Lorsque j'ouvre les yeux, c'est l'obscurité qui m'accueille de nouveau dans ses bras glaciaux. Confuse, je me demande un instant où je me trouve, puis me souviens que je suis dans les appartements qu'on m'a attribués dans un manoir que je n'appellerai jamais maison.
Un coup d'œil suffit pour m'appendre que la nuit règne toujours. La magie d'Aydan – que je ne comprends pas encore tout à fait – allume les chandelles à 8 heures tapantes chaque matin, ce qui me réveille toujours. Mais me voilà sortie du sommeil. Probablement à cause d'un cauchemar, déjà oublié. Je devrais essayer de me rendormir, de grappiller quelques heures de repos et de tranquillité.
Toutefois, c'est à ce moment-là, alors que je m'apprête à fermer les yeux, qu'un cri féminin retentit. Un sursaut me secoue. Je me souviens aussitôt de la conversation entre le frère et la sœur, que j'ai entendue hier au détour d'un couloir, de la mort de cette femme inconnue. Concrètement, j'ignore ce qui se passe ; si ça se trouve, Aydan est en train de tuer une autre femme et je pourrai l'en empêcher.
Décidée, je me redresse aussitôt, enfile des vêtements légers et me retrouve dans le couloir bordant les différents appartements du manoir. Lorsqu'il est éclairé, l'endroit est déjà sombre, maintenant, le lieu n'est qu'obscurité et noirceur, comme si une force malfaisante y régnait. La magie noire d'Aydan ?
Je secoue la tête, réprimant un bâillement. La fatigue me fait délirer. Pourtant, s'il y a une chose qui est certaine, c'est que je ne peux pas rester les bras ballants à ne rien faire. Je ne peux pas. C'est donc avec le cœur battant la chamade, l'esprit à demi-réveillé et la chair de poule couvrant ma peau claire, que j'avance timidement dans le couloir. Je ne connais pas encore assez bien l'endroit pour savoir m'y orienter sans lumière pour me guider. J'ignore où mes pieds me portent, mais je continue sans jamais m'arrêter.
Un autre cri – strident, celui-là – retentit. Toujours féminin. Un frisson remonte le long de ma colonne vertébrale. Pourtant, je poursuis, m'orientant avec le son. Heureusement pour moi, il semble provenir de l'autre bout du couloir. Malheureusement, je sais bien que le lieu où il me mène m'est interdit : le corridor vers les appartements d'Aydan.
Je devrais m'arrêter, ne surtout pas m'y rendre, faire demi-tour et essayer de me convaincre que je n'ai rien entendu.
Mais je ne suis pas trouillarde. S'il y a quelqu'un à sauver, je le ferai,
Comme si c'était possible, le couloir vers l'antre d'Aydan est encore plus sombre que le reste du manoir. Je sens une présence, des yeux posés sur moi, analysant chacun de mes gestes, mais il n'y a personne près de moi. Je suis en train de devenir folle.
Le couloir semble sans fin, pourtant il finit par déboucher sur un palier où je ne me suis jamais rendue. Une unique chandelle illumine simplement faiblement : je parviens avec difficulté à identifier deux portes parfaitement identiques. Rien ne les différencie. Je m'arrête un instant, tends l'oreille, mais n'entends rien. Rien d'autre qu'un silence inquiétant.
Mon cœur bat la chamade, ma respiration se fait saccadée, tandis que je me rends compte de ce que je fais, de l'énormité de la gaffe que je suis en train de commettre. Si Aydan le découvre, il me tuera.
Mais il faut croire que je ne suis pas saine d'esprit parce que ça ne m'empêche pas de poser la main sur la première porte à gauche et de la pousser. Elle s'ouvre avec facilité et, cette fois, je n'ai pas à plisser les yeux pour bien voir. La pièce est éclairée.
Ce qui attire mon regard en premier est définitivement la grande chaise à demi-allongée qui se trouve au beau milieu de la salle. Elle est faite d'un cuir noir, qui me donne des frissons, et couvert de sang...
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Les Spectres Oubliés
FantasyEldéa se réveille, sans souvenirs, dans un château vide... Enfin, presque vide. Le maitre des lieux, Aydan, un homme aussi mystérieux que détestable, y vit, seul. Il lui interdit de sortir du manoir, la condamnant à une existence morne. Mais c'est s...