Enlevée

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     Vincent passe une journée trop longue à son goût , il jette un œil toutes les cinq minutes à la pendule, navré du temps qui s'écoule si lentement. Après avoir épluché plusieurs dossiers, il s'octroie une petite pause pour le déjeuner et s'enferme dans son bureau pour essayer d'en savoir plus sur l'épreuve à venir. Il vient tout juste de commencer quand on frappe à sa porte. C'est Ethan.

- Bonjour Vincent, je peux entrer?

- Avec plaisir. Ethan pénètre dans le bureau sans refermer la porte derrière lui ,la loi interdisant les conversations privées au travail.

- Sais tu que nos ordinateurs sont couplés deux par deux? Je l'ai découvert il y a quelque temps. Le tien l'est avec le mien et je crois que tu devrais remettre à plus tard ce que tu étais en train de faire. Lui dit Ethan comme si de rien n'était.

Vincent referme en vitesse la page qu'il a ouverte et vérifie qu'il a tout effacé de son historique jetant un coup d'œil reconnaissant à Ethan.

- Je retourne travailler. Si tu as besoin de quoi que ce soit. Lui dit Ethan .

- Merci . ça te dirait de sortir boire un verre un soir? Lui demande Vincent.

- Avec plaisir. Ce soir si tu veux.

- Non je ne peux pas ce soir, j'ai déjà quelque chose de prévu. On fixe ça dans la semaine. Lui répond Vincent.

   Ethan repart comme il est venu, laissant Vincent perplexe. Peut-il lui faire confiance? Il sait que souvent dans les bureaux, il y a des espions chargés d'enquêter sur certains hommes sur lesquels le gouvernement a des doutes . Ils recueillent un maximum d'informations qu'ils soumettent à un référent. De nombreux hommes ont été arrêtés de cette manière, causant la mort certaine de leur famille. Il suivra son instinct. Pour le moment, il faut  seulement qu'il arrive à la fin de cette interminable journée.

Deux jours de plus passent tout aussi lentement,  et pour Vincent et pour Justine . Elle tente de s'occuper le plus possible, pour ne pas avoir à penser. Malgré que l'on ne soit que début décembre, la maison était déjà joliment décorée et Justine et les enfants attendent avec impatience le week-end pour que Vincent coupe un des sapins du jardin. Comme chaque année après la découpe, ils iront tous en replanter deux nouveaux pour les années à venir. Il ne pense plus qu'à une chose, rentrer chez lui et profiter de sa famille pour le week-end. 

Vendredi soir est enfin là. Il est encore tôt, mais la nuit est presque tombée et quelques flocons virevoltent dans l'air glacé.  A la maison Justine fait un gâteau pendant que Louise prépare un jeu de société. Jules vient juste de revenir de l'école et est pressé d'aller  jouer avec sa soeur. Il a à peine le temps de sortir son manteau que la porte s'ouvre.

- Vincent, tu es déjà là?

- Maman court ! hurle Louise ce sont les méchants avec leurs camions!

Justine se précipite dans la salle à manger en entendant les cris de sa fille suivis d'un bruit sourd de chute. Quand elle arrive dans l'entrée elle est ahurie par ce qu'elle voit. Louise est au sol, du sang dans les cheveux, les yeux fermés, Jules pétrifié contre le mur. Elle se jette sur sa fille, mais ne peut l'atteindre. Deux soldats la saisissent fermement par les bras et l'immobilisent.

- Vous devez nous suivre, suite de l'épreuve.

- Je veux juste voir si ma fille va bien. S'il vous plaît. 

Une claque retentissante la projette sur le sol , ce qui la calme instantanément. Il faut qu'elle pense à ses enfants.

- Tu ne veux rien du tout, tu n'es rien. Tu fais juste ce qu'on te dit. On y va.

- Jules occupe toi de ta soeur, dit -elle le plus rapidement possible craignant qu'un nouveau coup ne la fasse taire.

Le militaire s'approche du jeune garçon et saisit son menton dans sa main. Justine se débat , mais l'homme est trop fort.

- Tu ne vas t'occuper de personne petit. Tout va bien. Elle ne vaut pas la peine que tu fasses quoi que ce soit pour elle. Elle ne sont rien pour toi. Tu es un homme et elles ne peuvent pas t'atteindre. Va prendre ton goûter et regarder la télévision . Tu n'as aucun soucis à te faire.

Jules soutient son regard, refoulant ses larmes. Justine voyant que son fils fait des efforts immenses pour se contenir et ne rien laisser paraître, se fige aussitôt pour qu'ils l'emmènent le plus vite possible et que le petit puisse porter secours à sa sœur. Elle montre qu'elle est coopérative et ils sortent, laissant sa fille , peut-être morte sur le sol et son fils en état de choc. Ils la bousculent jusqu'au camion et la font monter à l'intérieur sans ménagement.

- On va voir si tu vas revenir cette fois- ci. Ricane le militaire en claquant la porte.

 Justine se met à pleurer. Comment vont faire ses enfants jusqu'à ce que Vincent rentre? Et si Louise était gravement blessée et qu'elle mourrait avant son retour ? Et quand bien même, si c'était grave, aucun médecin ne viendra la soigner. Une rage folle la submerge et elle se met à hurler comme un fauve. Le camion s'arrête, un des hommes ouvre la porte et se jette sur elle, lui assenant de violents coups dans le ventre et lui crachant au visage.

- Ta gueule! Hurle t'il. On ne veut plus t'entendre !

Il referme la porte d'un coup sec et le camion reprend sa route.  Justine se recroqueville, une douleur insoutenable dans le ventre. Elle n'arrive même plus à tendre ses jambes. Elle cesse de pleurer et essaie de respirer normalement. Elle patiente prostrée, incapable de bouger .

- Je vous tuerai tous. Marmonne t'elle entre ses dents. Tous.

L'ÉmancipationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant