L'envie d'aimer - Tome 1

ETHAN - 59 -

Le jour fatidique est arrivé selon Lysa. Mon départ en grande hâte à New York pour affaires, un entretien de dernière minute, un projet que j'avais à l'esprit depuis des ans : lancer une nouvelle gamme de vêtements pour enfant. Totalement différent du luxe adulte dont nous avions l'habitude de créer. Mon entreprise changerait d'étiquette, de dimension. Une nouvelle aventure commencerait pour mon équipe et moi.

Je n'ai pas intérêt à donner mauvaise impression et agir avec franchise. Choisir mes mots comme éviter le superflu. Ce premier entretien est capital. Et j'en serai le plus fier si l'on venait à faire un premier pas.

Le pied posé sur le sol Américain après des heures de vol, je rallume mon téléphone pour prévenir d'un texto ma petite émotive, hypersensible et romanesque de mon arrivée. Son cœur avait comme cette horrible sensation que l'on ne se retrouverait plus jamais, toutefois, quatre jours ce n'est pas comme-ci nous n'allions jamais nous revoir.

Mon bagage en main, je saute dans le premier yellow cabs disponible. Les rues new-yorkaises fourmillent de monde, les écrans publicitaires agressent à chaque coin de rue. La seule chose qui me fait baigner dans l'euphorie, ce sont les gratte-ciels, ces infinies tours d'acier, de béton et de verre qui s'élèvent. C'est comme si elles donnaient cette sensation de dominer le monde, de posséder la Terre.

Dans la pollution asphyxiante de la City, les bouchons récurrents me font perdre plus d'une heure trente pour regagner le Four Seasons hôtels. Le trac de ne pas réussir, je vérifie durant cet intervalle, le dossier EMG pour la réunion de ce soir, me répétant mentalement mon discours et les points importants à placer. Je suis bien décidé à décrocher cet important contrat et à faire taire mes antagonistes en leur coupant l'herbe fraîche sous les pieds.

Il faut que je remporte ce marché ! Ce serait un incontestable tremplin pour ma société, une véritable gloire aux yeux de mon père. Je suis l'heureux légataire d'un patrimoine à des millions de livres, qui bientôt, je l'espère, conquerra l'Amérique.

Une fois installé dans mon agréable suite, je tente de contacter Lysa comme Julie. Un franc succès remporté face à leur répondeur téléphonique, je raccroche, non sans avoir tancé quelques incongruités à chacune. 

C'est ainsi que je me retrouve piégé par de mauvaises ondes qui transforment mon sourire crispé en une mine soucieuse. Cette chair de poule que je n'aimerais ne pas avoir à ressentir m'irrite la peau. Je n'ai toujours aucune nouvelle de Lysa. C'est étrange... Elle est toujours la première à me rappeler.

Face à la baie, j'admire la capitale du monde s'activer à mes pieds, vérifiant au passage, l'heure à ma montre recalée sur le fuseau horaire des états unis. Trent ne devrait plus tarder. Ce dernier sera d'ailleurs clairement impressionné de revoir le grand gaillard qui se tiendra face à lui et serrera sa main d'une poigne bien plus ferme. Pas comme le maigrichon que j'étais, qui du haut de ses dix-huit ans, se faisait broyer la main par la sienne.

Cela fait des années que nous ne nous sommes pas revus. Pas depuis qu'il a cessé d'être le chauffeur privé de mon père, à l'époque où il le guidait durant ses déplacements professionnels à l'étranger.

Comment ne pas être heureux de le retrouver ? Quand les rares fois où je voyageais avec mon géniteur pendant les vacances et qu'il devait se rendre à une réunion, Trent était censé me distraire raisonnablement. Pour tuer le temps, on traînait dans les best pool halls : l'Amsterdam billard, le fat cat, le space billard qui était plutôt adapté à mon jeune âge.

Derrière mes souvenirs de la 5 th avenue et de Madison Square qui regagnent ma mémoire, Miss casse-couilles rompt ce moment de plénitude, renforçant mon inquiétude d'un mauvais pressentiment quand je fais glisser mon téléphone hors de la poche interne de ma veste. Étant éveillé depuis plus de vingt-quatre heures, la fatigue me submerge.