réparer la faute et que nulle considération en empêche, pas même la bonté », Louis XIV

ELISABETH

Cela fait des jours que je n'ai pas de nouvelles d'Edouard. Depuis que j'ai appris que le Roi a découvert son véritable rôle au sein de la cour, je suis comme éteinte. Ça a été dur de dire au revoir à Annabeth, qui a été renvoyée en Angleterre, mais au moins, je suis rassurée sur le fait qu'elle vive. Edouard a une épée de Damoclès au-dessus de sa tête et je ne supporte pas cette idée. Des jours qu'il est enfermé dans l'une des cellules du château où le lieutenant de police doit lui faire subir les pires châtiments. Rien que de l'imaginer me coupe tout appétit et m'empêche de dormir. Depuis, j'enchaîne les cauchemars, voilà des jours que je n'ai pas passé une nuit décente. Je me demande encore comment je parviens à rester debout sans m'effondrer. Je n'ai même plus goût à jouer du piano, qui me fait trop penser à lui. Je ne supporte plus d'être loin de lui, très inquiète quant à sa santé. Mais ce que je ne supporte encore moins, ce sont les rumeurs qui circulent quant à son sort. Bien sûr, la nouvelle de son arrestation a fait le tour des courtisans en très peu de temps, tout comme pour la raison. Certains parlent d'exécution, mais je ne veux pas y croire, c'est au-dessus de mes forces. Je veux tous qu'ils se taisent ! J'aimerais me confier à Louise, lui parler de ce que je ressens, mais comment le faire ? Depuis qu'elle a appris son véritable rôle ici, elle l'a affublé de tout un tas de noms d'oiseaux, l'accusant de m'avoir séduite pour une mauvaise raison, mais moi, je sais que c'est faux. Edouard m'aime, je le sais. Et tant pis s'il n'y a que moi pour y croire.
La main sur le cœur, j'étouffe un sanglot qui me brûle la gorge puis je serre le collier que je porte autour de mon cou si fort que mes doigts blanchissent. C'est un cadeau d'Annabeth qui, quand je l'ai aidé à rassembler ses affaires avant qu'elle ne monte dans un carrosse, m'a offert ce bijou qu'Edouard lui avait acheté avant de partir pour la France, son attention m'a touché. Depuis, je ne le quitte plus. Il me manque tellement que je n'arrive plus à respirer convenablement. Il faut que je fasse quelque chose, je ne peux plus rester ici sans rien faire tandis qu'il moisit dans une cellule, sans doute maltraité par La Reynie. Je dois aller voir le Roi pour plaider sa cause, je n'ai pas le choix, je ne pourrai plus me regarder dans un miroir si je ne fais rien.
Je sors de ma chambre, observe la pièce principale. Louise est sur le divan, en pleine lecture. Antoine n'est pas présent, il est sorti depuis ce matin. Sur la marche des pieds car je n'ai aucune envie de subir un interrogatoire, je me dirige vers la porte d'entrée.

— Que faites-vous ? m'interpelle la voix de ma sœur, me stoppant net dans mon avancée.

Je grimace et jure. Bon sang, ce n'est pas vrai ! D'habitude, quand elle lit, elle n'entend pas ce qui l'entoure !

— Je... sors, mens-je.

J'entends ses pas derrière moi puis elle se place devant moi, le regard qu'elle me lance m'indique qu'elle ne me croit pas du tout.

— Et si vous me disiez la vérité, plutôt ?

Il y a des jours où je la maudis de me connaître aussi bien. Mais, résignée, je me pince l'arête du nez et ferme les yeux pour trouver le courage nécessaire, et avoue :

— Je vais... plaider la cause d'Edouard auprès du Roi.

Ses yeux se plissent et ses bras se croisent sur sa poitrine. Son regard ombrageux me pousserait presque à renoncer si je n'étais pas aussi déterminée.

— Vous allez faire quoi ?
— Je vais plaider la cause d'Edouard auprès du Roi, répété-je pour qu'elle comprenne ma motivation.

Elle secoue la tête.

— Il en est absolument hors de question.
— Vous ne pouvez pas me l'interdire, la provoqué-je d'une voix amer.
— Si, surtout si cela peut vous éviter des ennuis. Non, mais vous vous rendez compte de l'absurdité de votre souhait, Elisabeth ?

Vices à Versailles - S'aimer est interdit tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant