Chapitre 15

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Helena se referma brusquement, son visage se figeant comme si elle venait de recevoir un coup de poing dans la poitrine. Son regard, habituellement doux, devint distant, presque froid. Pierre le remarqua immédiatement. Ce retrait, cette manière subtile de se protéger, l'alarma. Elle ne faisait cela que lorsqu'elle se sentait menacée.

Une part d'elle se sentait blessée, presque incomplète. Elle savait, au plus profond d'elle, que les mots d'Axel n'étaient que des idioties et n'y croyait pas une seule seconde. Pour autant, elle savait que Pierre avait repris contact avec Ilona. Elle ne savait pas pourquoi, et elle eu une intuition qui lui disait que Pierre avait toujours un lien avec Ilona, quelque chose qu'elle n'avait pas pu percer.

Peut-être était-ce juste de la jalousie, un vieux sentiment qui s'était réveillé, mais le fait qu'il n'ait rien partagé à ce sujet la rongeait. La colère contre Axel s'entremêlait à la frustration qu'elle éprouvait envers elle-même. Pourquoi Pierre la hantait-il ainsi, alors qu'elle savait qu'ils ne s'étaient rien promis ? Helena releva finalement la tête, son regard déterminé. Elle devait prendre du recul et réfléchir.

Les minutes passèrent sans un mot, chaque seconde étirant le fil de leur tension. Helena reçut une notification de Djebril, lui demandant de l'aide pour poser ses extensions de cheveux, trois heures avant le show du soir au Zénith d'Orléans. Cela aurait dû la distraire, mais au lieu de ça, c'était comme si ce message était un appel à l'évasion. Elle se leva, sans dire un mot à Pierre, déterminée à se plonger dans cette tâche. Pendant ce temps, Pierre sortit fumer une cigarette. Puis une deuxième. Les fumées s'élevaient comme ses pensées, se mêlant dans l'air frais du soir, obscurcissant son esprit. Il perdit rapidement le compte sous le coup du stress. Helena le rendait fou, dans tous les sens du terme, chaque geste, chaque silence pesait sur lui. Il avait l'impression de marcher sur des braises, inquiet de ce qui pourrait se produire, se demandant si elles allaient s'éteindre ou l'embraser.

Après avoir terminé avec Djebril, Helena rejoignit Pierre à l'extérieur. La lueur du crépuscule illuminait faiblement leurs visages. Il en était déjà à sa troisième cigarette, son regard perdu dans la fumée qui flottait dans l'air du soir.

« Tu m'en dois bien une » dit-elle en s'approchant avec un léger sourire fatigué, mais son ton cachait une fragilité. « J'ai besoin de décompresser. »

Pierre haussa les épaules, un peu nerveux, mais essayant de détendre l'atmosphère, tandis qu'il scrutait ses yeux, cherchant une lueur de compréhension. « Tu m'en voudras pas » dit-il en lui tendant son paquet, « mais j'ai pris dans ta banane. C'était ce qu'il y avait de plus proche. »

Helena leva un sourcil, surprise mais amusée par son geste, sa tension s'allégeant légèrement. « Décidément, aujourd'hui tu fais fort, » répliqua-t-elle en prenant une cigarette. « Ma banane, mes cigarettes, Ilona... »

Un silence suspendu suivit sa remarque, un moment où l'humour tentait de masquer le malaise. Pierre la regarda, cherchant quelque chose à dire, quelque chose qui effacerait ce poids entre eux. Mais chaque mot se heurtait à une muraille invisible. La cigarette dans la main d'Helena s'alluma dans une légère flamme, et elle inspira profondément, fermant les yeux un instant, comme si cette bouffée d'air toxique lui apportait un soulagement bien mérité.

« Franchement Axel c'est un con » murmura-t-il finalement. « Je voulais pas te contrarier tout à l'heure... Ilona, c'est juste... »

Il s'interrompit, sentant son cœur battre la chamade. Helena ouvrit les yeux pour le regarder, son regard était plus doux maintenant, moins distant, mais plein d'interrogations.

« C'est juste quoi, Pierre ? » demanda-t-elle doucement, le regard légèrement baissé, un mélange de vulnérabilité et de curiosité se mêlant dans sa voix. « Techniquement, tu ne me dois rien. »

L'ombre des projecteursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant