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Gabriel passa une journée plutôt mouvementé, comme toujours. Il ignora chaque message de Jordan et hésita même à le bloquer pour ne plus ressentir cette douleur qui apparaissait chaque fois que son téléphone annonçait « Notification Instagram : Jordan Bardella ». Cette notification qui avait été si importante pendant tout ce temps. Il ne l'avait pas fait, n'y arrivant tout simplement pas. Il venait de monter dans la voiture qui devait l'emmener à son débat, le soleil commençait à tomber et la route semblait plutôt fluide pour la ville de Paris. Le résultat des élections Européennes avaient lieux dans trois jours et il était très stressé, mais il essayait de rester confiant pour ne pas sombrer. La fatigue pesait lourdement sur Gabriel. Ses épaules affaissées, ses traits tirés et son regard terne trahissaient l'épuisement qui l'envahissait. La lumière blafarde de l'habitacle de la voiture semblait accentuer les ombres sous ses yeux, tandis qu'il fixait la fenêtre sans vraiment regarder. Antoine, assis à ses côtés, l'observait en silence, lisant chaque ligne d'épuisement sur son visage.
« Ça va, mon pote ? Demanda Antoine doucement, sa voix teintée d'une légère inquiétude. Gabriel tourna légèrement la tête vers lui, mais ses yeux semblaient loin, perdus dans des pensées lourdes.
- Oui, répondit-il simplement, mécaniquement, d'une voix monotone. Antoine ne dit rien pendant un instant, scrutant son ami. Il savait que ce "oui" n'était qu'un bouclier, une habitude de façade qu'il utilisait pour tenir debout. C'était toujours comme ça.
- Tu es prêt ? Demanda Antoine, cherchant à briser la tension.
- Oui, répondit Gabriel, toujours aussi laconique. Antoine hocha lentement la tête, comme pour marquer une pause avant de relancer la conversation.
- Parfait alors, dit-il, bien qu'il sache que rien n'était parfait. Tout le monde le savait. La campagne était désastreuse. Leur candidate, Valérie Hayer, n'était pas appréciée et manquait de charisme. Gabriel l'avait aidé, alliant leur amitié et leur savoir faire, mais la Macronie avait trop déçut semblait-il. Le Rassemblement National se positionnait en tête des sondages. Gabriel n'avait de cesse de se demander ce qui avait pu lui échapper, quelle était la cause de cette désapprobation commune. Qu'avaient-ils bien pu faire de travers ? Ils avaient pourtant tout mit en œuvre pour gérer ces nombreuses crises et ils s'en étaient bien sorti. Mais personne ne semblait le retenir. Non, rien n'était parfait. Un silence s'installa, mais Gabriel finit par le rompre.
- Jordan est venu hier, lâcha-t-il brusquement, sa voix légèrement rauque, comme si les mots lui brûlaient la gorge. Antoine releva un sourcil, surpris mais pas totalement.
- Oh, fit-il simplement. Et alors, comment ça s'est passé ? Gabriel ferma les yeux une seconde, ses mâchoires se crispant légèrement, avant de reprendre.
- Je ne suis pas sorti. Mes gardes du corps l'ont jeté dehors, mais... je l'ai entendu. Je l'ai entendu m'appeler, s'énerver contre eux, dit-il, sa voix se brisant presque sur la fin. Il inspira profondément, mais sa respiration était tremblante. L'image lui revenait : lui, assis contre sa porte, les poings serrés sur ses genoux, essayant de contenir l'élan irrésistible qui le poussait à ouvrir cette foutue porte. Volta s'était blottie contre lui, son museau froid contre sa main tremblante, comme pour absorber sa douleur. Antoine le fixait, le visage grave, mais laissa le silence s'installer. Il répondit, sa voix plus dure cette fois.
- Tu sais ce qu'il voulait ? Gabriel haussa légèrement les épaules.
- Sûrement me mentir. Encore. Cracha Gabriel, les mots amers comme du poison. Il détourna les yeux, fixant un point invisible devant lui. Ses doigts tremblèrent brièvement avant qu'il ne serre les dents pour se retenir de ronger ses ongles, ce tic nerveux qu'il combattait difficilement ces derniers temps. Antoine hocha la tête, son expression sérieuse.
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LONG METRAGE
Hayran KurguBardellattal : plus de 250 506 mots ! 656 pages. En deux-mille-vingt-et-un, dans le silence feutré d'un vol au-dessus des nuages, Gabriel Attal et Jordan Bardella, deux rivaux politiques que tout sépare, se croisent sans savoir qui ils sont réelleme...
