Chapitre 9

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Installée dans le petit appartement de Lyana, une bouteille de vodka entre nous, je repense à toute cette semaine. Je réalise à quel point, malgré les problèmes que cela m'a apporté, le cours de self-défense a remis les choses en place.

Pour la première fois depuis des mois, je suis par exemple retournée au boulot hier. Pour apprendre, certes, que j'allais être virée mais tout de même ! On peut dire que j'ai fait un pas en avant.

Malheureusement, le résultat n'a pas été probant. L'idée que je doive retrouver un travail, auquel je doive m'accrocher, me replonge quelque peu dans la dépression. J'ai néanmoins décidé de ne pas y penser ce soir.

Je m'étire paresseusement, cherchant, tel un chat, le moindre rayon lumineux. Le fait d'être sortie de chez moi, de me remettre en mouvement après six longues années à seulement survivre, me fait énormément réfléchir.

Après quelques minutes de silence, j'ose enfin poser ma question.

— Comment tu as fait pour survivre sans famille ? Enfin je veux dire, avec tous les problèmes que tu as eu avec ta mère et tes.... Tes nombreux beaux-pères, je me demande vraiment comment tu as fait pour devenir quelqu'un d'aussi parfait.

Elle se met à rire, comme si je venais de faire la meilleure improvisation de stand-up, puis s'affale sur le canapé.

— Je suis loin d'être parfaite Syntara. Regarde, quand on s'est rencontrées, j'étais sauvage et agressive. Ça fait quoi ? Cinq ans qu'on se connaît ? Ça doit en faire trois que je suis à peu près sympa.

Je souris et dépose un baiser sur sa joue comme pour la remercier de me dire cela. Juste après, je tends la main vers la vodka dans l'optique de nous resservir mais je constate que Lyana n'a toujours pas fini son verre.

Boriiiiiing.

Sans attendre qu'elle termine, je verse de l'alcool dans le mien puis me tourne vers elle pour reprendre là où nous nous en sommes arrêtés.

— C'est drôle. Que l'on se soit trouvées quand j'allais au plus mal. D'une certaine manière, on s'est aidées à remonter la pente. J'ai juste pris plus de temps que toi. Enfin, avec plus de chutes.

— Mais parce que moi je me débattais depuis plus longtemps, Synt. Tu n'as pas à te comparer, les choses se font à leurs manières. J'ai passé une enfance merdique et me suis améliorée à partir de la vingtaine, grâce à toi. Tu as eu une vie simple et magnifique, jusqu'à tes dix-neuf ans. Quand on regarde, on constate juste que tu n'étais pas armée pour subir une telle épreuve. Maintenant, tu l'es.

Face à ma mine très probablement chagrinée, Lyana me presse gentiment l'épaule et rajoute :

— Tu vas voir, tout fini par passer. Il te faut juste encore un peu de temps. Et plus de sorties !

Nous levons nos verres à ce constat. Je dois l'avouer, ne pas rester dans ma dépression et mes angoisses ont largement aidé.

Mais pour faire cela, les efforts avaient déjà été immenses, tout comme les progrès. La grâce du Saint-Esprit ne m'avait pas touchée au détour d'une avenue. Mes longues séances de thérapie et les pilules que je m'enfilais avaient joué un grand rôle.

Ne voulant pas dire cela à Lyana, et plomber l'ambiance par la même occasion, je reprends le sujet initial, malgré mon hésitation.

— Est-ce que la douleur finit par disparaître ?

— Non. Elle sera toujours là, au fond de ton cœur. Tu la ressentiras chaque jour, mais à chaque fois elle sera moins forte. Elle finira par s'apaiser cette douleur, je te le promets. Bon, et si on parlait garçons un peu ! Ou filles, d'ailleurs. Avec toi, je sais jamais !

Mémoire PerdueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant