Quand le coeur balance...

Chapitre 59 - Neva

1 mois et demi plus tard…

– Comment vous sentez-vous, Dalia ? demandé-je tout bas.

– C’est difficile à dire, j’ai la gorge nouée et l’estomac en vrac depuis plusieurs jours à l’idée de croiser son regard mais d’un autre côté, j’ai envie que ce moment passe le plus rapidement possible. J’ai écouté vos conseils, Neva et je me suis habillée de la manière la plus sobre possible.

– Tout va bien se passer, Dalia, je vous le promets. C’est triste à dire mais les jurés ne vous connaissent pas et n’ont pas accès au dossier au même titre que les magistrats. Ils vous jugeront forcément sur votre apparence et sur chaque mot qui sortira de votre bouche. Soyez la plus honnête possible et n’ayez pas peur d’évoquer votre souffrance et tout ce que vous avez traversé à ses côtés.

Je pose brièvement ma main au milieu de son dos tout en le tapotant pour la rassurer tandis que nous prenons place à la table de la partie civile. J’y dispose mon ordinateur portable et le dossier en avalant ma salive un bon nombre de fois. Le temps file tellement vite, un mois et demi est passé depuis ma course poursuite en voiture et l’anniversaire de Liam avec ce foutu jus d’orange dont je ne saurai jamais ce qu’il y avait réellement dedans. Heureusement pour moi, ces derniers temps ont été moins agités.

Un mois et demi durant lequel je me suis renfermée sur moi-même et je me suis faite discrète pour me concentrer sur ce procès. Un mois et demi durant lequel j’ai réfléchi aux derniers évènements et à la façon dont les choses se sont déroulées, à mes actes, aux sentiments contradictoires que j’ai ressentis pour Aaron mais aussi pour Laël. J’avais besoin de m’éloigner.

J’ai tellement l’impression d’être une horrible personne en m’immisçant dans la relation déjà conflictuelle entre deux frères. 

J’avais besoin de fuir. Fuir pour me retrouver et mieux réfléchir. Je n’oublie pas ce que chacun m’a fait ressentir dans mon cœur, dans mon corps et dans ma tête. C’était douloureux mais nécessaire de prendre mes distances. C’est difficile de lutter contre ses sentiments mais encore plus de ne pas les comprendre. Laël m’a manqué, sa gentillesse, sa douceur, sa bienveillance, ses baisers et ses étreintes… Aaron, c’est différent, c’était plutôt sa fougue et son intensité, mais quand je pense à lui, c’est mon corps qui s’anime comme s’il voulait retrouver la chaleur de ses baisers entre mes cuisses mais ma conscience tire la sonnette d’alarme. Je ne peux pas être attirée par quelqu’un qui prend parti pour un homme violent.

Aucun des deux ne m’a contactée. Et c’est sûrement mieux ainsi. Pour eux comme pour moi. Je ne sais pas pourquoi ni comment je me suis retrouvée dans cette situation comme si Laël et Aaron étaient les deux seuls hommes existants sur terre. Et pourtant, ce sont les seuls m’ayant fait redécouvrir des sensations que j’avais oubliées.

Aujourd’hui c’est le grand jour. Archibald de la Valière va être jugé. L’instance va durer trois jours. Ma gorge se serre et mon cœur palpite, j’ai presque les mains moites. J’ai peur de ne pas être à la hauteur et de lamentablement me planter. Mais je ne confie pas mes doutes à Dalia, je ne les confie à personne d’ailleurs. Je garde la face, lui fait des légers sourires rassurant car si je lui montre que je doute, tout s’effondre. Elle compte sur moi pour faire entendre sa voix et la défendre au mieux.

Je réajuste ma robe d’avocat et replace une mèche de cheveux derrière mon oreille. J’ai attaché mes cheveux en chignon car mes joues se réchauffent déjà. Je ne sais pas si c’est à cause de mon anxiété ou si c’est parce que je sens le regard d’Aaron sur moi. Un mois et demi que je ne l’ai pas vu depuis ma nuit chez lui et je n’ai aucune envie de croiser son regard. Quand je me risque enfin à lever les yeux vers la table de la défense où il est assis aux côté d’Archibald, il détourne le regard comme s’il avait été prit en flagrant délit.