Chapitre 12

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« On pleurait sous l'soleil, on s'marrait sous la flotte. »

Helena écouta attentivement ces premières paroles, un sourire au coin des lèvres. Mais au fur et à mesure que la chanson avançait, ses sourcils se froncèrent naturellement, absorbée par les mots qui résonnaient en elle de manière troublante.

« On était pas pareils, on est devenu potes.

Tu m'demandais des conseils, j'te répondais des notes

Et quand sonnait l'réveil, on était toujours potes. »

C'est là qu'elle comprit. Cette chanson, si importante pour Pierre, lui était dédiée. Sa gorge se serra, et bien qu'elle n'en ait écouté que quelques secondes, elle sentit déjà les larmes monter. Les dernières semaines avaient été si compliquées avec Pierre. Il lui manquait terriblement, tout comme cette complicité qu'ils avaient partagée. Assise sur ce canapé, dans l'appartement de Pierre à Caen, elle se retrouvait à écouter une chanson qui, visiblement, était un hommage à ce qu'ils avaient vécu.

Chaque mot transperça le cœur d'Helena, et elle se mordit l'intérieur des joues pour ne pas flancher. De son côté, Pierre l'observait attentivement, guettant la moindre de ses réactions, espérant capter ses émotions.

« Pourquoi on m'a toujours appris qu'il fallait aimer pour la vie,

Mais pas rire jusqu'à la fin ? »

Ces paroles l' envoyèrent en arrière, à une époque où tout était plus simple. Rire jusqu'à la fin, c'était tout ce dont elle rêvait, comme ils le faisaient autrefois, insouciants et complices, ignorant le monde autour d'eux.

« Tout, tout en mieux, tout en mieux

Tout va mieux, t'es ma plus belle histoire

Tout en mieux, tout en mieux

Jusqu'à ce que l'amour nous sépare, l'amour nous sépare »

Helena, qui s'était jusque-là retenue, sentit une larme couler sur sa joue. Elle fixait un point dans le vide, les yeux rougis par l'émotion.

Pierre, serrant les lèvres, hésita à essuyer cette larme, mais il s'abstint. C'est à cet instant qu'Helena réalisa ce que Pierre tentait de lui dire. Ces mots, elle les avait souvent pensés. Leur belle complicité, cette relation unique que tant de gens admiraient, avait commencé à se fissurer le jour où ils avaient franchi cette ligne, le jour où ils avaient ressenti plus que de l'amitié.

« Tout le monde connaît tes yeux ; moi, je connais ton rire

Tout le monde connaît tes mieux ; moi, je connais ton pire »

Un léger sourire se dessina sur les lèvres d'Helena. Elle savait à quoi Pierre faisait allusion. Il la connaissait mieux que quiconque, des moments de bonheur jusqu'à ses pires travers. Elle continua d'écouter la chanson, comprenant que Pierre faisait référence à tout ce qu'ils avaient vécu, du début jusqu'à ce fameux soir après le barbecue chez Victoire. Ce soir-là avait été un tournant, un moment douloureux où ils avaient cru se dire adieu pour toujours.

Les paroles évoquaient également les rumeurs incessantes sur leur relation, ce qui la fit sourire. Ces théories farfelues les avaient parfois étouffés, mais elles les avaient aussi fait rire, renforçant leur complicité.

« Et si jamais quelqu'un veut m'obliger à choisir

J'préfère être ami à deux, que seul dans mon délire. »

Helena soupira doucement. Elle savait que Pierre ne serait jamais seul dans son délire. Au fond, elle éprouvait les mêmes sentiments que ceux exprimés dans cette chanson. Et ça elle en avait conscience depuis tellement de temps, elle avait juste nié tout en pensant que c'était plus simples. Au final c'est en écoutant tout ça qu'elle réalisa à quel point elle avait été une idiote tant dans ses réactions que lui, demandait juste à l'aimer.

L'ombre des projecteursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant