LONG METRAGE

2024 : Chapitre 32 à 33

32

 Jordan termina sa journée assez tôt, il arriva chez lui à minuit et demi, espérant que Gabriel finirait rapidement pour qu'ils puissent passer du temps ensemble. Il avait eu une journée assez calme et n'était pas trop fatigué. Après une douche, il s'installa sur son canapé en caleçon et se mit à regarder des TikToks. Il avait pris cette habitude, bien qu'il sache que c'était du temps perdu. Cela le détendait vraiment, et il était particulièrement captivé par les vidéos montrant la création de plats. Ces vidéos l'absorbaient complètement et lui donnaient toujours faim. Bon, il n'avait pas besoin de ça pour éveiller son appétit, mais quand même ! Lorsqu'il quitta l'application, il était déjà une heure du matin. Il faut vraiment que j'arrête avec ce truc, pensa-t-il en se levant pour boire un verre d'eau. Il se vêtit rapidement, la culpabilité de perdre autant de temps le saisissant. Avec tout le travail qu'il accomplissait, il se disait qu'il avait bien le droit de se reposer un peu, non ? Peut-être que lire un livre serait une meilleure manière de se détendre. Enfin bon. Il attrapa un verre dans son placard et le remplit avec l'eau du robinet, observant le liquide transparent couler dans un bruit agréable jusqu'à toucher le fond du verre. Jordan commençait à ressentir la fatigue et n'avait pas eu de nouvelles de Gabriel. Peut-être qu'il avait oublié, ou peut-être qu'il avait décidé de l'ignorer. Encore. Peut-être que cette fois, ce ne serait pas lui qui briserait tout, mais que ce serait son cœur qui se retrouverait piétiné au sol. Après tout, il le mériterait probablement. Jordan coupa le robinet et but son verre d'eau d'une traite avant de retourner sur le canapé, s'allongeant avec un soupir de fatigue. Il fixa la table en face de lui jusqu'à ce que le sommeil le gagne. Ses rêves commencèrent heureux, mais se transformèrent rapidement en un tourbillon de douleur et de terreur. Il bougea beaucoup, son corps se débattant contre la violence de son esprit, même si rien ne semblait avoir de sens. Il vit le drapeau de la France tomber dans la boue, couvert de sang, tandis que des cris et des pleurs résonnaient si forts que ses oreilles semblaient brûler. Un groupe de personnes hurlait un prénom qu'il ne parvenait pas à comprendre. Était-ce cette personne dont il ne pouvait saisir le nom qui pleurait ? Il n'en avait aucune idée. Un chien aboyait, et le son résonnait dans un paysage qui ressemblait à un parc. Jordan serrait la personne qui sanglotait dans ses bras comme si ça vie en dépendait. Mais en un instant, il se retrouva dans les profondeurs sombres de l'océan. Un requin nageait seul, paisible, mais lorsqu'il se tourna, Jordan aperçut un trou au milieu de son corps, là où aurait dû se trouver son cœur. Il essaya de crier, mais sa tête était sous l'eau. Il remonta à la surface, tentant en vain de crier à l'aide, ses poumons se remplissant de liquide. Sur la plage, sa mère riait avec son père, le regardant comme s'il n'était rien, comme s'il n'était le fils de personne. Une foule l'observait, mais personne ne vint l'aider. Il se laissa couler lentement au fond de l'eau, une alarme dans ses oreilles brûlant intensément alors que la lumière du soleil disparaissait peu à peu. Jordan se réveilla en sursaut, le cœur battant et le corps transpirant. Il regarda autour de lui, les yeux larmoyant, l'alarme de son rêve sonnait toujours. Putain, c'est quoi ce bordel ? Pensa-t-il. Il essuya ses yeux et réalisa que c'était la sonnerie de son téléphone, son cœur se desserra et il l'attrapa.

« Allô ? Dit-il de sa voix rauque et tremblante, il renifla en reprenant ses esprits, regardant autour de lui pour s'assurer que tout était bien en place. La voix de Gabriel le rassura, comme si une lumière venait de s'allumer dans une pièce sombre.

- Ouais, je suis devant chez toi. Lui dit Gabriel. Jordan frotta ses yeux.

- Euh. On devait pas aller chez toi ? Lui demanda-t-il.

- Si, mais on passait devant chez toi alors je me suis dit qu'on pourrait te prendre en passant.

- Oui, d'accord. J'arrive. » Dit-il. Il raccrocha et mit rapidement ses chaussure et son manteau, ses mains tremblant toujours. Jordan, tu n'es plus un gosse. C'était juste un cauchemar. Se gronda-t-il. Il éteignit les lumières et se rappela du requin, il secoua la tête et ferma la porte à clef avant de marcher doucement vers la porte d'entrée. Il l'ouvrit et sorti dans la rue, le vent frais lui fit du bien, il prit une grande inspiration et expira doucement. L'image du petit drapeau français couvert de sang et de boue réapparu dans son esprit. Ce n'était qu'un rêve. Jordan marcha d'un pas tranquille jusqu'à la voiture noire garée à l'ombre d'un lampadaire. L'habitacle luisait doucement sous les lumières de la rue. Il ouvrit la portière et s'installa à l'intérieur. Gabriel, assis au milieu, lui adressa un sourire chaleureux avant de se pencher pour embrasser sa joue. Jordan sentit un apaisement immédiat balayer le reste de sa nervosité, comme si ce simple geste effaçait les traces de son mauvais rêve. La présence de Gabriel semblait magique, et Jordan observa cet effet se dissiper doucement dans l'espace clos de la voiture. Les particules invisibles de cette magie semblaient s'échapper derrière eux alors que le moteur ronronnait doucement et que la voiture démarrait.