Chapitre 4

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— Alors vous venez ou pas ?

Un sourire de ma part et il s'élance à ma suite. Il en profite pour me regarder, une fois à ma hauteur. J'ai l'impression d'être passée au rayon X tellement son attention est troublante. Maintenant, je comprends mieux pourquoi il paraissait si gêné quand je l'ai observé. La sensation est plus que désagréable. Surtout que nous marchons sans émettre le moindre son.

Le bar dans lequel nous allons n'est pas très loin. Heureusement car le silence commence vraiment à être pesant.

Lorsque nous entrons à l'intérieur, la légère brise fait place à une chaleur épouvantable et le silence de l'extérieur est remplacé par un brouhaha incessant. La serveuse nous fait un signe de la main pour nous dire d'approcher et je sens la main de Chris se poser dans le bas de mon dos pour me pousser vers le bar.

Les effets qu'il provoque en moi sont indéniables et, même si je voulais me contenir, je n'y arriverais pas. Il doit d'ailleurs s'en apercevoir puisqu'il arrive au bar en homme victorieux. Merde... Les mecs arrogants ont toujours été mon faible, à mon plus grand dam. Tout comme ceux qui savent ce qu'ils veulent. C'est visiblement le cas de Chris puisque, lorsque nous arrivons devant la barmaid, elle a déjà commencé à préparer un verre.

­­— Salut mon chou, comme d'habitude ? lance-t-elle au jeune homme qui m'accompagne. Tu nous amènes de la compagnie, aujourd'hui ? Je te serre quoi, à toi, ma belle ?

Surprise de sa familiarité, je hausse les épaules, signifiant que je la laisse choisir. Après tout, je ne suis pas très exigeante sur l'alcool, tant qu'il brûle la gorge. Et que les verres peuvent s'enfiler rapidement.

D'un geste expert, elle fait glisser sa boisson vers Chris, qu'il rattrape aisément. Si j'en crois la manière qu'il a de boire, nous avons bien plus de points communs que je ne le pensais. En tout cas, il apparaît maintenant à mes yeux autrement que comme un beau mâle chez qui atterrir ce soir. Peut-être que nous pourrions devenir copains de soirée.

Enfin... S'il décide de s'habiller autrement car sortir avec un trentenaire en costard, ce n'est pas vraiment mon idéal. On dirait un politicien, avec son costume trois pièces et son sourire plus blanc que bl...

Oh non. Ce n'est pas possible.

— Est-ce que tout va bien ? murmure-t-il si bas que je me demande même s'il a vraiment posé la question.

J'expire tout l'air de mes poumons et acquiesce d'un signe de tête. Je n'arrive pas à croire que je n'ai pas fait le lien. C'est pourtant logique. Et EVIDENT. Mais bien sûr, mon cerveau constamment embrumé n'a pas voulu faire le lien.

— Tu es le fils du sénateur Hamilton, non ? Je savais bien que ton nom ne m'était pas inconnu mais je n'arrivai pas à le remettre dans le bon contexte.

— Qu'est ce qui te dit que tu as raison ? dit-il en jouant avec son whisky. Pourquoi penses-tu avoir trouvé le « bon contexte » ?

— Il n'y a que les mecs de bonnes familles pour s'habiller comme tu le fais et, crois-moi, j'en connais un rayon là-dedans.

Sans rien ajouter, je saisis mon verre remplis d'un liquide ambré, je renverse la tête en arrière et avale l'alcool d'une traite. Scotch. Bonne idée. La barmaid a trouvé exactement ce qu'il me fallait pour ce soir.

Une sensation de brûlure caresse ma gorge et je ferme un instant les yeux pour savourer ce sentiment. Je ne sais à partir de quand l'alcool a commencé à me manquer, à partir de quand j'en ai eu besoin autant que de respirer. Au fond, je m'en moque. Tant que je peux profiter et oublier... D'un signe de la main, j'en réclame un deuxième, que je termine tout aussi vite que le premier. La conversation s'est tue mais le bruit du bar remplace celui dans ma tête. Je n'ai donc pas à meubler le silence.

Mémoire PerdueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant