Chapitre 38 - Aaron

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L’année est nouvelle mais mon quotidien reste inchangé. Au cabinet, assis à mon bureau en chêne massif, je pense encore à elle. Putain. Et je vais parfois fumer quelques cigarettes à la fenêtre, juste pour me détendre. C’est vrai que j’ai toujours beaucoup de travail mais cette excuse me permet aussi d’éviter certaines soirées avec Lara. Certains soirs où elle me demande encore pourquoi je m’éloigne d’elle et que je lui répète que je ne prends pas mes distances mais juste que je dois travailler sur mes plaidoiries. Et accessoirement que j’ai besoin d’air.

Presque une semaine est passée depuis mais je ne cesse de penser à cette soirée du nouvel an et surtout à la fin. Neva a disparu. Je l'ai cherchée du regard mais elle n’était plus là. Où était-elle passée ? Agathe ne m’avait pas semblée plus inquiète que ça mais j’ai tout de même trouvé ça étrange. Est-ce qu’elle en avait eu marre de cette sangsue de Malo ? Ou peut-être qu’elle a rejoint mon frère ? D’ailleurs, je ne connais pas la nature de leur relation mais les yeux de Laël étaient emplis d’une lueur nouvelle. Une lueur que je n’avais jamais connue malgré toutes les fois où l’on s’est battus. Si j’étais parano, j’aurais presque pu croire que mon père avait mis Neva entre nous pour nous faire revivre nos instants de rivalité plus jeunes. Sauf qu’on ne s’est jamais battus pour une femme auparavant, c’était la première fois. Et vu qu’une de mes passions premières est de faire enrager mon frère je vais m’y astreindre avec joie. Mais pourquoi Neva a subitement quitté cette soirée ? J’ose espérer qu’il ne lui soit rien arrivé de grave. Neva est quand même une énigme à elle toute seule. Elle me repousse mais quand j’observe son corps réagir, je sais que je la trouble. Dans tous les cas, j’adore les jeux de logique et même si mon frère est venu s’ajouter à l’équation, il ne m’empêchera pas de la déchiffrer.

Mon portable sonne bruyamment et me sort de mes pensées. C’est un numéro que je ne connais pas mais je décroche tout de même.

– Allo ?

– Aaron ? C’est Alaric… j’ai bataillé pour avoir le droit à un appel et je n’ai pas beaucoup de temps. Je suis en garde à vue et j’ai besoin de toi.

C’est quoi ce bordel ?

– Comment ça en garde à vue ? Qu’est-ce qu'il s’est passé ?

– Le soir du nouvel an, ma maison a été incendiée, Dalia a été retrouvée inconsciente à l’intérieur… mais elle s’en est sortie heureusement. Sauf qu’on m’accuse d’avoir volontairement mis le feu à ma propre maison et d’avoir tenté d’assassiner ma compagne…

Ok, nouvelle année est aussi synonyme de nouveaux problèmes.

– Alaric si tu veux que je te défende, il faudra que tu me racontes exactement ce qui s’est passé ce soir-là… En attendant, je pourrais te faire sortir en évoquant un vice de procédure, il doit bien y en avoir un vu les bras cassés qui travaillent dans la police. Depuis quand es-tu en garde à vue ? Est-ce qu’ils t’ont bien notifié tes droits ? Est-ce qu’ils t’ont déjà interrogé sans la présence de ton avocat ?

– Depuis hier après-midi. Il y a quelques jours, ils ont perquisitionné ma maison avec une commission rogatoire puis sont venus m’embarquer hier. Je n’ai pu te joindre que maintenant alors que je les supplie depuis la veille pour pouvoir appeler mon avocat.

– Tu es dans quel commissariat ?

– Celui où travaille ton frère…

– J’arrive.

J’attrape mon manteau et mes clés de voiture puis quitte rapidement le cabinet. Une fois arrivé sur place, après quelques négociations musclées avec le commissaire, il n'a pas d’autre choix que de libérer Alaric. Dura lex sed lex. La loi est dure mais c’est la loi. C’était plutôt simple, ils lui ont bêtement fait un interrogatoire sans la présence de son avocat. Il suffit d’un grain de sable dans le rouage et la machine s’effondre. Avec le droit, c’est pareil. Celui qui connaît ses droits a le pouvoir. Par chance, je n’ai pas croisé mon frère, certainement qu’il ne travaille pas aujourd’hui.

Quand le coeur balance...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant